Ibrahim Metwaly est avocat et cofondateur de l’Association des familles de disparus en Égypte. Il a cofondé cette organisation après que son fils Amr a été soumis à une disparition forcée le 8 juillet 2013. Il s’est présenté à des postes de police, des prisons, des hôpitaux et des morgues pour retrouver son fils, sans succès. Les forces de sécurité égyptiennes ont nié avoir connaissance du lieu où son fils se trouvait et du sort qui lui avait été réservé. Amr manque toujours à l’appel, mais sa famille a arrêté de le rechercher après l’arrestation d’Ibrahim Metwaly, par crainte de nouvelles représailles.
Le 12 septembre 2017, après son arrestation le 10 septembre, le parquet suprême de la sûreté de l’État a ordonné le placement en détention d’Ibrahim Metwaly pour 15 jours, dans l’attente de l’ouverture d’une enquête sur les accusations de création et de direction d’un groupe illégal, les « Familles de disparus en Égypte », de « conspiration avec des parties étrangères pour porter atteinte à la sécurité nationale égyptienne » et de « publication de fausses nouvelles ».
Alors que le droit égyptien impose une période maximale de deux ans de détention provisoire, cette disposition est régulièrement contournée dans les affaires impliquant des critiques de l’État et des opposant·e·s politiques, à l’aide d’une pratique connue sous le nom de « rotation ». Dans le cas d’Ibrahim Metwaly, les procureurs du SSSP ont ouvert deux nouvelles affaires en 2019 et 2020.
Le 15 janvier 2025, la rapporteuse spéciale des Nations unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme a publié une déclaration condamnant le recours à la législation antiterroriste pour emprisonner les défenseur·e·s des droits humains. Dans sa déclaration, elle cite la détention arbitraire prolongée d’Ibrahim Metwaly, ainsi que le refus des autorités égyptiennes de lui fournir des soins de santé adéquats.
Ibrahim Metwaly est actuellement détenu à la prison Badr 3, située à 70 kilomètres au nord-est du Caire, où, selon les recherches effectuées par Amnesty International, les prisonniers sont soumis à des conditions horribles et punitives. D’anciens détenus et des proches de détenus ont parlé d’un accès très limité aux produits de première nécessité tels que la nourriture en quantité suffisante, les vêtements et les livres. Les autorités refusent souvent tout contact régulier avec les familles et les avocats, et les audiences de renouvellement de la détention ont régulièrement lieu en ligne.
Ces audiences se déroulent dans des conditions coercitives, en présence de gardiens de prison, et les détenus ne peuvent pas communiquer avec leurs avocats. Elles exposent par ailleurs les détenus à des risques de représailles de la part des gardiens s’ils disent avoir subi des actes de torture ou d’autres formes de mauvais traitements, et empêchent les juges de voir des ecchymoses ou autres blessures.
La famille d’Ibrahim Metwaly est autorisée à lui rendre visite tous les 45 jours ou tous les deux mois. Les visiteurs sont assis dans une cabine avec une cloison en verre qui les sépare de leurs proches, ce qui rend la communication difficile en raison du faible volume du téléphone. La famille est aussi autorisée à livrer de la nourriture, des vêtements et des articles de santé tous les 30 jours, mais elle signale qu’à certaines occasions, les fonctionnaires interdisent certains articles selon leur bon vouloir.
Amnesty International a recueilli des informations sur un ensemble de disparitions forcées qui touchent l’Égypte depuis une dizaine d’années. L’Agence de sécurité nationale et d’autres forces de sécurité placent systématiquement en détention au secret des personnes accusées d’être impliquées dans des actes de terrorisme ou des manifestations, et refusent d’informer les proches de ces personnes et leurs avocats du sort qui leur a été réservé et du lieu où elles se trouvent, pour des périodes allant de quelques jours à 23 mois.
L’Égypte n’a toujours pas signé la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées.