Écrire Craintes pour la sécurité d’une prisonnière d’opinion menacée de mort

Tran Thi Nga, défenseure des droits humains, a récemment dit à son mari, lors d’un appel téléphonique qui a été écourté, qu’on l’avait violemment battue et qu’elle avait été menacée de mort par une codétenue. Selon le contenu d’un précédent appel avec sa famille, il semble que l’administration pénitentiaire ait orchestré ces attaques pour la punir. Détenue depuis plus de 18 mois, Tran Thi Nga est une prisonnière d’opinion et doit être libérée immédiatement et sans condition.

Trần Thị Nga (également connue par son surnom, « Thúy Nga ») a dit à son mari, lors d’une conversation de cinq minutes le 17 août 2018, qu’elle avait récemment été rouée de coups et menacée de mort par des codétenues. Trần Thị Nga, qui n’est autorisée à passer qu’un seul appel téléphonique par mois à ses proches, avait dit à sa famille en juillet qu’elle était incarcérée dans la même cellule qu’une prisonnière connue pour aider les gardiens à intimider et à frapper d’autres détenues. Son mari s’est dit très inquiet pour sa sécurité, car la communication a été brutalement interrompue alors qu’elle tentait de lui exposer sa situation en prison. Elle venait de lui dire : « On me bat souvent et on m’a récemment menacée de mort ».

Trần Thị Nga a été arrêtée et accusée de « propagande contre l’État » en janvier 2017, après avoir participé à des manifestations pacifiques à la suite de la catastrophe écologique provoquée par l’entreprise Formosa en 2016, qui a causé la mort de centaines de milliers de tonnes de poissons, privant d’emploi des milliers de personnes, et a suscité un vaste mouvement social dans le pays. Le 25 juillet 2017, le tribunal de Hà Nam, une province du nord du Viêt-Nam, a condamné Trần Thị Nga à neuf ans d’emprisonnement et cinq ans d’assignation à domicile.

En février 2018, Trần Thị Nga a été transférée dans la prison de Gia Trung, à 1 300 kilomètres de chez elle, ce qui fait qu’il est très difficile pour sa famille de lui rendre visite. Les autorités vietnamiennes ont pour habitude de transférer les prisonniers d’opinion dans une prison éloignée de leur domicile, à titre de punition supplémentaire. De plus, l’administration pénitentiaire a privé Trần Thị Nga à maintes reprises du droit de voir sa famille en raison de son « entêtement », terme faisant probablement référence au fait qu’elle n’a pas « avoué » les faits qui lui sont reprochés.

En plus de 18 mois de détention, Trần Thị Nga n’a jamais pu voir son mari et n’a été autorisée à voir ses enfants qu’à deux reprises. Incarcérée alors qu’elle n’a fait qu’exercer sans violence son droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique, cette femme est une prisonnière d’opinion.

Trần Thị Nga a commencé à militer pour les droits humains en luttant contre la traite des personnes, dont elle a elle-même été victime. Depuis lors, elle a mené des activités sur toute une série de thématiques. Au cours de ses années de militantisme, Trần Thị Nga a fait l’objet à plusieurs reprises de menaces et d’attaques, et a notamment été agressée par des policiers en civil. En mai 2014, elle a eu un bras et une jambe cassés lors d’une attaque commise par des policiers en civil.

En 2016, à la suite d’une catastrophe écologique due à des rejets industriels dans les eaux côtières du centre du Viêt-Nam, de vastes manifestations ont eu lieu dans tout le pays. Une usine taïwanaise a par la suite reconnu sa responsabilité. La catastrophe a tué des centaines de milliers de tonnes de poisson et privé d’emploi des millions de personnes. Dans tout le pays, la colère a été vive et, en 2017, la population de Hanoi et de Ho Chi Minh-Ville est descendue dans la rue pour dénoncer l’absence de réaction adaptée du gouvernement vietnamien. De nombreuses personnes ont été battues par la police et arrêtées pendant les manifestations. Au cours des mois qui ont suivi, les autorités ont appréhendé de nombreux militants. Une quarantaine de personnes ont été arrêtées en lien avec les manifestations et une dizaine de militants au moins ont fui le pays et demandent l’asile en Thaïlande.

En tant qu’État partie à la Convention des Nations unies contre la torture et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), le Viêt-Nam est tenu de protéger toute personne contre la torture et les autres mauvais traitements et de mener sans délai des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales sur les allégations faisant état de tels agissements. Les conditions de détention dans le pays sont connues pour être extrêmement dures ; les obligations minimales prévues par l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus (règles Nelson Mandela) et par d’autres normes internationales ne sont pas respectées, notamment en ce qui concerne la nourriture et les soins médicaux.

À titre de sanction supplémentaire, les prisonniers d’opinion au Viêt-Nam sont souvent placés à l’isolement pour de longues périodes, en violation flagrante de ces règles - d’anciens prisonniers ont dit que c’était comme « une prison dans la prison ». Pour en savoir plus, voir le rapport (en anglais) intitulé Prisons within Prisons : Torture and ill-treatment of prisoners of conscience in Viet Nam (ASA 41/4187/2016, https://www.amnesty.org/download/Documents/ASA4141872016ENGLISH.PDF).

Trần Thị Nga fait partie des 94 prisonniers d’opinion recensés au Viêt-Nam qui figurent sur la liste publiée par Amnesty International en avril 2018. Le Viêt-Nam est l’un des pays qui incarcèrent le plus de militants pacifiques en Asie du Sud-Est, où les conditions de détention dans les prisons sont très dures, en particulier pour les personnes privées de liberté pour des raisons politiques. Pour plus d’informations, voir le rapport (en anglais) intitulé Prisoners of conscience in Viet Nam (ASA 41/8162/2018, https://www.amnesty.org/en/documents/asa41/8162/2018/en/).

La torture et les autres mauvais traitements, y compris la détention au secret, l’isolement cellulaire prolongé, les passages à tabac et la privation délibérée de soins médicaux, sont strictement interdits par le droit international relatif aux droits humains, mais restent une pratique courante des autorités vietnamiennes.

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