Écrire Deux hommes condamnés à la pendaison

James Gatdet et William Endley, qui avaient tous les deux été détenus arbitrairement au siège du Service national de la sûreté (NSS), à Djouba, ont été déclarés coupables et condamnés à mort par une haute cour siégeant dans cette ville le 12 et le 23 février, respectivement. Ils ont interjeté appel de leurs peines.

James Gatdet, un ressortissant sud-soudanais, a été condamné à la pendaison le 12 février, après avoir été déclaré coupable de « trahison » en vertu de l’article 64 du Code pénal sud-soudanais de 2008, ce sans la présence d’un avocat. Il a aussi été condamné à 20 ans de réclusion pour « incitation à la violence » (article 52) et à un an d’emprisonnement pour « atteinte à l’autorité du président ou outrage à sa personne » (article 76).

James Gatdet, ancien porte-parole du chef du Mouvement populaire de libération du Soudan-Opposition (MPLS-O), Riek Machar, a été renvoyé illégalement au Soudan du Sud par le Kenya le 3 novembre 2016. Il a passé plus de sept mois à l’isolement à la prison du NSS, privé de lumière naturelle, d’activité physique et presque totalement d’interaction avec d’autres personnes, avant d’être transféré dans une cellule classique. Il a été inculpé le 23 août 2017. Cependant, même après son inculpation, il n’a pas été autorisé à recevoir de visites de son avocat ni de sa famille.

William Endley, un ancien conseiller sud-africain de Riek Machar, a été déclaré coupable le 23 février et condamné à la pendaison en vertu de l’article 57 de la Loi de 2014 relative au Service national de la sûreté, qui concerne l’espionnage, le terrorisme et les tentatives de renversement d’un gouvernement établi dans le respect de la Constitution. Il a aussi été condamné, en vertu du Code pénal sud-soudanais de 2008, à sept ans d’emprisonnement pour « insurrection, banditisme, sabotage ou terrorisme » (article 67) et à quatre ans pour « recrutement ou entraînement d’insurgés, de bandits, de saboteurs ou de terroristes » (article 68), ainsi qu’à deux ans pour « entrée illégale au Soudan du Sud » en vertu de l’article 38-2 de la Loi de 2011 relative aux passeports et à l’immigration. Il a été arrêté le 18 août 2016 à Djouba et détenu par le NSS. Il disposait d’une représentation juridique au moment de sa condamnation. Néanmoins, il a comparu sans avocat à deux audiences car son conseil de l’époque s’était retiré de l’affaire.

James Gatdet et William Endley ont interjeté appel de leurs peines. Amnesty International craint fortement que la justice sud-soudanaise continue de prononcer des condamnations à mort, notamment à la lumière d’informations crédibles selon lesquelles la procédure judiciaire dont ces deux hommes ont fait l’objet n’était probablement pas conforme aux normes internationales d’équité des procès.

Le 23 août 2017, James Gatdet a été inculpé, en vertu du Code pénal de 2008, d’« incitation à la violence » (article 52), de « trahison » (article 64), de « publication ou communication de déclarations fallacieuses portant préjudice au Soudan du Sud » (article 75) et d’« atteinte à l’autorité du président ou outrage à sa personne » (article 76). Il a été détenu sans inculpation pendant près d’un an.

La charge d’« incitation à la violence » qui pesait sur James Gatdet était liée à une déclaration qu’il avait publiée sur sa page Facebook le 8 juillet 2016, dans laquelle il accusait le président Kiir d’avoir tenté de faire arrêter l’ancien vice-président Riek Machar au palais présidentiel J1. Aux dires des enquêteurs, les gardes du corps de Riek Machar ont lancé en représailles une attaque au même endroit. Toutefois, selon les informations recueillies par Amnesty International, le plaignant n’avait pas la permission de James Gatdet ni une quelconque autorisation pour accéder au compte Facebook personnel de ce dernier et à la déclaration, qui aurait été supprimée le 13 juillet 2016.

Depuis le début du conflit armé au Soudan du Sud, en décembre 2013, les arrestations arbitraires, les détentions prolongées et les disparitions forcées de personnes considérées comme des opposants au régime se sont multipliées ; elles sont orchestrées par le Service national de la sûreté (NSS) et la Direction du renseignement militaire. Amnesty International a recueilli des informations sur de nombreux cas de détention arbitraire par le NSS dans divers centres, où les détenus sont souvent victimes d’actes de torture ou d’autres mauvais traitements.

Le 21 décembre 2017, le gouvernement sud-soudanais et les autres parties au conflit ont signé un accord de cessation des hostilités, qui est entré en vigueur 72 heures plus tard, le 24. L’article 9 de cet accord appelle les parties à remettre au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) « toute personne privée de liberté pour des raisons liées au conflit, tout prisonnier de guerre, tout prisonnier politique et tous les enfants et les femmes enlevés ». Les parties étaient tenues de fournir au CICR, dans les 72 heures suivant l’accord, la liste complète des prisonniers de guerre et des prisonniers politiques, qui devaient être libérés dans les 14 jours. Cependant, ces dispositions n’ont pas été appliquées.

Le Soudan du Sud est considéré comme un pays non abolitionniste, dans la mesure où il maintient la peine de mort pour des crimes de droit commun et n’a pas pris d’engagement ni mis en œuvre de politique visant à cesser les exécutions. Amnesty International continue d’enregistrer des exécutions depuis que le pays a obtenu son indépendance vis-à-vis du Soudan, le 9 juillet 2011. Dans son rapport de 2012, le rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a souligné qu’il était « injuste d’imposer la peine capitale lorsque la procédure judiciaire n’est pas conforme aux normes les plus strictes en matière d’équité des procès ».

Amnesty International s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances, sans exception, quelles que soient la nature ou les circonstances du crime commis, la culpabilité ou l’innocence ou toute autre situation du condamné, ou la méthode utilisée pour procéder à l’exécution. À ce jour, 106 pays ont aboli la peine de mort pour tous les crimes et plus des deux-tiers des pays du monde l’ont abolie en droit ou dans la pratique.

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