Rapport Annuel 2016

Arménie

République d’Arménie
Chef de l’État : Serge Sarkissian
Chef du gouvernement : Hovik Abrahamian

Des manifestations en grande partie pacifiques ont été perturbées à plusieurs reprises, et la police a eu recours à une force excessive, ce qui a donné lieu à d’autres manifestations et à une mobilisation encore plus importante. Des organisateurs ont fait l’objet d’interpellations et de poursuites pénales pour des motifs douteux. Un manifestant hostile à la politique du gouvernement aurait été agressé et roué de coups. La torture et les autres formes de mauvais traitements, ainsi que l’impunité dont jouissaient les auteurs de tels actes, constituaient toujours un sujet de préoccupation. L’Arménie a commencé à appliquer de nouvelles dispositions relatives au service civil de remplacement destiné aux objecteurs de conscience, inscrites dans la législation depuis 2013.

CONTEXTE

Lors d’un référendum qui a eu lieu le 6 décembre, les Arméniens se sont exprimés en faveur de plusieurs modifications de la Constitution, aux termes desquelles une partie du pouvoir exécutif était transférée de la présidence au Parlement. L’opposition s’est cependant inquiétée du fait que ces modifications étaient susceptibles de permettre au président en exercice de rester au pouvoir à l’issue de son second mandat.

LIBERTÉ DE RÉUNION

Le mécontentement croissant d’une partie de la population concernant toute une série de problèmes sociaux et politiques s’est exprimé lors de grandes manifestations, que les pouvoirs publics ont tenté de réprimer, en s’en prenant aussi bien aux organisateurs qu’aux participants. Deux questions ont notamment été au centre de la contestation dans toute l’Arménie, en juin et en octobre respectivement : la hausse prévue des tarifs de l’électricité et l’adoption de modifications de la Constitution susceptibles de permettre au président en exercice de se maintenir au pouvoir après la fin de son second mandat.
Le 21 septembre, Smbat Hakobian, militant d’une organisation politique critique à l’égard du gouvernement, a été roué de coups alors qu’il revenait d’une manifestation contre le gouvernement à Erevan. Il a été blessé à la tête et a eu plusieurs côtes cassées. La police a ouvert une enquête et arrêté trois suspects. Une enquête sur une agression similaire perpétrée en 2014 contre trois manifestants n’avait toujours pas abouti fin 2015.

RECOURS EXCESSIF À LA FORCE

La police s’en est prise de façon répétée à des manifestants non violents et à des rassemblements essentiellement pacifiques en recourant à une force excessive et en procédant à des arrestations. Les militants qui prenaient part à des manifestations contre le gouvernement s’exposaient toujours à des risques de violences de la part de la police et de groupes favorables au pouvoir en place.
Le 15 janvier, la police a empêché plusieurs milliers de personnes de défiler jusqu’au consulat de Russie à Gyumri, où elles entendaient protester contre le meurtre par un militaire russe de six personnes appartenant à une même famille. Selon des témoins, des affrontements se seraient produits après que la police, en tenue antiémeute, eut fait usage de matraques, de gaz lacrymogène et de grenades incapacitantes, les manifestants ayant alors riposté par des jets de pierres. Les forces de sécurité ont arrêté 21 personnes, qui ont été relâchées le lendemain. Neuf manifestants et trois policiers auraient été blessés. Une enquête a été ouverte sur cette affaire, mais elle était toujours en cours à la fin de l’année.
Plusieurs milliers de personnes ont entamé le 19 juin un sit-in de plusieurs jours dans le centre d’Erevan, à la suite de l’annonce par le gouvernement d’une augmentation des tarifs de l’électricité. Le 23 juin, environ 500 manifestants se sont dirigés vers le bâtiment de l’administration présidentielle et ont bloqué la circulation devant le cordon établi par la police. Cette dernière a eu recours à une force excessive pour disperser la foule, n’hésitant pas à faire usage de canons à eau. Certains manifestants ont riposté en lançant des bouteilles d’eau, mais il n’y a pas eu d’autres violences de la part des participants au rassemblement ; 237 personnes ont été arrêtées, puis relâchées sans avoir été inculpées. La police a également utilisé une force excessive contre plusieurs journalistes, dont elle a confisqué et endommagé le matériel de travail ; des excuses officielles ont été faites par la suite pour ces actes. Une enquête sur cette affaire était toujours en cours à la fin de l’année1.

LIBERTÉ D’EXPRESSION

Cinq membres du Pré-Parlement, un mouvement d’opposition, ont été arrêtés pour préparation de troubles de grande ampleur, après avoir annoncé leur intention d’organiser un rassemblement contre le gouvernement le 24 avril, le jour où les Arméniens allaient marquer le 100e anniversaire du génocide arménien. Les organisateurs avaient pourtant obtenu l’autorisation officielle de tenir ce rassemblement. Un tribunal d’Erevan a décidé le 9 avril de les placer en détention provisoire pour une durée de deux mois. Ils ont été libérés le 4 mai, à la suite d’importantes manifestations dans la capitale arménienne, mais les poursuites pénales engagées contre eux n’ont pas été abandonnées.

TORTURE ET AUTRES MAUVAIS TRAITEMENTS

La torture et les autres mauvais traitements en garde à vue et dans les prisons, ainsi que l’impunité dont jouissaient les auteurs de tels actes, constituaient toujours un sujet de préoccupation. Plusieurs organisations locales de défense des droits humains ont dénoncé la pratique courante qui consistait à suspendre momentanément de leurs fonctions les responsables de l’application des lois soupçonnés d’actes de torture, pour ensuite les nommer à un poste équivalent, ou parfois supérieur, dans un autre service des forces de sécurité.

DROITS DES LESBIENNES, DES GAYS ET DES PERSONNES BISEXUELLES, TRANSGENRES OU INTERSEXUÉES

Une centaine de militants ont fêté le 17 mai, dans un lieu fermé, la Journée internationale contre l’homophobie et la transphobie. La discrimination à l’égard des personnes LGBTI constituait toujours un motif d’inquiétude, en l’absence notamment de loi réprimant spécifiquement les discriminations fondées sur le genre et alors que les discours de haine restaient très fréquents.

OBJECTEURS DE CONSCIENCE

L’Arménie a commencé à mettre en œuvre les modifications de la législation adoptées en 2013 sur le service civil de remplacement, autorisant les objecteurs de conscience à servir dans les services publics plutôt que dans les forces armées.

1. Arménie. Il faut enquêter sur les violences policières signalées lors de l’arrestation de manifestants dispersés avec un canon à eau (nouvelle, 23 juin)

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