Communiqué de presse

Roms. "Nous ne pouvons pas baisser les bras, nous devons nous battre pour nos droits !"

Par Catrinel Motoc, chargée de campagne sur la Roumanie à Amnesty International

Neuf militants roms se joindront à Amnesty International le 18 juin, place de l’Université à Bucarest, à l’occasion du lancement de son nouveau rapport intitulé Une marginalisation forcée. Cinq cas d’expulsion forcée de Roms en Roumanie. Chacun d’entre eux a connu l’expulsion forcée ou en a été menacé par les autorités de sa ville en Roumanie.

Leur parcours personnel, qu’ils partageront lors de cet événement, illustre les profondes répercussions sociales et l’impact émotionnel qu’ont les expulsions forcées sur la vie de centaines de Roms, notamment la perte de leur logement et de leurs moyens de subsistance, la coupure des cercles sociaux, la réprobation sociale, les difficultés d’accès à l’éducation et à la santé.

Claudia, dont vous pouvez lire le témoignage ci-après, est l’une des militantes qui se bat pour obtenir justice. Son histoire reflète celle de centaines d’hommes, de femmes et d’enfants roms à qui l’on refuse une place à part entière dans la société :

« Je m’appelle Claudia Linda Greta. J’ai 29 ans et je suis originaire de Cluj-Napoca, en Roumanie. Je suis Rom et j’ai été expulsée de chez moi par la force. Je me suis mariée lorsque j’avais 18 ans et j’ai eu mon premier fils à 19 ans. J’ai trois enfants.

« Un matin, ils sont arrivés pour démolir nos maisons [dans la rue Coastei], il y avait plein de policiers, de gendarmes, de journalistes et de personnes de la municipalité. Je me souviens qu’il faisait froid, un froid glacial. Personne ne dormait et toutes les lumières étaient allumées dans nos maisons. Les policiers se sont mis à frapper à chacune des portes et nous avons commencé à sortir de chez nous. Tout le monde s’est rassemblé dans la rue. Une femme de la municipalité, dont j’ai oublié le nom, a hurlé que ceux qui refuseraient de partir seraient jetés à la rue. Elle n’arrêtait pas de répéter la même phrase : " Vous serez jetés à la rue ! "

« La plupart de mes affaires ont été cassées ou abîmées pendant le trajet [vers le logement de remplacement qui nous a été proposé à Pata Rat]. Lorsque j’ai vu le nouveau logement pour la première fois, c’était l’enfer sur terre. Cela n’aurait pas pu être pire. Et c’est là que nous vivons aujourd’hui, neuf personnes dans une pièce de 16 m2. Tous les matins lorsque je me lève, je regarde par la fenêtre, et qu’est-ce que je vois ? La décharge ! Une fumée épaisse et nauséabonde envahit tous les alentours. C’est l’air que nous respirons.

« J’ai participé à une manifestation pour protester contre les expulsions forcées et contre le fait que nous avons été chassés de chez nous. Je suis Rom, mais je suis aussi citoyenne roumaine et j’ai des droits. […] Il faut vraiment être fort pour vivre comme ça. Nous ne pouvons pas baisser les bras. Nous devons nous battre pour nos droits ! Si nous renonçons à tout espoir, alors nous perdons aussi la dernière lueur d’espoir pour nos enfants ! »

Claudia lutte en faveur de la justice pour sa communauté et fait campagne avec Amnesty International pour mettre un terme aux expulsions forcées en Roumanie, depuis qu’elle a elle-même été expulsée, en compagnie de 350 personnes, le 17 décembre 2010.

Elle a pris part récemment à une action à Bruxelles, dans le cadre de la campagne Ici et maintenant, droits humains pour les Roms ! menée par Amnesty International pour inciter l’Union européenne à prendre des mesures décisives afin de mettre un terme à la discrimination des Roms en Europe.

Lors de cette action, Amnesty International et des militants de toute l’Europe ont mis en scène une expulsion forcée devant le Parlement européen. Claudia a pris la parole devant un public composé notamment de journalistes, de représentants de l’Union européenne et de passants :

« Ce que vous avez vu aujourd’hui n’est pas juste du théâtre. C’est quelque chose qui arrive tous les jours aux Roms à travers l’Europe. Nous subissons des atteintes aux droits humains ; nous sommes victimes de discrimination dans tous les domaines de la vie, à l’école, au travail, dans la rue, dans les bus. Les institutions européennes doivent prendre position et amener les États qui violent les droits des Roms à rendre des comptes. »

Plus tard, lors d’une audience au Parlement européen, Claudia a livré un discours poignant, priant les représentants de l’UE de prendre des mesures décisives pour mettre fin au scandale que représentent la discrimination et le racisme envers les Roms en Europe. Elle a terminé sur ces mots : « Nous sommes à bout de forces, il est temps que chacun obtienne justice ! »

Claudia a également délivré un message aux militants qui soutiennent la campagne :

« C’est une expérience unique que je n’oublierai jamais. Tout ce qui s’est passé [à Bruxelles] était extraordinaire, et nous ne pensions vraiment pas pouvoir aller aussi loin. Nous avons pu voir que beaucoup de gens nous soutenaient et parlaient avec leur cœur. Nous espérons que les choses changeront. Nous pensons et espérons que les membres du Parlement européen ont saisi à quel point la situation était critique. Les gens sont désormais au courant et nous espérons qu’ils passeront à l’action et inciteront les gouvernements, notamment celui de Roumanie, à prendre des mesures pour mettre fin à la discrimination que subissent les Roms en Europe. Nous sommes très reconnaissants pour tout ce que vous avez fait pour nous, vous nous aidez à trouver les moyens d’obtenir justice et c’est d’une importance capitale pour nous tous. »

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