Rapport annuel 2016

QATAR

État du Qatar
Chef de l’État : Tamim bin Hamad bin Khalifa Al Thani Chef du gouvernement : Abdullah bin Nasser bin Khalifa Al Thani

Les droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique étaient soumis à des restrictions arbitraires. Un prisonnier d’opinion purgeait une lourde peine pour avoir écrit et déclamé des poèmes. Les travailleurs migrants, notamment les employés de maison et ceux qui travaillaient sur des chantiers de construction ambitieux, ont continué d’être exploités et maltraités. Les femmes ont cette année encore subi des discriminations, dans la législation et dans la pratique. La peine de mort a été maintenue ; aucune exécution n’a été signalée.

CONTEXTE
Le Qatar s’est joint, en mars, à la coalition internationale dirigée par l’Arabie saoudite qui participait au conflit armé au Yémen (voir Yémen).

LIBERTÉ D’EXPRESSION
Cette année encore les autorités ont restreint la liberté d’expression. Le poète Mohammed al Ajami, également connu sous le nom d’Ibn Dheeb, a été maintenu en détention. Ce prisonnier d’opinion avait été condamné en 2012 à une peine de 15 ans d’emprisonnement pour avoir rédigé et déclamé des poèmes jugés offensants à l’égard de l’État et de l’émir. Le ministre des Affaires étrangères a nié en février que Mohammed al Ajami ait été incarcéré du fait de ses opinions pourtant non violentes1.

Les services de sécurité ont arrêté en mai quatre personnes travaillant pour les médias, dont le journaliste britannique Mark Lobel, qui avaient pourtant reçu l’autorisation officielle de séjourner au Qatar pour rendre compte de la situation des travailleurs migrants. Libérées sans inculpation au bout de deux jours, ces personnes ont été autorisées à rester au Qatar.

SYSTÈME JUDICIAIRE
En mars, la rapporteuse spéciale des Nations unies sur l’indépendance des juges et des avocats a présenté son rapport sur sa visite au Qatar en 2014. Elle a conclu à l’existence de lacunes graves ayant des effets néfastes sur la jouissance des droits humains dans le pays ainsi que sur l’indépendance et l’impartialité des membres de l’appareil judiciaire.

La cour d’appel de Doha, la capitale, a confirmé la culpabilité de Ronaldo Lopez Ulep, un ressortissant philippin condamné en 2014 à la réclusion à perpétuité pour espionnage. Sa condamnation reposait essentiellement sur un « aveu » que des membres des forces de sécurité l’auraient contraint de faire sous la torture avant son procès. La cour d’appel a ramené sa peine à 15 ans d’emprisonnement ; elle a également confirmé la déclaration de culpabilité de deux autres Philippins jugés dans la même affaire, et a réduit leur peine.

DROITS DES TRAVAILLEURS MIGRANTS
Les travailleurs migrants qui, selon les autorités, étaient plus de 1,6 million et constituaient plus de 90 % de la main- d’œuvre du Qatar, étaient toujours exploités et maltraités. L’émir et le ministre des Affaires étrangères se sont tous deux engagés, lors de visites officielles en Inde et au Népal respectivement, pays d’où sont originaires un grand nombre des travailleurs migrants au Qatar, à remédier à l’exploitation des travailleurs migrants dans la chaîne de recrutement. L’émir a approuvé en octobre un certain nombre de modifications au système de parrainage (kafala), en créant un nouveau mécanisme de recours pour les travailleurs migrants qui souhaitent contester le refus, par un parrain, de leur accorder l’autorisation de quitter le pays.

Ces modifications ont aussi accru le contrôle, par l’État, du processus permettant aux travailleurs de chercher à changer d’emploi ou à quitter le Qatar. Les travailleurs migrants demeuraient cependant dans l’obligation d’obtenir l’accord de leur parrain pour tout changement d’emploi ou départ du pays. Le nouveau mécanisme ne devait pas entrer en vigueur avant fin 2016, au plus tôt. En février, l’émir a approuvé la mise en place d’un système électronique de protection des salaires censé régulariser le versement des salaires en contraignant toutes les entreprises à payer leurs ouvriers par virements bancaires.

En violation de la loi qatarienne, les employeurs confisquaient souvent les passeports des travailleurs migrants, les exposant ainsi au travail forcé et à d’autres atteintes à leurs droits fondamentaux. Des milliers d’ouvriers du bâtiment et des secteurs connexes continuaient de vivre dans des logements sales et surpeuplés où, souvent, les conditions de sécurité n’étaient pas respectées. Le gouvernement a annoncé la construction de nouveaux logements pour 258 000 travailleurs d’ici la fin 2016, et il a affirmé en août que des logements avaient été construits pour 50 000 travailleurs.

Des milliers d’employés de maison, essentiellement des femmes, ainsi que d’autres travailleurs étrangers employés par de petites entreprises ou dont l’emploi dépendait d’arrangements informels, étaient toujours particulièrement exposés à des mauvais traitements, notamment le travail forcé et la traite d’êtres humains. Des personnes travaillant pour de grandes entreprises se sont plaintes elles aussi d’atteintes chroniques à leurs droits, notamment de conditions de logement inadéquates, de salaires insuffisants et versés avec retard et de mauvaises conditions de travail, ainsi que de l’impossibilité de changer d’emploi ou de quitter le pays du fait du système de parrainage.

À la suite des tremblements de terre dévastateurs survenus au Népal en avril et en mai, de nombreux travailleurs migrants népalais ont affirmé que leur employeur avait refusé de leur remettre l’autorisation de sortie dont ils avaient besoin pour quitter le Qatar ou de payer leur billet d’avion, une obligation légale pour ceux dont le contrat est terminé. Rares étaient ceux qui ont eu les moyens de retourner chez eux sans cette aide. Beaucoup de ceux qui sont repartis au Népal se sont plaints que leur employeur ne leur avait pas versé leur salaire.

DROITS DES FEMMES
Les femmes faisaient l’objet de discriminations dans la législation et dans la pratique, et elles n’étaient pas suffisamment protégées contre la violence au foyer. Les lois relatives au statut personnel étaient toujours discriminatoires à l’égard des femmes dans le domaine du mariage, du divorce, de l’héritage, de la garde des enfants, de la nationalité et du droit de circuler librement.

PEINE DE MORT
La cour d’appel a confirmé au moins une sentence capitale. Aucune exécution n’a été signalée.

Qatar : Release the poet, Mohammed al-Ajami (MDE 22/2760/2015)

Toutes les infos
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit