Écrire Deux journalistes encourent jusqu’à 14 ans de prison

Deux journalistes encourent jusqu’à 14 ans de prison en lien avec leurs activités professionnelles pacifiques. Les deux hommes doivent être libérés immédiatement et sans condition, et les charges retenues contre eux doivent être abandonnées.

Le 10 janvier, un tribunal de Yangon, la capitale du Myanmar, a officiellement inculpé Wa Lone et Kyaw Soe Oo, deux journalistes de Reuters, d’avoir enfreint la Loi relative aux secrets d’État. Cette loi datant de l’ère coloniale prévoit jusqu’à 14 ans d’emprisonnement pour toute personne qui obtient, enregistre ou communique des documents ou des informations dans un but « préjudiciable à la sûreté ou aux intérêts de l’État ».

Les deux journalistes enquêtaient sur la répression brutale menée par l’armée dans l’État d’Arakan contre la minorité des Rohingyas. Ils ont été arrêtés le 12 décembre 2017 après avoir été invités à rencontrer des policiers pour dîner dans le nord de Yangon. Ces policiers, qu’ils affirment n’avoir jamais rencontrés auparavant, leur ont remis des documents et ils ont été arrêtés tout de suite après. Selon la police nationale du Myanmar, ils ont été interpellés pour « possession de documents gouvernementaux importants et secrets concernant l’État d’Arakan et les forces de sécurité (dans l’intention) de les communiquer à une agence de presse étrangère ». D’après les médias officiels, deux policiers du Myanmar ont également été arrêtés dans le cadre de cette affaire, mais Amnesty International n’a pas réussi à obtenir d’autres informations sur les deux hommes.

Après leur arrestation, Wa Lone et Kyaw Soe Oo ont été détenus au secret pendant deux semaines, période durant laquelle ils n’ont pas pu consulter d’avocat, communiquer avec leur famille ni avec le monde extérieur. La prochaine audience de leur procès doit avoir lieu le 23 janvier. Les deux hommes sont maintenus en détention à la prison d’Insein à Yangon.
Il semble que l’arrestation de Wa Lone et Kyaw Soe Oo soit destinée à les empêcher, ainsi que d’autres journalistes, d’enquêter de manière indépendante sur la situation dans l’État d’Arakan.

Cette affaire constitue une attaque flagrante contre la liberté d’expression au Myanmar, qui compromettra la possibilité pour tous les journalistes d’effectuer leur travail pacifique sans craindre de représailles.

L’espace pour une presse libre au Myanmar se rétrécit de manière inquiétante, les journalistes et les professionnels des médias se heurtant à des restrictions liées à leur travail. Les activités des médias indépendants sont de plus en plus compromises et ceux qui travaillent sur des sujets sensibles – en particulier la situation de la minorité des Rohingyas – peuvent être en butte à des manœuvres d’intimidation et de harcèlement, et sont parfois arrêtés, détenus, poursuivis ou incarcérés.

Le droit à la liberté d’expression est garanti par l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) et implique le droit « de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit ». Au titre du droit international relatif aux droits humains, ce droit ne peut être restreint que dans des circonstances très précises, et de telles restrictions doivent être fixées par la loi, imposées seulement pour réaliser un objectif légitime explicitement précisé dans le droit international relatif aux droits humains, et doivent être nécessaires et proportionnées pour atteindre leur objectif. Si les États peuvent, sous ces conditions, restreindre le droit à la liberté d’expression pour préserver la sécurité nationale, la Loi de 1923 relative aux secrets d’État est extrêmement générale et formulée en termes vagues, et va au-delà de ce qui est fixé par le droit international. En outre, cette loi ne contient aucune disposition autorisant à divulguer des informations classées secrètes pour des motifs d’intérêt général.

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