Communiqué de presse

Sommet de l’Union africaine. Les droits humains doivent être protégés durant les conflits armés

Depuis sa création en 2002, l’Union africaine (UA) joue un rôle majeur en Afrique dans les domaines de la résolution de conflits, la paix et la sécurité, la justice internationale et la promotion et la protection des droits humains en général.

Alors que les chefs d’État de l’UA se réunissent les 27 et 28 janvier à Addis-Abeba, Amnesty International les exhorte à porter une attention toute particulière à la protection des droits humains dans les situations de conflit en Afrique, notamment à la protection des civils au Mali, au Soudan, en Somalie et en République démocratique du Congo (RDC).

Au Mali : Depuis que le conflit armé a éclaté dans le nord du Mali en janvier 2012, Amnesty International a recueilli des informations sur des crimes de droit international commis par l’ensemble des parties. Les groupes d’opposition armés touaregs et islamistes se sont rendus coupables d’exactions : ils ont notamment torturé et tué des soldats maliens qu’ils avaient capturés, violé des femmes et des jeunes filles et recruté des enfants soldats.

Selon les informations parvenues à Amnesty International, les groupes islamistes armés ont utilisé des enfants soldats durant les affrontements qui ont eu lieu autour de Diabali mi-janvier. Ils les ont envoyés au front et certains auraient été blessés ou tués.

Les forces de sécurité maliennes ont également commis des violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains en se rendant coupables d’exécutions extrajudiciaires de civils touaregs, du bombardement aveugle d’un camp nomade touareg et de la destruction de troupeaux indispensables à la survie de cette population nomade.

Au Soudan : La situation des droits humains au Soudan reste très préoccupante, en raison du conflit armé qui oppose les troupes gouvernementales au groupe armé d’opposition Mouvement populaire de libération du Soudan – Nord (MPLS-N), dans le Kordofan du Sud et le Nil bleu. Les combats se sont intensifiés fin 2012 donnant lieu à des attaques menées sans discrimination, dont des bombardements aériens, par les forces armées soudanaises. En outre, les deux belligérants ont tiré des obus dans plusieurs secteurs du Kordofan du Sud, faisant des victimes parmi la population civile. Les bombardements aériens aveugles effectués par les forces armées soudanaises se sont traduits par la destruction de biens et de propriétés agricoles. Un accord entre les deux parties prévoyait d’autoriser l’accès humanitaire, mais il n’a pas été appliqué. Le conflit et la privation d’aide humanitaire dans les zones contrôlées par le MPLS-N ont amené plus de 200 000 personnes à chercher refuge au Soudan du Sud et en Éthiopie.

La situation au Darfour, qu’illustre la récente flambée de violence dans la région de Kebkabiya, est tout aussi préoccupante. À Kebkabiya, plus de 200 personnes auraient trouvé la mort et des dizaines de milliers auraient quitté leur foyer du fait des affrontements opposant les membres de deux groupes tribaux. Des membres des forces de sécurité soudanaises seraient également impliqués dans des attaques visant des civils, lors des violences qui font rage dans la région de Kebkabiya.

En Somalie : Si la transition politique d’août 2012 fut un jalon important, le conflit armé entre les forces gouvernementales, les milices qui leur sont affiliées, la Mission de l’Union africaine en Somalie (AMISOM) et le groupe islamiste armé Al Shabab continue de faire des ravages dans le sud et le centre de la Somalie.

Al Shabab continue de recruter et d’utiliser des enfants soldats lors des combats, et d’enlever, de torturer et de supprimer en toute illégalité des civils. Dans les zones où ce groupe armé a été délogé, notamment à Mogadiscio, l’insécurité perdure et Amnesty International reçoit régulièrement des informations faisant état d’atteintes aux droits humains, d’attentats-suicides et autres attaques, qui font des victimes parmi la population.

Les civils seraient également pris directement pour cibles par les parties qui s’affrontent.

Les journalistes et les personnes travaillant dans les médias font face à des risques extrêmes. Au moins 20 journalistes ont été tués en Somalie depuis décembre 2011, sans que personne ne soit traduit en justice pour ces crimes.

En République démocratique du Congo (RDC) : En 2012, on a assisté à une intensification des affrontements en RDC, entre le groupe armé M23 et l’armée nationale. Amnesty International a rassemblé des informations sur les violations des droits humains commises par toutes les parties impliquées, dont des groupes armés congolais et étrangers présents dans l’Est du pays. Ces groupes se sont emparés de zones que l’armée nationale avait désertées pour lutter contre le M23. Le M23 a pris le contrôle du district de Rutshuru, infligeant aux populations locales actes de torture, exécutions extrajudiciaires, violences sexuelles et recrutement forcé d’enfants. La situation s’est dégradée fin 2012 lorsque le M23 a occupé provisoirement la capitale provinciale de Goma. Des centaines de milliers de personnes ont alors quitté leur foyer dans des conditions épouvantables.

L’ouverture de négociations de paix en décembre 2012 s’est traduite par une trêve de facto entre les troupes gouvernementales et le M23 ; toutefois, la population du Nord-Kivu est toujours en danger, les combats se poursuivant entre le gouvernement et d’autres groupes armés.

Depuis juin 2012, Amnesty International a recensé de nombreux cas où des défenseurs des droits humains ont été directement menacés, semble-t-il par des membres du M23, parce qu’ils avaient critiqué ce groupe ou dénoncé les exactions dont il se rend responsable.

L’Union africaine doit veiller à placer au cœur de ses discussions sur les solutions durables à apporter au conflit la protection des civils et le respect du droit international humanitaire et relatif aux droits humains.

Amnesty International engage l’UA à :
– promouvoir en son sein toutes les initiatives en faveur de la protection des civils dans les conflits armés, notamment au Mali, au Soudan, en Somalie et en RDC, et plus précisément à :
o demander publiquement à toutes les parties aux conflits qui font rage au Mali, au Soudan, en Somalie et en RDC, de prendre sans délai des mesures efficaces afin de protéger les civils contre les attaques, et de mettre immédiatement fin à toutes les opérations qui bafouent le droit international humanitaire ou piétinent les droits fondamentaux ;
o faire pression sur tous les États membres de l’UA afin qu’ils viennent en aide et accueillent les civils qui fuient des situations de conflit armé ;
o demander aux gouvernements concernés de suspendre de leurs fonctions pendant la durée de l’enquête tous les membres des forces armées, y compris à des niveaux de commandement, qui peuvent raisonnablement être soupçonnés d’avoir commis des crimes de guerre ou d’autres graves atteintes aux droits humains, et de les juger dans le cadre d’un procès équitable, excluant le recours à la peine de mort ;
o demander que toute violation présumée du droit international humanitaire et toute atteinte aux droits humains fasse l’objet d’une enquête indépendante et impartiale, en vue de traduire les auteurs présumés en justice ;
– lorsque l’UA est engagée dans des situations de conflit armé sur le continent africain, accorder explicitement la priorité à la protection des civils contre les attaques et au respect du droit international humanitaire et des droits humains.

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