AUGMENTATION ALARMANTE DU NOMBRE D’EXECUTIONS

28 juin 2002

Amnesty International dénonce la forte augmentation du nombre d’exécutions et de condamnations à mort dans la région du Darfour, dans l’ouest du Soudan.

"D’après les informations recueillies, au moins 19 personnes ont été exécutées dans la région du Darfour depuis le début de l’année. De nombreuses autres risquent de subir le même sort dans les jours, les semaines et les mois à venir si cette évolution alarmante n’est pas enrayée", a déclaré le 28 juin l’organisation de défense des droits humains.
En mai, 14 hommes ont été exécutés par pendaison à la prison d’al Fashir après avoir été reconnus coupables de vol à main armée par des tribunaux d’exception, dont le fonctionnement est loin d’être conforme aux normes internationales d’équité. Cinq autres hommes auraient été exécutés à al Fashir en mars, après avoir été déclarés coupables de brigandage et de meurtre par un tribunal d’exception.
Dix-huit hommes, dont Amnesty International connaît l’identité, sont actuellement incarcérés sous le coup de sentences capitales dans les États du Darfour septentrional et du Darfour méridional. L’organisation a par ailleurs reçu des informations non confirmées indiquant que 21 autres personnes avaient été condamnées à mort en septembre 2001. Elle craint que le nombre d’individus en instance d’exécution ne soit nettement plus élevé.

"Ces exécutions sont des homicides sanctionnés par l’État dans les pires conditions qui soient, dans la mesure où les garanties juridiques accordées aux personnes passibles de la peine de mort sont des plus limitées, voire inexistantes. Les autorités judiciaires soudanaises doivent veiller à ce que tout suspect puisse bénéficier de toutes les garanties juridiques prévues par les normes internationales, notamment du droit d’interjeter appel de sa déclaration de culpabilité et de sa peine devant une instance supérieure, et du droit de solliciter la commutation de sa peine", a ajouté Amnesty International.

L’organisation reconnaît que tous les États ont le droit et le devoir de traduire en justice les auteurs présumés d’infractions prévues par la loi, mais elle considère la peine de mort comme le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. En outre, son effet dissuasif n’a jamais été démontré.
"En permettant que des condamnations à mort soient prononcées, les autorités soudanaises bafouent le principe fondamental que représente le droit à la vie, tel qu’il est inscrit dans la Déclaration des droits. Toutes les condamnations à mort prononcées au Soudan doivent être immédiatement commuées, et les procédures des tribunaux d’exceptions doivent être revues et alignées sur les normes internationales", a conclu Amnesty International.

Complément d’information :

Le Code pénal soudanais, qui se fonde sur l’interprétation gouvernementale de la charia (droit musulman), prévoit des peines telles que l’amputation de membres et la peine de mort, éventuellement suivie du crucifiement du condamné. Amnesty International considère ces châtiments comme des peines cruelles, inhumaines ou dégradantes, incompatibles avec le droit international relatif aux droits humains. En appliquant ces châtiments, les autorités contreviennent notamment aux obligations qui leur incombent aux termes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), que le Soudan a ratifié, et de la Convention des Nations unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, que cet État a signée.

Des juridictions d’exception ont été créées en mai 2001 au Darfour septentrional et au Darfour méridional afin de juger des infractions telles que le vol à main armée, le meurtre ainsi que la détention et la contrebande d’armes. À la tête de ces juridictions se trouvent deux juges militaires et un juge civil. Les personnes traduites devant ces tribunaux sont privées d’assistance judiciaire jusqu’au stade des procédures de recours.
En vertu des normes internationales relatives aux droits humains, les personnes passibles de la peine capitale doivent bénéficier du respect le plus strict des normes internationales d’équité, ainsi que de certaines garanties supplémentaires. Amnesty International demeure néanmoins opposée de manière inconditionnelle à la peine de mort, et considère que même la pleine application de ces garanties supplémentaires ne saurait justifier le maintien de ce châtiment.

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