Écrire Une défenseure des droits humains condamnée à dix ans de prison

Nguyễn Ngọc Như Quỳnh, également connue en tant que blogueuse sous le nom de Mẹ Nấm (Mère Champignon), a été condamnée à dix ans d’emprisonnement le 29 juin 2017 au titre de l’article 88 du Code pénal, pour « diffusion de propagande » contre l’État. Elle est actuellement détenue au secret, ce qui empêche ses avocats de finaliser son appel.

Nguyễn Ngọc Như Quỳnh est en détention provisoire depuis son arrestation le 10 octobre 2016, et n’a pas pu consulter un avocat avant le 20 juin 2017, neuf jours avant que son affaire ne soit examinée par le tribunal populaire de Khánh Hòa. Lors de son procès, Nguyễn Ngọc Như Quỳnh et son avocat n’ont pas pu présenter une défense complète contre ses chefs d’inculpation, et auraient été régulièrement coupés par le juge lorsqu’ils essayaient de s’exprimer.

Selon une traduction de son acte d’inculpation, Nguyễn Ngọc Như Quỳnh est poursuivie pour ses activités sur Facebook et d’autres réseaux sociaux, notamment pour avoir écrit, publié et partagé des articles et des vidéos qui critiquaient le parti communiste vietnamien au pouvoir et l’État ; pour avoir produit, édité et partagé un rapport intitulé Stop Police Killing Civilians, qui citait 31 personnes qui, selon ce rapport, étaient mortes alors qu’elles étaient en garde à vue ; pour avoir donné des interviews à des médias étrangers qui auraient « déformé » la situation au Viêt-Nam ; et pour possession d’un recueil de poésies et d’un CD jugés critiques envers le parti communiste du Viêt-Nam et l’État. Ces inculpations sont contraires au droit à la liberté d’expression garanti par le droit international relatif aux droits humains, que le Viêt-Nam est tenu de respecter. Amnesty International considère Nguyễn Ngọc Như Quỳnh comme une prisonnière d’opinion emprisonnée seulement en raison de ses activités pacifiques de promotion et de défense des droits humains.

À l’exception d’une visite de cinq minutes la veille de son procès, les autorités vietnamiennes ont empêché tout contact avec sa famille, qui ne sait pas où elle était détenue. Des colis de nourriture et de vêtements emmenés par la mère de Nguyễn Ngọc Như Quỳnh pendant sa détention provisoire n’ont pas été transmis, notamment une bible et un recueil de cantiques que Nguyễn Ngọc Như Quỳnh avait spécifiquement demandés par écrit. Sa mère a également été empêchée d’assister au procès, et a dû regarder une diffusion en direct dans une pièce adjacente. Depuis l’arrestation de Nguyễn Ngọc Như Quỳnh, sa mère s’occupe de ses deux jeunes enfants, avec le soutien de ses amis. La famille fait l’objet d’une surveillance quotidienne par les autorités et les enfants seraient repliés sur eux-mêmes, perturbés par l’absence de leur mère.

Nguyễn Ngọc Như Quỳnh est la cofondatrice du Réseau des blogueurs vietnamiens, un réseau indépendant fondé en décembre 2013. Mère célibataire de deux enfants, âgés de dix et quatre ans, elle a été harcelée, arrêtée et interrogée à maintes reprises en raison de ses activités pacifiques et a été empêchée de se rendre à l’étranger. Blogueuse de renom, elle milite en faveur des droits humains et contre l’injustice depuis plus de 10 ans. Elle a notamment fait campagne sur la transparence des autorités, l’obligation qui incombe à l’État de rendre des comptes pour les violations des droits humains, la protection de l’environnement et la promotion des droits proclamés par la Déclaration universelle des droits de l’homme.

En 2015, Civil Rights Defenders a désigné Nguyễn Ngọc Như Quỳnh comme Défenseure des droits civils de l’année. En 2017, elle a été honorée en son absence par le Département d’État américain, qui lui a décerné l’un de ses 13 prix internationaux « Women of Courage » (Femmes de courage).

Des représentants diplomatiques au Viêt-Nam, notamment ceux de l’Union européenne et des États-Unis, ont publié des déclarations condamnant la déclaration de culpabilité et la condamnation de Nguyễn Ngọc Như Quỳnh et demandant sa libération immédiate. Sa détention avait déjà été critiquée par le haut-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies et par le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire.

Le Viêt-Nam est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui, entre autres, garantit le droit aux libertés d’expression, d’association et de réunion. Pourtant, ce droit fait l’objet d’une forte restriction arbitraire en droit et en pratique dans ce pays. Des dispositions du Code pénal de 1999 portant sur la sécurité nationale et formulées en termes vagues sont fréquemment utilisées pour ériger en infraction des opinions ou activités pacifiques dissidentes. Les personnes qui prônent un changement politique pacifique, critiquent les politiques gouvernementales ou appellent au respect des droits humains sont souvent prises pour cible. L’article 88 (diffusion de propagande contre la République socialiste du Viêt-Nam), est souvent employé pour arrêter, poursuivre et emprisonner des dissidents en raison de leur militantisme pacifique, notamment des blogueurs, des militants luttant pour les droits du travail, les droits fonciers ou la justice sociale, des militants politiques, des adeptes de certaines religions, des défenseurs des droits humains, et même certains paroliers.

Au Viêt-Nam, les conditions de détention sont très dures ; la nourriture et les soins médicaux sont insuffisants et ne respectent pas les obligations minimales prévues par l’Ensemble de règles minima des Nations unies pour le traitement des détenus (règles Mandela) et par d’autres normes internationales. Des prisonniers d’opinion ont été maintenus en détention à l’isolement pendant des périodes prolongées afin de les sanctionner, ce qui s’apparente à de la torture ou d’autres mauvais traitements au titre des règles Mandela. Ils sont également victimes d’autres formes de torture et de mauvais traitements, et sont notamment frappés par des gardiens de prison, ainsi que par des codétenus sans que les gardiens n’interviennent. Nguyễn Ngọc Như Quỳnh a notamment indiqué à son avocat qu’on lui a interdit de porter des sous-vêtements et d’utiliser des serviettes hygiéniques en détention provisoire. Certains prisonniers d’opinion sont fréquemment transférés d’un centre de détention à un autre, bien souvent sans que leurs familles n’en soient informées.

Plusieurs prisonniers d’opinion, dont Nguyễn Ngọc Như Quỳnh, ont entamé des grèves de la faim pour protester contre les mauvais traitements dont ils ont été victimes et contre les mauvaises conditions de détention. Bien que le Viêt-Nam ait ratifié la Convention des Nations unies contre la torture, qui est entrée en vigueur dans le pays en février 2015, celui-ci n’a pas pris de mesures suffisantes pour se mettre en conformité avec ses dispositions. Pour plus d’informations, voir le rapport intitulé Des prisons à l’intérieur des prisons : la torture et les mauvais traitements des prisonniers d’opinion au Viêt-Nam (https://www.amnesty.org/fr/documents/asa41/4187/2016/fr/) publié en juillet 2016.

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