Pénurie de nourriture et de médicaments à Kunduz

Le gouvernement afghan et les forces talibanes doivent de toute urgence permettre à une aide humanitaire d’être acheminée sans encombre jusqu’à Kunduz, où des milliers de civils sont bloqués dans des conditions de plus en plus éprouvantes, a déclaré Amnesty International jeudi 6 octobre.

L’organisation a recueilli les propos de professionnels de la santé et de civils bloqués à Kunduz tandis que les combats se poursuivent, après que les talibans ont donné l’assaut lundi 3 octobre. Des résidents de Kunduz ont décrit des scènes sombres, à mesure que les réserves de nourriture et d’eau ont été épuisées, et que l’électricité a été coupée. L’hôpital civil de la ville est à court de fournitures médicales et a subi des attaques à la roquette et essuyé des tirs d’armes à feu mercredi 5 octobre.

« Les civils de Kunduz sont une nouvelle fois au bord du gouffre, et le temps commence à manquer. Si toutes les parties au conflit n’établissent pas un couloir humanitaire pour laisser passer l’aide et permettre à ceux qui le souhaitent de fuir, nous pourrions bientôt nous trouver face à une crise humanitaire dévastatrice  », a déclaré Champa Patel, directrice pour l’Asie du Sud à Amnesty International.

« Le droit international humanitaire interdit explicitement de mener des attaques contre ou depuis des zones civiles - les personnes dont la responsabilité pénale serait engagée doivent être traduites en justice dans le cadre de procès équitables.  »

Témoignages d’habitants de Kunduz

Une civile de Kunduz a décrit les attaques menées sans discrimination par les talibans dans la ville :

« Les talibans bombardent sans discernement et certaines des roquettes tombent sur des zones civiles, et deux ont atterri dans la cour de l’hôpital de Kunduz. Les gens ne peuvent pas amener leurs blessés à l’hôpital ni enterrer les morts en raison des combats féroces qui se poursuivent dans la ville, et il n’y a pas d’ambulances pour transporter les victimes à l’hôpital. »

Un médecin de l’hôpital civil de Kunduz a indiqué que les fournitures médicales s’amenuisaient et que les combattants talibans harcelaient les professionnels de santé : « Les talibans appellent [l’hôpital] et demandent aux médecins de leur fournir des équipements médicaux ou les menacent, [leur ordonnant] de venir sur le front et de soigner leurs soldats blessés. »

L’hôpital manque de personnel et est à court de fournitures médicales et de nourriture pour les patients. La plupart des membres du personnel hospitalier n’ont pas dormi depuis plusieurs nuits, a-t-il ajouté. Une femme médecin a signalé que depuis le début du conflit, l’hôpital de Kunduz a soigné plus de 200 personnes blessées lors des affrontements ; certaines ont pu quitter l’hôpital, mais la majorité ont dû être hospitalisées du fait de la gravité de leurs blessures.

Un autre médecin a également déclaré à Amnesty International que face aux pénuries et aux bombardements constants contre l’hôpital, la plupart des patients dont les maux n’ont pas été causés par le conflit ainsi que certains blessés ont été conduits dans les provinces voisines par leurs proches. Mais on ignore s’ils sont arrivés à passer car toutes les voies sortant de la ville sont soit bloquées soient assiégées.

Des civils ont indiqué à Amnesty International que leur frère avait été blessé le 4 octobre dans la soirée par une attaque à la roquette lancée par les talibans, mais ils n’ont pas été en mesure de l’amener à l’hôpital en raison des affrontements nourris. La famille est désormais à court de nourriture et tous les magasins sont fermés.

La crise des déplacements

Les derniers affrontements ont également poussé de nombreux civils supplémentaires à fuir Kunduz ; ils viennent s’ajouter aux quelque 1,2 million de personnes déplacées ayant désespérément besoin d’une aide humanitaire à travers le pays. Selon le bureau du gouverneur dans la province voisine du Takhar, des milliers de civils ayant fui Kunduz sont arrivés dans la province au cours des derniers jours, et le gouvernement fera ce qu’il pourra pour les aider, mais les ressources manquent.

Une grande conférence réunissant des donateurs internationaux s’est achevée à Bruxelles le 5 octobre, et 15,2 milliards de dollars américains d’aide humanitaire ont été promis pour les quatre années à venir. Mais une part de l’accord reposait sur la condition que le gouvernement afghan accepte que des demandeurs d’asile soient renvoyés depuis l’Union européenne (UE).

« Quinze ans après le début du conflit en Afghanistan, plus d’un million de personnes déplacées à l’intérieur du pays et des milliers de civils actuellement attaqués à Kunduz et ailleurs ont terriblement besoin de cette assistance humanitaire accrue. L’aide internationale doit être accordée en fonction des besoins plutôt que par opportunisme politique parce que les gouvernements de l’UE souhaitent se décharger de leurs obligations vis-à-vis des demandeurs d’asile », a déclaré Champa Patel.

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