Anar Mammadli est un éminent défenseur des droits humains, ainsi que le directeur du Centre de surveillance des élections et d’études sur la démocratie. Il est cofondateur de l’Initiative pour un climat de justice, un groupe créé récemment qui travaille sur la promotion de l’espace civique et de la justice environnementale dans le cadre de la 29e Conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP29), qui se tient à Bakou en novembre 2024. Il a fait partie des premiers militant·e·s d’Azerbaïdjan qui ont établi un lien entre le respect des droits humains et la justice climatique, et il a activement participé au plaidoyer international auprès du Conseil des droits de l’homme des Nations unies et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
Le 29 avril 2024, en fin de journée, alors qu’il allait chercher son enfant à la crèche, Anar Mammadli a été appréhendé par des inconnus masqués et emmené à bord d’un véhicule noir. Selon des membres de sa famille, la police a ensuite fouillé la maison d’Anar Mammadli et elle y aurait placé de l’argent. Le ministère de l’Intérieur a confirmé sa détention, et sa sœur a indiqué qu’il était officiellement soupçonné de « complot en vue d’introduire illégalement de l’argent dans le pays » au titre de l’article 206.3.2 du Code pénal azerbaïdjanais.
Il aurait été privé de contacts avec son avocat pendant toute la nuit lors de son placement dans un centre de détention provisoire à Bakou. Le 30 avril 2024, le tribunal du district de Khataï, à Bakou a décidé de le placer en détention provisoire jusqu’à la fin du mois d’août 2024. La Cour d’appel de Bakou a examiné un recours contre l’arrestation d’Anar Mammadli le 6 mai, mais ce recours a été rejeté.
Le 7 octobre 2024, Anar Mammadli s’est personnellement adressé, par une demande manuscrite à laquelle était jointe une requête officielle de ses avocats, au Département médical du ministère de la Justice, au service pénitentiaire, au ministère de l’Intérieur et au commissaire aux droits humains, et il a demandé à subir un examen médical poussé dans un hôpital civil privé.
Par la suite, Anar Mammadli a subi des examens médicaux dans le centre de détention. Le bureau du médiateur a demandé aux autorités de lui communiquer les résultats de ces examens. Cependant, ni Anar Mammadli ni ses avocats n’ont eu accès aux résultats.
En 2014, Anar Mammadli a été reconnu comme prisonnier d’opinion par Amnesty International lorsqu’il a été condamné à cinq ans et demi d’emprisonnement pour des accusations fallacieuses de fraude fiscale, d’entreprise illégale et d’abus de pouvoir. Alors qu’il était incarcéré, il s’est vu décerner le Prix des droits de l’homme Václav Havel par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, pour ses contributions exceptionnelles à la société civile dans la défense des droits humains.
La Cour européenne des droits de l’homme a estimé que son arrestation en 2013 constituait une violation des articles 5-1 (droit à la liberté et à la sûreté), 5-4 (droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de la détention) et 18 (limitation de l’usage des restrictions aux droits) de la Convention européenne des droits de l’homme, et que son arrestation et sa détention visaient à le faire taire. Les autorités azerbaïdjanaises ne se sont toujours pas pleinement conformées à cette décision : elles n’ont ni annulé la déclaration de culpabilité ni rétabli cet homme dans ses droits civils et politiques.
Il a bénéficié d’une grâce en 2016, mais a depuis fait l’objet d’attaques répétées de la part des autorités et des médias progouvernementaux, et ces attaques se sont intensifiées à l’approche de la COP29. La détention actuelle d’Anar Mammadli s’inscrit dans le cadre d’une pratique bien établie d’utilisation abusive du système de justice pénale visant à réduire au silence celles et ceux qui critiquent le gouvernement en Azerbaïdjan, notamment les défenseur·e·s des droits humains, les militant·e·s politiques et les journalistes, entre autres, au nombre desquels figurent l’universitaire et militant anticorruption Gubad Ibadoghlu, le membre du conseil d’administration de Troisième République Akif Gurbanov et le fondateur de Toplum TV, Alasgar Mammadli. De plus, plus de 20 journalistes se trouvent toujours en détention.
Parmi eux figurent des journalistes et d’autres personnes travaillant pour Abzas Media, Toplum TV et Kanal 13.