Les jeunes militants Bayram Mammadov et Giyas Ibrahimov ont été arrêtés par la police à Bakou le 10 mai, pour des accusations liées aux stupéfiants. D’après les autorités azerbaïdjanaises, ils avaient environ huit grammes d’héroïne en leur possession lorsque la police les a interpellés. Bayram Mammadov et Giyas Ibrahimov ont affirmé à leur avocat que les policiers avaient caché la drogue sur eux. Le 12 mai, le juge du tribunal du district de Khatai, à Bakou, a approuvé leur détention provisoire.
Bayram Mammadov et Giyas Ibrahimov ont été arrêtés le 10 mai, après que Bayram a publié sur Facebook une photo de graffiti qu’ils avaient peints le 9 mai sur une statue d’Heydar Aliyev, ancien président défunt de l’Azerbaïdjan et père du président actuel, Ilham Aliyev. Le graffiti pour lequel ils ont été arrêtés disait « Bonne Fête de l’esclavage », un jeu de mots basé sur « Bonne Fête des fleurs », cette fête étant célébrée le 10 mai, jour de l’anniversaire de l’ancien président. Sur l’autre côté de la statue, les militants ont utilisé un langage obscène dans les graffiti, en guise de message de contestation politique.
Pendant leur interrogatoire par la police, Bayram Mammadov et Giyas Ibrahimov ont dû répondre à des questions au sujet des graffiti, mais pas au sujet des stupéfiants. Les policiers leur ont demandé à plusieurs reprises de s’excuser publiquement d’avoir insulté Heydar Aliyev et les ont frappés lorsqu’ils ont refusé. Ils les ont également forcés à nettoyer les toilettes du poste et les ont filmés pendant qu’ils le faisaient, dans le but de les humilier. Leur avocat a indiqué à Amnesty International que lorsqu’il a rencontré ses clients le 12 mai, il a vu les marques des coups qu’ils ont reçus. Les militants n’ont pas été examinés par un médecin indépendant et n’ont, à ce jour, pas été autorisés à contacter leurs proches. Leur avocat a déposé une plainte pour mauvais traitements auprès du bureau du procureur général de l’Azerbaïdjan.
L’avocat a également indiqué à Amnesty International que les témoins qui ont fourni leurs déclarations quant aux stupéfiants découverts n’étaient pas indépendants puisqu’ils travaillent pour la police azerbaïdjanaise. Amnesty International a recueilli des informations faisant état de pratiques similaires utilisées en Azerbaïdjan pour forger de toutes pièces des accusations dans d’autres affaires contre des militants et des défenseurs des droits humains.
Depuis longtemps, Amnesty International s’inquiète du fait que le gouvernement azerbaïdjanais ne respecte pas ses obligations internationales en matière de protection des droits aux libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique. Les personnes qui, dans le pays, expriment des opinions dissidentes sont fréquemment la cible d’accusations forgées de toutes pièces, d’agressions, de harcèlement, de chantage ou d’autres représailles de la part des autorités et des groupes qui leur sont liés. Les responsables de l’application des lois recourent régulièrement à la torture et à d’autres formes de mauvais traitements contre des militants de la société civile, en toute impunité.
En mars 2016, l’Azerbaïdjan a libéré plusieurs prisonniers d’opinion, notamment l’éminent avocat spécialiste des droits humains, Intigam Aliyev, le défenseur des droits humains, Rasul Jafarov, et le président de l’organisation locale de surveillance électorale, Anar Mammadli. Cependant, d’autres prisonniers d’opinion sont toujours derrière les barreaux et les représailles incessantes rendent le travail de défense des droits humains pratiquement impossible. La plupart des principales organisations non gouvernementales (ONG) travaillant sur les droits humains, la corruption et la surveillance électorale font l’objet de poursuites pénales et voient leurs comptes bancaires gelés et/ou leur enregistrement révoqué.
Il est de plus en plus difficile de surveiller de façon indépendante la situation des droits humains dans le pays. Plusieurs organisations internationales de défense des droits humains et médias internationaux se sont vu refuser l’entrée sur le territoire en 2015. C’est ce qui est arrivé le 7 octobre 2015 à la délégation d’Amnesty International, qui a dû repartir de l’aéroport international Heydar Aliyev de Bakou.