Écrire 23 hommes libérés sous caution, mais on craint toujours pour leur sécurité

Sur les 28 hommes arrêtés lors d’un événement à l’extérieur de Dacca le 19 mai, 23 ont été libérés sous caution. Bien qu’il semble qu’ils aient initialement été arrêtés parce qu’ils étaient soupçonnés d’avoir enfreint l’interdiction des « rapports charnels contre nature » inscrite dans le Code pénal, les 28 hommes ont été inculpés au titre de la Loi de 1990 sur le contrôle des stupéfiants. La demande de libération des cinq hommes toujours en détention doit être examinée le 21 juin. Des connaissances des hommes inculpés ont été convoquées pour être interrogées.

Sur les 28 jeunes hommes arrêtés lors d’un événement le 19 mai à Keraniganj, une ville située au sud de Dacca, la capitale, 23 ont été libérés sous caution à l’issue de plusieurs audiences ces dernières semaines. La demande de libération des cinq hommes toujours détenus à la prison centrale de Kashimpur (une prison de haute sécurité) doit être examinée lors d’une audience prévue le 21 juin. On ignore pourquoi ces cinq hommes sont toujours détenus et n’ont pas encore été libérés sous caution.

Bien que ces hommes aient été détenus pour des accusations liées à la Loi de 1990 sur le contrôle des stupéfiants, Amnesty International pense qu’ils ont été arrêtés car le rassemblement était connu pour être fréquenté par des homosexuels. Des sources ont informé l’organisation que les policiers n’ont pas trouvé de stupéfiants sur la plupart des hommes arrêtés. La Loi sur le contrôle des stupéfiants prévoit une peine pouvant aller jusqu’à la réclusion à perpétuité ou la peine de mort.

Depuis les premières arrestations, certains des hommes qui avaient participé à l’événement mais qui étaient partis avant la descente de la police ont été invités à « prendre le thé » par le Bataillon d’action rapide (RAB) pour avoir une conversation non officielle, ou ont été priés de se rendre au poste de police pour être interrogés. Amnesty International craint que leurs noms aient été divulgués au cours des interrogatoires des hommes arrêtés, et qu’ils risquent à présent d’être arrêtés eux aussi. Plusieurs organes de presse ont également publié des photos de certains des hommes qui ont été libérés sous caution, ce qui met leur sécurité en danger.

Tout rapport sexuel entre hommes, même s’il est librement consenti, est une infraction pénale au Bangladesh, ce qui bafoue le droit international relatif aux droits humains. L’homophobie a souvent de graves répercussions sociales pour les personnes qui en sont victimes et leur famille : elles peuvent notamment être ostracisées par leur entourage ou perdre leur emploi. Des sources ont informé Amnesty International qu’à cause de ces arrestations, un des hommes a perdu son emploi, et un autre a été obligé de quitter le domicile familial.

Le 18 mai 2017, entre 150 et 200 hommes se sont rassemblés pour un événement régulier connu pour être fréquenté par des homosexuels, à Keraniganj, une ville située au sud de Dacca, la capitale. À environ deux heures du matin, des membres du Bataillon d’action rapide (RAB), une unité d’élite anticriminalité et antiterroriste de la police bangladaise, ont effectué une descente dans le centre communautaire où avait lieu l’événement.

Ces dernières années, Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits humains ont rassemblé des informations sur un grand nombre de violations des droits humains commises par des membres du RAB, notamment des exécutions extrajudiciaires, des actes de torture et des disparitions forcées. Amnesty International a entendu de plusieurs sources que des membres du RAB ont agressé physiquement et verbalement beaucoup des hommes qui étaient présents et les ont forcés à se placer en ligne les uns à côté des autres. Ils les ont ensuite « inspectés » et ont arrêté ceux qu’ils soupçonnaient d’être homosexuels, en se basant sur leurs vêtements et leur gestuelle.

Au moins 28 personnes ont été arrêtées, dont le propriétaire du centre communautaire ; les autres ont été autorisées à partir. D’après des informations des médias, Jahangir Hossain Matuboor, le dirigeant du RAB, a déclaré que le RAB avait effectué une descente dans le centre communautaire à la suite de plaintes des habitants du quartier. Il a déclaré que des préservatifs et des stupéfiants avaient été trouvés sur les lieux, et qu’après avoir été arrêtés, ces hommes avaient tous admis pratiquer des « activités homosexuelles ». Ces hommes ont ensuite été conduits au poste de police de Keraniganj, où ils ont été placés en détention au titre de la Loi de 1990 sur le contrôle des stupéfiants, parce qu’ils étaient soupçonnés de possession de stupéfiants.

Au titre de l’article 377 du Code pénal bangladais, qui cible principalement les relations homosexuelles, les « rapports charnels contre nature » sont passibles d’une peine d’emprisonnement à perpétuité. Ériger en infraction des relations homosexuelles privées entre adultes consentants est une violation des droits à la vie privée et à la non-discrimination, et donc des obligations internationales du Bangladesh en matière de droits humains, notamment des articles 2(1) et 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le harcèlement des personnes LGBTI par les forces de sécurité n’est pas rare au Bangladesh, et un grand nombre de personnes LGBTI ont dit à Amnesty International qu’elles hésitaient beaucoup à aller voir la police. Loin d’être protégées, les personnes qui ont signalé des atteintes déclarent qu’elles sont souvent harcelées par la police, qu’on leur dit de se montrer « moins provocantes » et qu’elles sont même menacées d’être arrêtées et inculpées pour « crime contre nature », au titre de l’article 377 du Code pénal.

La situation des personnes LGBTI au Bangladesh s’est considérablement détériorée depuis avril 2016, lorsque Xulhaz Mannan et Mahbub Tonoy, deux éminents militants LGBTI, ont été attaqués et tués à coups de machette par le groupe armé Ansar al Islam. Xulhaz Mannan était le dirigeant de Roopban, une organisation militante des droits des personnes LGBTI qui publiait également le seul magazine LGBTI du pays. Après ces homicides, les menaces à l’encontre des personnes LGBTI se sont fortement accrues, obligeant beaucoup d’entre elles à se cacher ou à quitter le Bangladesh pour assurer leur propre sécurité. L’autocensure est devenue la norme et même les quelques activités organisées par des groupes comme Roopban ont presque toutes cessé.

Non seulement les représentants du gouvernement n’ont pas condamné les homicides, mais ils ont également fait des déclarations similaires à celles du ministre de l’Intérieur Asaduzzaman Kamal, qui avait déclaré en avril 2016 que tout mouvement faisant la promotion du « sexe contre nature » était interdit dans la société bangladaise. Ces déclarations ont mis encore plus en danger les personnes LGBTI et indiquent qu’elles ne seront pas protégées par l’État. Pour plus d’informations, voir le récent rapport d’Amnesty International Bangladesh.

Entre peur et répression, les voix dissidentes sont prises au piège (https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2017/05/bangladesh-dissenting-voices-trapped-between-fear-and-repression/)

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