Des inconnus ont fait irruption au domicile de Mario Luna Romero, membre influent de la communauté autochtone Yaqui, dans l’État de Sonora, dans le nord du Mexique, et ont mis le feu à la voiture de son épouse. Aucune mesure de protection n’a pour l’instant été mise en place à leur domicile et les investigations progressent lentement. Mario Luna et sa famille restent en danger.
Dans la matinée du 27 juin, Victoria Anahí Ochoa Domínguez, l’épouse de Mario Luna Romero, a vu de la fumée s’échapper de leur garage et est sortie en courant : son véhicule était en flammes. Quelques heures plus tard, lorsque son mari est rentré d’un déplacement à l’étranger, il a signalé l’incident au Mécanisme fédéral de protection des défenseurs des droits humains et des journalistes, qui lui offre des mesures de protection en raison de ses activités de défense du territoire de la communauté autochtone Yaqui, dans l’État de Sonora. Des agents de ce mécanisme de protection lui ont assuré que des policiers de la sécurité de l’État allaient être envoyés rapidement, mais ils ne sont jamais arrivés. Mario Luna a alors appelé la police d’investigation locale, qui est venue inspecter les lieux le jour même. Ils ont découvert une bouteille en verre emplie d’essence et entourée de tissu, qui avait été lancée sous la voiture, indiquant clairement qu’il s’agissait d’une attaque délibérée.
Ce n’est pas la première fois que Mario Luna et sa famille sont confrontés à des problèmes de sécurité. Anahí Ochoa a déclaré à Amnesty International qu’au cours des semaines précédant l’incident du 27 juin, des véhicules inconnus stationnaient devant leur domicile, et ce à plusieurs reprises. Mario Luna prend part à différentes activités pour défendre les droits collectifs de la communauté Yaqui, notamment en lien avec le droit à l’eau compromis par l’aqueduc Indépendance, un projet qui pourrait menacer l’accès de la communauté à l’eau et sa survie culturelle.
Écrire Des assaillants incendient la voiture d’un défenseur des droits humains
Mario Luna Romero est un infatigable défenseur des droits à la terre, à l’eau et à l’environnement, ainsi que de la survie culturelle de la communauté indigène Yaqui. Le 23 juin, quelques jours avant que la voiture de son épouse ne soit incendiée, Mario Luna avait déposé une réponse juridique à une décision de justice demandant à la Commission nationale de l’eau (Comisión Nacional del Agua, CONAGUA) de se conformer à un arrêt afin de résoudre les questions de consentement libre, préalable et éclairé de la communauté Yaqui. En 2017, Mario Luna a rempli diverses fonctions en tant que représentant des peuples autochtones du Mexique : représentation à l’Instance permanente des peuples autochtones des Nations unies en mai 2017 et participation à une consultation avec le Congrès national indigène du Mexique en vue de parvenir avec d’autres peuples autochtones à un consensus au sujet d’un candidat autochtone à l’élection présidentielle de 2018.
Mario Luna a été incarcéré de septembre 2014 à octobre 2015 pour des accusations qui avaient pour objectif de criminaliser ses initiatives en tant que défenseur des droits humains. Amnesty International a publié une série d’Actions Urgentes réclamant sa libération durant cette période. Mario Luna a été libéré en octobre 2015, un juge ayant statué que les preuves à son encontre et contre le dirigeant Yaqui Fernando Jiménez étaient insuffisantes (voir : https://www.amnesty.org/fr/documents/amr41/2720/2015/fr/). La communauté Yaqui et un certain nombre d’ONG, dont Amnesty International, ont maintenu que les poursuites engagées contre Mario Luna et Fernando Jiménez étaient sans doute motivées par des considérations politiques. En effet, les deux hommes ont pris part à la campagne de la communauté Yaqui revendiquant leur droit à la consultation et au consentement préalable, libre et informé dans le cadre de la construction d’un aqueduc réduisant les ressources en eau de la communauté.
L’aqueduc Indépendance qui affecte la communauté Yaqui est pleinement exploité depuis quelques années. En 2013, la Cour suprême du Mexique a reconnu que les autorités fédérales et de l’État avaient manqué à leurs obligations envers la communauté Yaqui. Elle a demandé des mesures correctives, notamment une nouvelle évaluation de l’impact environnemental et un processus de consultation. Cette décision n’a pas encore été mise en œuvre. En 2015, un institut gouvernemental d’anthropologie a conclu que l’aqueduc compromettait sérieusement la survie de la communauté Yaqui et que les autorités devraient par conséquent envisager de suspendre son utilisation afin de se conformer à la décision de la Cour suprême.
Noms : Victoria Anahí Ochoa Domínguez (f), Mario Luna Romero (h), Carlos Luna (h) et d’autres membres de leur famille
Hommes et femmes
Action terminée