Rapport Annuel 2016

Haïti

République d’Haïti
Chef de l’État : Michel Joseph Martelly
Chef du gouvernement : Evans Paul


Les élections législatives et municipales ainsi que l’élection présidentielle se sont déroulées dans un climat de violence et de polémique. Plus de 60 000 personnes qui s’étaient retrouvées sans abri à la suite du tremblement de terre de janvier 2010 étaient toujours déplacées. Des centaines de migrants haïtiens rentrés ou renvoyés de République dominicaine se sont installés dans des camps de fortune, sans accès aux services de base. Le manque d’indépendance du système judiciaire demeurait un motif de préoccupation.

CONTEXTE

L’incapacité à organiser des élections législatives attendues depuis longtemps a rendu le Parlement dysfonctionnel. Le 16 janvier, à l’issue d’un accord avec les partis politiques, le président a confirmé la nomination d’Evans Paul au poste de Premier ministre, lequel, deux jours plus tard, a annoncé la formation d’un gouvernement de transition comprenant des membres des partis de l’opposition.
Le premier tour des élections législatives s’est tenu le 9 août et a été marqué par des perturbations et violences généralisées. Le premier tour de l’élection présidentielle et le deuxième tour des élections législatives et municipales se sont tenus le 25 octobre, et les violences constatées ont été minimes. Cependant, les candidats de l’opposition et les observateurs nationaux ont affirmé que les scrutins avaient été entachés de fraudes massives. À la suite de manifestations de masse et du refus, de la part du candidat à la présidence qualifié pour le deuxième tour, de participer à celui-ci, prévu pour le
27 décembre, le président Martelly a créé, le 22 décembre, une commission chargée d’évaluer le processus électoral du 25 octobre. Le 21 décembre, le deuxième tour a été reporté à une date ultérieure.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a renouvelé en octobre le mandat de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (MINUSTAH) pour une douzième année. Il a déclaré son intention d’examiner un éventuel retrait de la mission sous un an.
L’extrême sécheresse qui sévissait dans les départements du nord-ouest et du sud-ouest a eu des impacts négatifs sur la sécurité alimentaire et l’alimentation, en particulier pour les familles vivant dans les campagnes et la zone frontalière entre Haïti et la République dominicaine.

PERSONNES DÉPLACÉES

À la fin juin, plus de 60 000 personnes qui s’étaient retrouvées sans abri à la suite du tremblement de terre de janvier 2010 vivaient toujours dans 45 camps de fortune. Les conditions de vie dans ces camps se sont aggravées car de nombreux programmes humanitaires ont pris fin faute de financements. De nombreuses personnes déplacées ont quitté les camps après avoir reçu une allocation logement pour une période de 12 mois. Toutefois, le gouvernement n’a pas su mettre en place des solutions durables pour les personnes déplacées1.

DROITS DES RÉFUGIÉS ET DES MIGRANTS

Des dizaines de milliers de migrants haïtiens et leurs familles sont rentrés en Haïti après l’annonce faite par les autorités dominicaines que les renvois de migrants en situation irrégulière reprendraient au 17 juin. De nombreuses personnes auraient été expulsées, et d’autres ont fui après avoir reçu des menaces ou parce qu’elles craignaient des opérations violentes. Des centaines de personnes se sont installées dans des camps de fortune à la frontière. Les organisations haïtiennes et internationales de défense des droits humains, ainsi que l’expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Haïti, ont exprimé des préoccupations sur l’absence d’accès aux services de base pour les personnes vivant dans les camps installés dans la municipalité d’Anse-à-Pitres.

DROIT À LA SANTÉ – ÉPIDÉMIE DE CHOLÉRA

Au cours du premier semestre 2015, le nombre de cas et de décès de choléra a triplé par rapport à la même période en 2014.
Selon les statistiques officielles, 9 013 personnes sont mortes du choléra entre octobre 2010 et août 2015. L’action humanitaire manquait cruellement de moyens financiers. Les Nations unies, jugées responsables d’avoir déclenché l’épidémie par inadvertance, refusaient toujours d’honorer le droit des victimes à des recours et des réparations2.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES ET AUX FILLES

Un projet de loi élaboré en 2011 visant à prévenir, juger et éradiquer les violences faites aux femmes, ainsi que le projet de code pénal contenant des dispositions progressistes sur les violences liées au genre, sont restés au point mort en raison des dysfonctionnements du Parlement. Les condamnations dans les cas de violences à l’égard des femmes restaient rares et la majorité des affaires relatives aux violences conjugales n’ont pas fait l’objet d’enquêtes ou de poursuites.

IMPUNITÉ

L’enquête pour crimes contre l’humanité visant l’ancien président Jean-Claude Duvalier et ses collaborateurs n’a quasiment pas progressé. Après sa visite en Haïti en septembre, l’expert indépendant des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Haïti s’est de nouveau prononcé en faveur de la création d’une « commission de vérité, justice et paix pour éclaircir et réparer » les violations des droits humains commises sous les régimes de François Duvalier et Jean- Claude Duvalier et le gouvernement de Jean- Bertrand Aristide.

SYSTÈME JUDICIAIRE

En mars, la nomination d’un nouveau président du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire a contribué à restaurer la crédibilité de l’institution. Elle a été accompagnée de la nomination d’un directeur de l’Inspection judiciaire et de 10 juges du siège à des postes d’inspecteurs. Des retards dans le renouvellement des mandats des juges ainsi que dans les procédures de certification ont cependant nui à l’efficacité du système judiciaire.
Le manque général d’indépendance du système judiciaire demeurait un motif de préoccupation. Ainsi, des organisations de défense des droits humains ont exprimé leur inquiétude concernant une décision rendue en avril par le tribunal criminel de Port-au- Prince, car elles craignaient que son choix de ne pas poursuivre deux membres présumés de bandes organisées ne soit motivé par des considérations politiques.
Environ 800 prisonniers de centres pénitentiaires de la région de Port-au-Prince ont bénéficié d’un examen de leur dossier sur ordre du ministère de la Justice, soucieux de remédier à la durée excessive de la détention provisoire et à la surpopulation carcérale.
Toutefois, à la fin septembre, un nombre très élevé de prisonniers demeuraient en détention provisoire.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES

Un certain nombre d’agressions verbales et physiques contre des personnes LGBTI ont été signalées au cours de l’année, dont la majorité n’ont pas fait l’objet d’enquêtes approfondies. Selon les organisations de défense des droits des personnes LGBTI, plusieurs candidats aux élections présidentielle et législatives ont fait des déclarations homophobes au cours de la campagne électorale.
Des organisations de défense des droits des personnes LGBTI ont pu contribuer à la formation des nouvelles recrues au sein de la police, mais pour les policiers en exercice aucune formation de ce genre n’a été organisée, à la connaissance d’Amnesty International.

1.Haïti. « Quinze minutes pour partir. » Les violations du droit à un logement décent en Haïti après le tremblement de terre
(AMR 36/001/2015)
2.Haïti. Cinq ans après, toujours pas de justice pour les victimes de l’épidémie de choléra (AMR 36/2652/2015)

Toutes les infos
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit