Écrire Demandez au Gouverneur de ne pas opposer son veto à la proposition de loi sur l’abolition

Une proposition de loi visant à abolir la peine de mort dans l’État américain du New Hampshire, adoptée par son corps législatif, doit être soumise au gouverneur. Il a déclaré qu’il y opposerait son veto. Il devrait ratifier ce texte ou permettre qu’il devienne une loi, et faire du New Hampshire le 20eÉtat abolitionniste des États-Unis.

Le 26 avril, la Chambre des représentants du New Hampshire a adopté à 223 voix contre 116 la proposition de loi n° 593 du Sénat, visant à abolir la peine de mort dans le New Hampshire. Le Sénat avait adopté ce texte à 14 voix contre 10 le 15 mars. Ce texte va être prochainement soumis à Chris Sununu, mais on ignore quand exactement. Il va soit le ratifier, soit permettre qu’il devienne une loi en ne le contrant pas, soit y opposer son veto. Dans une déclaration en date du 28 février, il a indiqué : « Je me tiens aux côtés des victimes de crimes, des membres des services d’application des lois et des promoteurs de la justice qui s’opposent à la suppression de la peine de mort. L’un des objectifs prioritaires de mon gouvernement a été de renforcer la législation en faveur des victimes de crimes et de leurs proches. La suppression de la peine de mort nous conduirait dans la direction diamétralement opposée, et j’opposerai mon véto à ce texte s’il arrive sur mon bureau. Il ne fait aucun doute que les crimes les plus haineux justifient la peine de mort. » Il a réitéré sa menace de veto depuis le vote de la Chambre des représentants.

Comme le laisse entendre le gouverneur Chris Sununu, il y a des membres des services d’application des lois, des victimes de crimes et des « promoteurs de la justice » qui soutiennent la peine de mort. Mais cette déclaration ne rend pas compte du fait que la situation est très hétérogène. De nombreux membres des services d’application des lois s’opposent à la peine de mort, tout comme de nombreux proches de victimes. En ce qui concerne la justice, ainsi que l’ont souligné en 2007 quatre juges de la Cour suprême, « des millions d’Américains s’opposent à la peine de mort. On trouve dans quasiment toutes les communautés qui composent notre pays des citoyens qui croient fermement que la peine de mort est injuste ».

Amnesty International est opposée à la peine de mort en toutes circonstances. Il s’agit d’une violation du droit à la vie, et de la peine la plus cruelle, inhumaine et dégradante qui soit. Ce châtiment consomme des ressources qu’il vaudrait mieux affecter à la compréhension et à la prévention des crimes violents, et à l’aide à apporter à ceux qui en subissent les effets. L’application d’une sentence capitale pérennise toute injustice, la rendant irrévocable, qu’il s’agisse de l’exécution de personnes condamnées à tort ou de personnes dont la condamnation a été entachée de discrimination ou d’une autre injustice. Le système d’application de la peine capitale aux États-Unis est marqué par l’arbitraire, la discrimination et des erreurs, comme l’ont noté au fil du temps de nombreux juges de la Cour suprême.

Actuellement, 142 pays sont abolitionnistes en droit ou dans la pratique, et plus de 90 d’entre eux ont aboli la peine de mort dans leur législation pour tous les crimes ou pour les crimes de droit commun depuis 1976, année où la Cour suprême a autorisé la reprise des exécutions aux États-Unis. L’abolition de la peine de mort dans le New Hampshire ne représenterait pas un pas « dans la mauvaise direction », mais permettrait à cet État de rejoindre la dynamique d’abandon de ce châtiment pays après pays. Les États-Unis ont montré des signes indiquant qu’ils rejoignent cette tendance mondiale, avec une diminution du nombre de condamnations à mort et d’exécutions et avec l’abolition de la peine de mort dans six États depuis 2007, ce qui crée un climat politique favorable pour les dirigeants politiques qui veulent débarrasser leur État de ce châtiment. Le New Hampshire n’a procédé à aucune exécution depuis près de 80 ans. Il est temps d’y supprimer la peine de mort en droit.

Les autorités ont procédé à 24 exécutions dans le New Hampshire depuis 1739, la dernière exécution en date remontant au 14 juillet 1939. En 1972, la Cour suprême a déclaré la peine de mort inconstitutionnelle, en raison de la façon arbitraire dont elle était prononcée. Elle a approuvé un nouveau cadre législatif relatif à la peine capitale en 1976, autorisant la reprise des exécutions aux États-Unis en vertu de nouvelles dispositions censées éliminer l’arbitraire. Le New Hampshire a rétabli la peine de mort en 1991.

Au cours des 40 dernières années, on a constaté que le système d’application de la peine de mort aux États-Unis était marqué par l’arbitraire et par des erreurs. Depuis 1973, plus de 160 erreurs judiciaires dans des affaires de crimes passibles de la peine capitale ont été découvertes. Plusieurs condamnés ont été exécutés alors que de graves doutes subsistaient quant à leur culpabilité. La peine de mort est censée être réservée aux « pires » des crimes et des criminels. En réalité, comme l’a souligné en 1994 un célèbre juge de la Cour suprême : « Il est impossible de répondre par l’affirmative à la question fondamentale consistant à se demander si ce système permet de savoir avec exactitude et systématiquement quels prévenus « méritent » de mourir. » En 2015, deux juges ont exprimé leur désaccord, estimant que « chaque meurtre est tragique [...] la peine capitale n’est constitutionnelle que dans la mesure où l’on restreint son application au pire du pire. Et [le] vaste ensemble d’éléments disponibles tend à montrer qu’elle n’est pas si restreinte que cela. » Ils ont également attiré l’attention sur le coût financier de la peine de mort, indiquant que si « la peine de mort coûte 137 millions de dollars par an ; un système comparable de réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle coûterait 11,5 millions de dollars par an », et qu’en Floride, le « coût de chaque exécution dépasse de 23 millions de dollars le coût d’un emprisonnement sans possibilité de libération conditionnelle ».

En 2008, le doyen de la Cour suprême a écrit : « [l]es décisions actuelles des organes législatifs des États […] de maintenir la peine de mort dans notre législation résultent d’une habitude et d’une inattention plutôt que d’un processus de délibération satisfaisant mettant en balance le coût et les risques liés à l’application de la peine de mort d’une part et d’autre part ses bénéfices identifiables ». Le juge John Paul Stevens a, entre autres, souligné que « malgré les 30 années de recherches empiriques menées dans ce domaine, on ne dispose d’aucun élément statistique fiable prouvant que la peine capitale a effectivement un effet dissuasif sur les éventuels délinquants ». Depuis, les organes législatifs du Nouveau Mexique (en 2009), de l’Illinois (en 2011), du Connecticut (en 2012) et du Maryland (en 2013) ont adopté des propositions de loi abolissant la peine capitale, que les gouverneurs ont ratifiées et qui sont ainsi devenues de lois. Aujourd’hui, 19 États américains ainsi que le District de Columbia sont abolitionnistes. Quatre autres États – l’État de Washington, le Colorado, l’Oregon et la Pennsylvanie – respectent actuellement un moratoire sur les exécutions en raison des inquiétudes des autorités au sujet du système d’application de la peine capitale.

À la suite de l’adoption par le New Jersey, fin 2007, d’une loi abolissant la peine de mort, le chef de la police de West Orange, dans le New Jersey, a écrit qu’alors qu’il avait longtemps soutenu la peine capitale, il en était depuis arrivé à la conclusion que l’abolition de ce châtiment relevait « du pur bon sens ». Il a écrit : « [L]a peine de mort nous fait jeter par la fenêtre des millions de dollars – de l’argent que je pourrais directement utiliser pour combattre la criminalité au quotidien – et infligé aux proches des victimes un processus long et très pénible qui ne fait qu’aggraver leurs souffrances [...] le processus judiciaire condamne les proches des victimes à une période de vide juridique d’une durée indéterminée, et elles attendent, attendent et attendent encore le jour où ce châtiment sera appliqué. Pour la plupart d’entre eux, cela n’arrivera jamais. La peine de mort était censée aider des familles comme celles-là [...] En tant que chef de la police, je trouve scandaleuse cette utilisation des fonds publics. La peine de mort est censée m’aider à lutter contre la criminalité. Je réponds : donnez aux professionnels de l’application des lois comme moi 250 millions de dollars, et je vous montrerai comment il faut faire pour faire baisser la criminalité. La peine de mort ne figure certainement pas sur ma liste. »
Actuellement, New Hampshire compte un prisonnier condamné à mort. Michael Addison a été condamné à la peine capitale en 2008 pour le meurtre d’un policier, Michael Briggs, en 2006. En raison du faible nombre de poursuites engagées pour des infractions passibles de la peine de mort dans le New Hampshire au fil des ans, il est difficile de quantifier les éventuelles économies qu’entraînerait la suppression de ce châtiment. Toutefois, d’après les informations dont nous disposons au sujet du projet de loi n° 593 du Sénat, « les poursuites engagées dans l’affaire Addison ont coûté 2,5 millions. L’affaire Addison va se poursuivre pendant plusieurs années encore, ce qui va alourdir ce coût ».

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