Anas al Beltagy a été arrêté une première fois, à l’âge de 20 ans, le 24 décembre 2013 lors d’une visite avec sa mère au centre pénitentiaire de Tora pour voir son père emprisonné, Mohamed al Beltagy. Selon les informations recueillies par Amnesty International, des membres des forces de sécurité les ont encerclés et battus avant de les conduire devant le parquet de Maadi, qui les a interrogés en indiquant qu’ils étaient accusés d’avoir agressé des gardiens de prison. Le parquet a ordonné leur remise en liberté sous caution après environ 20 heures de détention.
Le 31 décembre 2013, Anas al Beltagy a de nouveau été arrêté, alors qu’il se trouvait chez un ami dans le quartier de Nasr City, au Caire. Il a été amené au poste de police n° 1 de Nasr City, où des policiers ont refusé de reconnaître sa détention et l’ont soumis à une disparition forcée pendant presque un mois. Au cours de cette période, il a subi des actes de torture et d’autres mauvais traitements.
Amnesty International a appris par des sources bien renseignées que les forces de sécurité l’avaient détenu dans une petite cage en fer « inadaptée aux humains ». Après son transfert à la prison d’Abu Zaabal, à Alexandrie, au début de l’année 2014, l’administration pénitentiaire l’a maintenu en détention à l’isolement de façon prolongée et il a dû dormir à même le sol en béton. Il a ensuite été transféré au centre pénitentiaire de Tora, au sud du Caire, où il a encore été soumis à la torture et à d’autres mauvais traitements, y compris à une détention prolongée à l’isolement. Il a été transféré au complexe carcéral de Badr en novembre 2022.
Il est détenu dans des conditions cruelles et inhumaines, qui violent l’interdiction absolue de la torture et des autres formes de mauvais traitements. À la prison de Badr, où il a été incarcéré de novembre 2022 à juin 2023, il a été maintenu à l’isolement dans une cellule glaciale où des lumières vives restaient allumées en permanence, sans pouvoir faire d’exercice en plein air et privé de tout contact avec les autres détenus. Depuis son transfert à la prison du Dixième jour de ramadan le 8 juin 2023, il a également été placé à l’isolement. En juin 2024, les autorités ont transféré Anas al Beltagy dans une « cellule disciplinaire » pour une période de trois mois afin de le punir d’avoir protesté contre ses conditions de détention cruelles et inhumaines.
Les cellules disciplinaires des prisons égyptiennes sont des pièces très petites et mal aérées. Elles sont souvent dépourvues du moindre article de première nécessité pour le prisonnier, de lumière naturelle et de chauffage. Les personnes qui y sont détenues subissent des conditions très éprouvantes, notamment un accès limité à l’eau et à la nourriture, et parfois des restrictions drastiques sur le sommeil ou les mouvements. Dans ces cellules, les prisonniers sont empêchés d’interagir avec autrui et sont complètement isolés des activités quotidiennes de la prison.
En septembre 2024, Anas al Beltagy a été sorti de la « cellule disciplinaire » et replacé à l’isolement dans une cellule classique. Cela signifie qu’il demeure isolé des autres détenus pendant de longues périodes et qu’il est privé de communication avec toute personne et de participation à toute activité sociale.
L’administration pénitentiaire refuse toujours que sa famille lui apporte de la nourriture, des médicaments et des vêtements adaptés à la météo, alors même qu’il est notoire que les détenus manquent de nourriture, d’eau potable, d’articles de base pour l’hygiène personnelle, de vêtements adaptés et de matériel de couchage. Il n’est pas autorisé à faire de l’exercice ni à prendre l’air.
Au cours des audiences de renouvellement de sa détention provisoire, organisées à distance par vidéoconférence depuis 2022, lors desquelles il comparaît parfois les poignets menottés et les pieds entravés, il a signalé une détérioration de sa santé physique et mentale et de son état psychologique en raison de ses conditions de détention. De telles audiences ne sont pas conformes aux normes d’équité des procès, ont lieu dans un cadre coercitif en présence de gardiens de prison, et les détenus ne peuvent pas communiquer en privé avec leurs avocats. De plus, elles exposent les détenus à des risques de représailles de la part des gardiens s’ils se plaignent de torture ou d’autres mauvais traitements, et empêchent les juges de voir des ecchymoses ou autres blessures. Les avocats déplorent fréquemment des problèmes techniques durant les audiences en ligne, notamment de réseau, qui les empêchent de bien entendre leurs clients.
Les avocats d’Anas al Beltagy ont également signalé qu’ils ne l’avaient pas vu devant la caméra lors de certaines audiences consacrées au renouvellement de sa détention provisoire et n’avaient pas eu de confirmation qu’il était bien présent dans la salle. Selon eux, le juge présidant ces audiences a rejeté et n’a pas pris en compte ses plaintes répétées concernant les mauvais traitements qu’il a subis, ce qui a incité Anas al Beltagy à demander que ce type d’audiences se déroulent devant un autre juge.
La famille de Mohamed al Beltagy est depuis longtemps prise pour cible par les forces de sécurité, à tel point que plusieurs de ses membres ont fui l’Égypte. Les forces de sécurité ont tué Asma al Beltagy, la sœur d’Anas al Beltagy, alors âgée de 16 ans, au cours de la dispersion violente du sit-in de la place Rabaa al Adawiya, au Caire, le 14 août 2013, qui a fait quelque 900 morts. Aucun membre des forces de sécurité ou de l’armée n’a encore été amené à rendre des comptes pour le recours illégal à la force meurtrière, tandis que des milliers de membres et de sympathisant·e·s réels ou présumés des Frères musulmans ont été arrêtés.