Écrire Arrestation d’un artiste s’opposant à la censure

Le 1er mars, les autorités cubaines ont arrêté l’artiste Luis Manuel Otero Alcántara, figure du mouvement s’opposant au décret 349, une loi dystopique qui sert à censurer les artistes.

Amnesty International considère cet homme comme un prisonnier d’opinion, détenu uniquement en raison de ses convictions exprimées de manière pacifique. L’organisation demande sa libération immédiate et inconditionnelle.

Luis Manuel Otero Alcántara est devenu l’une des principales figures du mouvement d’opposition contre le décret 349 à Cuba.

Au titre de ce décret, tous les artistes, y compris les collectifs d’artistes, les musiciens et les comédiens, ont l’interdiction de se produire dans des lieux publics ou privés sans l’autorisation préalable du ministère de la Culture. Les particuliers et les entreprises qui engagent des artistes sans cette autorisation peuvent être sanctionnés et les artistes qui travaillent sans autorisation préalable encourent une confiscation de leur matériel et une lourde amende. Le nouveau décret prévoit également que les autorités ont le pouvoir de suspendre immédiatement une représentation et de proposer l’annulation de l’autorisation accordée pour une activité artistique.

Ces décisions ne peuvent faire l’objet d’un recours que devant le ministère de la Culture (article 10) : le décret ne prévoit pas de recours effectif permettant de faire appel d’une telle décision devant un organe indépendant, pas même devant les tribunaux.

Ce texte contient des restrictions formulées en des termes vagues et excessivement larges concernant l’expression artistique. Par exemple, il interdit les contenus audiovisuels contenant, entre autres choses, « l’utilisation de symboles patriotiques qui contreviennent à la législation en vigueur » (article 3a), « un langage sexiste, vulgaire ou obscène » (article 3d) et « tout autre [contenu] contrevenant aux dispositions législatives qui réglementent le développement normal de notre société en matière de culture » (article 3g). De plus, il érige en infraction la « commercialisation de livres dont les contenus portent atteinte aux valeurs éthiques et culturelles » (article 4f).

Le droit international relatif aux droits humains et les normes en la matière disposent que toute restriction du droit à la liberté d’expression, y compris l’expression artistique, doit être prévue par la loi et définie de façon suffisamment précise pour éviter toute interprétation ou application trop vague ou arbitraire, sous une forme qui soit accessible au public et qui indique clairement quel comportement est érigé en infraction.

En tant qu’État partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), Cuba est tenu de s’abstenir de tout acte allant à l’encontre de l’esprit et des objectifs de ce traité. L’article 19 du PIDCP protège spécifiquement le droit à la liberté d’expression, qui comprend la « liberté de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce [...] », y compris « sous une forme [...] artistique ».

Amnesty International s’est déjà déclarée préoccupée par le fait que le décret 349 risque d’avoir un effet dissuasif sur les artistes à Cuba, ce qui les empêcherait de mener leur travail légitime, de peur des représailles.

L’article 203 du Code pénal cubain, dont l’une des dispositions semble invoquée pour poursuivre Luis Manuel Otero Alcántara, ne respecte pas les normes internationales car il a pour effet de limiter la liberté d’expression.

Amnesty International s’oppose aux lois qui interdisent le manque de respect à l’égard des chefs de l’État ou des personnalités publiques, de l’armée ou d’autres institutions, de drapeaux ou d’autres symboles (telles les lois sur la lèse-majesté et l’outrage).

Le procès de Luis Manuel Otero Alcántara devait commencer le 11 mars 2020 mais a été reporté.

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