Écrire Les charges pesant sur une journaliste doivent être abandonnées

Dans la soirée du 31 mai 2020, la police de la ville de Des Moines, dans l’Iowa, a aspergé de gaz poivre la journaliste Andrea Sahouri alors qu’elle couvrait une manifestation du mouvement Black Lives Matter et criait « Je suis journaliste, je suis journaliste », avant de l’arrêter et de la placer en garde à vue.

Le procureur a insisté pour qu’elle soit jugée pour deux simples délits mineurs, pour lesquels elle encourt une amende, une peine de 30 jours de prison, ou les deux. Le procès d’Andrea Sahouri doit débuter le 8 mars 2021.

Amnesty International appelle à l’abandon de toutes les charges à son encontre.

Selon un nouveau rapport de la Freedom of the Press Foundation, intitulé U.S. Press Freedom in Crisis : Journalists under Arrest in 2020, sur au moins 117 journalistes arrêtés en 2020 alors qu’ils couvraient des manifestations, 16 journalistes sont toujours inculpés, dont Andrea Sahouri. Amnesty International a documenté le cas d’Andrea Sahouri pour son rapport d’août 2020 intitulé Le monde vous regarde : violations massives des droits des manifestant·e·s du mouvement Black Lives Matter par la police américaine, dans lequel elle montre que les forces de l’ordre ont réagi de manière injustifiée et disproportionnée face aux manifestant·e·s, journalistes, observateurs·trices juridiques et secouristes, bafouant le droit à la liberté de réunion, faisant des blessé·e·s et mettant en danger les manifestant·e·s.

Aux États-Unis, les forces de police de tout le pays ont commis des violations graves et généralisées des droits humains au cours de manifestations majoritairement pacifiques contre le racisme systémique et les violences policières, notamment les homicides de personnes noires.

Amnesty International a recueilli des informations sur 125 cas de violences policières perpétrées entre le 26 mai et le 5 juin 2020 contre des manifestant·e·s dans 40 États et dans le district de Columbia. Ces actes de recours excessif à la force ont été commis par des membres des services de police locaux et des États, ainsi que par des agents de la Garde nationale et du personnel de sécurité de plusieurs organes fédéraux. Parmi les atteintes recensées figurent notamment des coups, une utilisation abusive du gaz lacrymogène et du gaz poivre, et des tirs inappropriés, et parfois sans discernement, de projectiles à létalité réduite, tels que des balles en éponge et en caoutchouc.

Ces atteintes aux droits humains perpétrées par la police des États-Unis contre des manifestant·e·s pacifiques n’étaient ni nécessaires ni proportionnées pour parvenir à un objectif légitime de maintien de l’ordre, et sont particulièrement graves, car elles ont eu lieu pendant des manifestations dénonçant justement ce type de comportement de la part des forces de l’ordre. La plupart de ces manifestations étaient pacifiques, mais dans certains cas, une minorité de manifestant·e·s ont commis des actes illégaux, notamment des actes de violence. Dans ces cas, les forces de sécurité ont régulièrement eu recours à une force disproportionnée et aveugle contre l’ensemble de la manifestation, sans faire de distinction entre les manifestant·e·s pacifiques et les personnes commettant des actes illégaux, contrairement à ce que prévoit la loi. En plus de la gravité de ces atteintes, le plus frappant dans les événements qu’Amnesty International a recensés est l’étendue de leur champ géographique, qui illustre l’ampleur nationale du problème des violences policières.

Le gouvernement américain est tenu, au titre de la Constitution des États-Unis et du droit international relatif aux droits humains, de garantir le droit à la liberté de réunion pacifique. Les organes chargés de l’application des lois, au niveau fédéral, étatique et municipal, sont tenus de respecter, de protéger et de faciliter les rassemblements pacifiques. Ainsi, les autorités chargées de l’application des lois ne sont autorisées à utiliser la force pendant des rassemblements publics que lorsque cela est absolument nécessaire et de manière proportionnée pour parvenir à un objectif légitime de maintien de l’ordre. Les restrictions imposées à des réunions publiques, notamment le recours à la force contre les manifestant·e·s, ne doivent jamais établir de discrimination en fonction de l’appartenance ou de l’origine ethnique, de l’idéologie politique ou de tout autre critère social.

Le principal objectif des autorités chargées de l’application des lois dans le cadre du maintien de l’ordre pendant des manifestations doit toujours être de faciliter les rassemblements pacifiques. Si les responsables de l’application des lois se trouvent dans l’obligation de disperser une manifestation, par exemple si des personnes commettent de graves actes de violence, ils ne peuvent avoir recours à la force que s’il est peu probable que les méthodes non violentes fonctionnent. Dans le cadre de leur recours à la force, les responsables de l’application des lois doivent chercher à limiter les dégâts et les blessures, et cette force doit être proportionnée au degré de résistance des manifestant·e·s. Lorsque c’est le cas, les autorités doivent établir une distinction stricte entre manifestant·e·s et passant·e·s pacifiques et toute personne qui se livre à des violences.

Les actes de violence d’une personne ne justifient jamais le recours à la force contre des manifestant·e·s pacifiques de manière générale et la force n’est justifiée que pour la durée la plus courte possible. Les armes à létalité réduite, comme les grenades lacrymogènes ou le gaz poivre et les projectiles à impact cinétique comme les balles en éponge, en bois et en caoutchouc, ne doivent jamais être utilisées à bout portant et en direction de la tête, car elles peuvent causer de graves blessures, voire la mort.

Afin d’éviter l’impunité et la répétition de violences, les autorités américaines doivent enquêter sur le recours illégal à la force par la police et d’autres agents, poursuivre en justice les responsables, les sanctionner et accorder pleinement réparation aux victimes de ces violences. À ce jour, peu d’éléments semblent indiquer que ces obligations ont été prises au sérieux aux États-Unis.

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