Mohammad Faisal Abu Sakha, qui est âgé de 23 ans, a été arrêté par des militaires israéliens le 14 décembre 2015 alors qu’il se rendait à son travail à l’École de cirque de Palestine à Beir Zeit, près de Ramallah. Il a été interpellé au poste de contrôle de Zaatara, non loin de Naplouse (Cisjordanie), et emmené au centre de détention militaire de Hawara, situé à proximité. Ses parents ont par la suite été informés par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) de son transfert à la prison de Megiddo, dans le nord d’Israël.
Les autorités militaires israéliennes lui ont signifié son placement en détention administrative pour une durée de six mois le 25 décembre. Un juge militaire a examiné l’ordre de détention administrative visant Mohammad Faisal Abu Sakha et l’a confirmé le 5 janvier au tribunal militaire d’Ofer, dans le nord de la Cisjordanie. Le 21 mars, un juge militaire a examiné le recours formé contre la décision de le placer pendant six mois en détention administrative, mais il l’a rejeté le 31 mars. Selon des informations parues ce jour-là sur le site Internet d’information Al Jazira, un porte-parole de l’armée israélienne aurait déclaré que Mohammad Faisal Abu Sakha était détenu parce qu’il représentait une menace pour la sécurité de la région et que les détails concernant son dossier étaient confidentiels.
Mohammad Faisal Abu Sakha a commencé ses études à l’École de cirque de Palestine en 2007 ; artiste titulaire depuis 2011, il forme des enfants aux arts du cirque. Il s’occupe plus particulièrement d’enfants ayant des difficultés d’apprentissage, qui peuvent être jusqu’à 30 dans un groupe de plus de 300 élèves. L’École de cirque de Palestine, financée par divers organismes caritatifs et autres entités, notamment la Commission européenne, estime qu’il n’y a aucune raison de considérer Mohammad Faisal Abu Sakha comme représentant une menace pour la sécurité, car il consacre sa vie au cirque et son seul crime est de « rendre des enfants heureux ». Créé en 2006, cet établissement a pour mission de former des enfants et des jeunes palestiniens aux arts du cirque et ainsi de « renforcer les capacités sociales, créatives et physiques des Palestiniens, en les incitant à s’engager et en leur donnant les moyens de jouer un rôle constructif dans la société ».
La détention administrative – introduite soi-disant à titre exceptionnel pour les personnes qui représentent un danger extrême et imminent du point de vue de la sécurité – est utilisée par les autorités israéliennes en parallèle du système judiciaire pour arrêter, inculper et poursuivre des personnes soupçonnées d’infractions pénales, voire des personnes qui n’auraient jamais dû être arrêtées. Les ordres de détention administrative peuvent être renouvelés indéfiniment et Amnesty International considère certains Palestiniens détenus dans ce cadre comme des prisonniers d’opinion, incarcérés uniquement pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d’expression et d’association. Les autorités israéliennes ont recours de plus en plus fréquemment à la détention administrative depuis octobre dernier : plus de 580 Palestiniens étaient sous le coup d’une telle mesure à la fin de l’année 2015. Cette augmentation a eu lieu en même temps que la reprise des détentions administratives de mineurs. En octobre 2015, trois jeunes hommes de 17 ans titulaires d’une carte d’identité de Jérusalem ont été les premiers mineurs victimes de cette pratique depuis presque quatre ans.
Au total, neuf mineurs ont été placés en détention administrative entre octobre 2015 et mars 2016. L’un d’eux a été inculpé d’une infraction lorsque l’ordre de détention le concernant est arrivé à échéance, cinq ont été libérés à l’issue de cette période et quatre étaient encore maintenus en détention administrative en avril 2016. Selon Defence for Children International – Palestine (DCIP), 422 mineurs palestiniens, âgés de 12 à 17 ans, étaient détenus par l’armée israélienne en décembre 2015. Cette ONG estime que 500 à 700 mineurs sont chaque année placés en détention et jugés par des tribunaux militaires israéliens, la plupart du temps pour des jets de pierres.
À l’exception d’une seule, toutes les prisons israéliennes dans lesquelles les détenus administratifs palestiniens sont incarcérés sont situées sur le territoire israélien. La détention de Palestiniens en Israël constitue une violation du droit international. Les articles 49 et 76 de la Quatrième Convention de Genève prévoient que les détenus originaires des territoires occupés doivent être détenus dans ces territoires et non dans celui de la puissance occupante. À cause de cette pratique, il est très difficile pour les familles des détenus de leur rendre visite car elles ont besoin d’un permis pour entrer en Israël. Le refus des autorités israéliennes de délivrer ces permis est une politique punitive qui pénalise à la fois les détenus et leurs proches. Si tous les prisonniers palestiniens étaient détenus dans les territoires occupés, leurs familles n’auraient pas besoin d’entrer en Israël pour leur rendre visite et la question de la délivrance de permis ne se poserait pas. Les proches de Mohammad Faisal Abu Sakha lui ont rendu visite trois fois depuis son arrestation.
Des militants d’Amnesty International à travers le monde continuent de demander justice pour Mohammad Faisal Abu Sakha. Des exemples d’initiatives sont visibles sur http://tinyurl.com/gsoe2fq et http://tinyurl.com/jls6qoy.