Le 11 novembre, le ministère de l’Intérieur a annoncé une suspension générale et arbitraire des activités de 370 organisations non gouvernementales (ONG) pour trois mois. Des ONG spécialisées dans les droits des enfants, les droits des femmes et la pauvreté, ainsi que des associations d’avocats, ont été prises pour cible. Ces suspensions arbitraires violent les droits aux libertés d’expression et d’association et ne sauraient se justifier, même au titre de l’état d’urgence.
Le 11 novembre, le ministère de l’Intérieur a annoncé la suspension des activités de 370 ONG dans 39 provinces en vertu de l’article 11 de la Loi relative à l’état d’urgence, en prétextant le maintien de « la sécurité et l’ordre publics ». Depuis l’annonce, les gouvernorats de province ont condamné des dizaines de locaux d’ONG sans préavis.
Ces suspensions, prévues initialement pour trois mois, ont été annoncées sans que la raison de chacune d’elles ne soit précisée et ne sont pas susceptibles de recours. La décision du ministère de l’Intérieur intervient dans un contexte de répression massive visant toutes les formes de désaccord, y compris des fermetures de médias à grande échelle, et l’emprisonnement de journalistes, de membres de l’opposition, de défenseurs des droits humains et de militants, à la suite de la tentative de coup d’État de 15 juillet et de l’instauration de l’état d’urgence, le 21 juillet.
Parmi les ONG dont les activités ont été suspendues figurent l’Association des avocats progressistes (ÇHD) et l’Association des avocats pour la liberté (ÖHD), dont les membres ont représenté des victimes de torture et d’autres formes de mauvais traitements, ainsi que l’Association de femmes Van (VAKAD), qui prête des services aux femmes fuyant la violence familiale, et l’association Les enfants au programme (Gündem Çocuk). Autre organisation prise pour cible, l’association Sarmaşık, qui fournit une aide alimentaire et dispense des cours à 32 000 personnes à Diyarbakır (sud-est de la Turquie), y compris des personnes déplacées de force par l’État. Selon les informations recueillies par Amnesty International, les activités de plus de 70 ONG ont déjà été suspendues. La liste complète des 370 ONG concernées n’a pas été rendue publique.
Les mesures radicales empêchant des ONG de mener leurs activités sont disproportionnées et ne sauraient se justifier, même au titre de l’état d’urgence, et constituent une violation des droits aux libertés d’expression et d’association, garanties par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel la Turquie est partie.