Rapport annuel 2017

Paraguay

République du Paraguay
Chef de l’État et du gouvernement : Horacio Manuel Cartes Jara

La pauvreté a reculé, mais les enfants et les adolescents continuaient d’être les plus touchés. Les peuples indigènes étaient toujours privés de leur droit à la terre et à un consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause sur les projets les concernant. Les peuples indigènes tout comme les populations afro-paraguayennes étaient en butte à la discrimination raciale. Un projet de loi visant à éliminer toutes les formes de discrimination était en attente d’adoption à la fin de l’année. Selon certaines informations, des défenseurs des droits humains et des journalistes ont été victimes de persécutions et de violations de leur droit à la liberté d’expression. L’avortement était toujours considéré comme une infraction pénale, et le taux de grossesse chez les fillettes et les adolescentes demeurait un sujet de préoccupation.

Contexte

Un nouveau médiateur de la République a été nommé en octobre ; ce poste était vacant depuis sept ans.

Surveillance internationale

En janvier, le bilan du pays en matière de droits humains a été passé en revue dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU) des Nations unies. Le Conseil des droits de l’homme [ONU] a formulé un certain nombre de recommandations à l’adresse du gouvernement, l’exhortant notamment à adopter le projet de loi visant à éliminer toutes les formes de discrimination fondées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, à élaborer des instruments juridiques pour prévenir et sanctionner les violences faites aux femmes et aux filles, à renforcer la protection des droits des peuples indigènes, à protéger le libre exercice de la liberté de la presse et à lutter contre l’impunité pour les violations des droits humains commises à l’encontre des défenseurs des droits humains et des journalistes. Le Paraguay a accepté toutes les recommandations sauf celles concernant la dépénalisation de l’avortement.

En octobre, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale [ONU] a publié son rapport et ses observations finales sur les quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques du pays. Il a notamment recommandé au Paraguay de prendre des mesures d’action positive afin d’éliminer la discrimination structurelle à l’encontre des peuples autochtones et des Afro-Paraguayens. Il a également pointé du doigt la faible protection accordée par l’État pour garantir le respect du droit à la consultation préalable et des droits des peuples autochtones de disposer de leurs terres, de leurs territoires et de leurs ressources.

En novembre, la rapporteuse spéciale des Nations unies sur le droit à l’alimentation s’est rendue au Paraguay, où elle a rencontré des représentants des autorités publiques et de la société civile. Elle devait présenter son rapport sur cette visite en 2017.

Droits des peuples autochtones

En février, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a pris des mesures conservatoires en faveur des communautés ayoreos totobiegosodes qui vivent dans un isolement volontaire, et appelé le gouvernement à les protéger de ceux qui voudraient mettre la main sur leurs terres ancestrales. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a demandé en octobre au Paraguay d’appliquer pleinement ces mesures conservatoires.

En octobre, la communauté yakye axa n’avait toujours pas pu se réinstaller sur ses terres, bien que la Cour interaméricaine des droits de l’homme ait ordonné au gouvernement de construire une route d’accès. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a demandé au Paraguay de redoubler d’efforts pour mettre véritablement en œuvre la décision de la Cour.

L’affaire concernant l’expropriation des terres de la communauté sawhoyamaxa était toujours en cours à la fin de l’année, bien qu’en juin 2015 la Cour suprême ait rejeté l’appel formé par une société d’élevage pour retarder les effets d’une loi visant à restituer les terres à cette communauté.

En octobre, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a exhorté le Paraguay à prendre des mesures concrètes pour résoudre les problèmes de malnutrition infantile et d’accès à la nourriture, à l’eau potable et aux services d’assainissement auxquels sont confrontées les communautés autochtones et afro-paraguayennes en zone rurale.

Droits en matière de logement – expulsions forcées

En septembre, des membres du Sénat ont déposé une plainte auprès du procureur général contre l’expulsion forcée de 200 familles de la communauté paysanne guahory et le refus du gouvernement d’enquêter sur cette affaire. Une autre expulsion a eu lieu en décembre dans cette communauté, alors qu’un dialogue était en cours entre des Guahorys et des représentants de l’Institut national de développement rural et de la terre pour faire le point sur les régimes fonciers au sein de la communauté.

En septembre, des organisations de défense des droits humains ont signalé l’expulsion forcée de la communauté avá-guaraní de Sauce, en lien avec le barrage hydroélectrique d’Itaipu.

Justice

En juillet, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme a exprimé ses préoccupations quant à la condamnation de 11 paysans à la suite d’un massacre survenu en 2012 à Curuguaty, qui avait fait 17 morts. Selon certaines informations, le droit des accusés de bénéficier d’une défense satisfaisante et d’une procédure régulière n’aurait pas été respecté en raison d’irrégularités au cours de la procédure.

En octobre, à la suite d’une recommandation émise dans le cadre de l’EPU, le Sénat a lancé une procédure en vue de créer une commission indépendante chargée d’enquêter sur le massacre de Curuguaty et de garantir l’accès à la justice pour les victimes et leurs proches.

Droits des femmes et des filles

En décembre, la Chambre des députés a adopté la Loi 5.777 sur la protection exhaustive des femmes contre toutes les formes de violence. Le féminicide a été reconnu comme un crime distinct, passible d’une peine minimale de 10 ans d’emprisonnement. L’obligation d’imposer une conciliation entre les victimes de violences et leurs agresseurs a été levée. Cette loi devait entrer en vigueur au bout d’un an.

Le taux élevé de grossesse chez les enfants et les jeunes adolescentes était préoccupant. D’après les chiffres publiés en octobre par le Centre de documentation et d’études, entre 500 et 700 filles âgées de 10 à 14 ans tombaient enceintes chaque année. Des préoccupations similaires ont été exprimées par le FNUAP dans un rapport sur la jeunesse paraguayenne, selon lequel le nombre de grossesses dans cette tranche d’âge avait augmenté de 62,6 % au cours des 10 dernières années. Les violences faites aux femmes, l’exclusion sociale et la culture machiste ont été mentionnées comme les principales causes de cette hausse.

Liberté d’expression

En novembre, un projet de loi a été présenté en vue d’instaurer des mécanismes de protection pour les journalistes, les professionnels des médias et les défenseurs des droits humains. Cette demande de protection renforcée a notamment été motivée par le fait qu’aucune enquête ni poursuite n’avait été menée sur les homicides de 17 journalistes survenus depuis 1991.

Défenseurs des droits humains

L’avocate et défenseure des droits humains Julia Cabello Alonso a été prévenue qu’elle serait radiée du barreau du Paraguay et empêchée d’exercer au motif qu’elle n’aurait pas respecté l’éthique professionnelle en défendant des peuples autochtones qui réclamaient la restitution de leurs terres.

Dans son rapport publié en octobre, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a recommandé au Paraguay de prendre des mesures pour renforcer la protection des défenseurs des droits humains, notamment des responsables indigènes et des personnes qui défendent les droits des peuples autochtones, contre les intimidations, les menaces et les actes arbitraires de la part de représentants des pouvoirs publics.

De même, le Conseil des droits de l’homme a recommandé au Paraguay de combattre l’impunité pour toutes les violations commises contre des défenseurs des droits humains, y compris les homicides, ainsi que d’enquêter sur les allégations de pratiques abusives de la part des forces de l’ordre visant des indigènes, et de poursuivre les responsables de ces actes.

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