Écrire Deux prisonniers d’opinion et sept autres hommes en détention

Deux hommes sont détenus arbitrairement à Dapaong, dans le nord du Togo, parce qu’ils ont remis en cause la commémoration de l’Indépendance du pays et ont réclamé justice pour les personnes tuées lors des manifestations de Mango en novembre 2015. Ce sont des prisonniers d’opinion. Sept autres hommes sont détenus à la suite de deux manifestations organisées dans la même ville.

Adamou Moussa et Zékeria Namoro ont été arrêtés le 1er avril après avoir remis en cause la commémoration de l’Indépendance du Togo et réclamé justice pour les personnes tuées, maltraitées ou détenues arbitrairement à la suite de manifestations contre un projet de réserve naturelle qui se sont déroulées à Mango en novembre 2015. Ces deux hommes ont été détenus une journée à la gendarmerie de Mango avant d’être transférés à la Brigade de recherche de la gendarmerie, à Dapaong.

Pendant le transfert, les gendarmes les ont insultés et leur ont demandé pourquoi ils s’opposaient aux décisions de l’État. Au moment de l’interrogatoire, les gendarmes ont accusé Zékeria Namoro d’avoir fourni des informations sur la situation des droits humains à Mango à des journalistes, des groupes de la diaspora et des organisations de défense des droits humains. Adamou Moussa et Zékeria Namoro, inculpés d’« incitation à commettre une infraction », sont à la prison de Dapaong. Ils encourent cinq ans d’emprisonnement et une amende de 20 millions de francs CFA (environ 30 500 euros). Ils n’ont pas pu consulter d’avocat.

Leur arrestation a déclenché des manifestations spontanées à Mango, auxquelles les forces de sécurité ont réagi avec violence en utilisant du gaz lacrymogène et des matraques. Selon des sources médicales, 13 civils et trois membres des forces de sécurité ont été blessés. Issa Issaka et Baba Awali ont été arrêtés le 1er avril à la suite des manifestations, bien qu’ils nient y avoir participé. Issa Issaka a été interpellé alors qu’il quittait la ville ; il a été frappé à coups de ceinturon et contraint à regarder en direction du soleil pendant 15 minutes avant d’être emmené à la gendarmerie de Mango. Baba Awali, quant à lui, se rendait à la mosquée et il a été roué de coups de matraque sur le chemin du poste de police de la ville. Ces deux hommes ont été inculpés de « troubles à l’ordre public », notamment pour avoir participé à un rassemblement sans accomplir les formalités requises.

Lors des manifestations de novembre 2015, Ousmane Naba, Mama Kakarafou, Rabiou Souleymane, Ablaye Cheregneme et Alimiyaou Abdou ont été arrêtés et soumis à des actes de torture et à d’autres mauvais traitements. Ils sont encore en détention.

Adamou Moussa a été arrêté lors d’une réunion à la préfecture de Mango et Zékeria Namoro a été interpellé par trois gendarmes alors qu’il se rendait à son école, à Mango.

En novembre 2015, les forces de sécurité ont tué sept personnes et en ont blessé au moins 117, dont des femmes enceintes et des enfants, lors de manifestations contre la création d’une réserve naturelle dans la région. Un homme a été tué le 26 novembre 2015 lors d’échauffourées violentes avec des manifestants après que les forces de sécurité ont ouvert le feu.
En avril 2016, cinq hommes étaient toujours en détention prolongée à la suite de ces manifestations : Ousmane Naba, Mama Kakarafou, Rabiou Souleymane et Ablaye Cheregneme, qui ont organisé les rassemblements mais affirment ne pas avoir prôné la violence, et Alimiyaou Abdou, qui a indiqué à Amnesty International qu’il n’y avait pas pris part. Ils avaient été arrêtés en novembre 2015.

Ils ont été inculpés d’avoir participé à des rassemblements sans accomplir les formalités requises, commis des actes de violence à l’occasion de ces rassemblements et endommagé des biens publics et privés. Ils ont subi des actes de torture et d’autres mauvais traitements – ils ont notamment reçu des coups de ceinturon, de matraque et de crosse, et ont eu les mains menottées dans le dos pendant plus de 10 heures – au moment de leur arrestation et de leur transfert vers différents centres de détention. En outre, il leur a été demandé de signer des déclarations qu’ils ne comprenaient pas.
Lorsque des représentants d’Amnesty International leur ont rendu visite en décembre 2015, Alimiyaou Abdou présentait encore des plaies ouvertes au dos, aux jambes et aux bras qui témoignaient des actes de torture et des autres mauvais traitements dont il avait été victime.

En novembre 2015, l’Assemblée nationale a adopté un nouveau Code pénal. Ce Code contient plusieurs éléments positifs dans le domaine des droits humains, dont la criminalisation de la torture conformément aux normes internationales, mais certaines dispositions portent atteinte aux droits aux libertés d’expression et de réunion pacifique. La diffamation et la publication de fausses informations constituent également des infractions pénales, passibles de peines d’emprisonnement.

En outre, le Code restreint le droit à la liberté de réunion en incriminant l’organisation de rassemblements pour lesquels les formalités requises n’ont pas été accomplies et la participation à ces rassemblements, quelle qu’en soit l’ampleur. Les peines encourues vont d’une amende de 50 millions de francs CFA (environ 76 200 euros) à cinq ans d’emprisonnement en cas de violence. Les organisateurs et les manifestants pacifiques sont considérés comme responsables du comportement violent ou pénalement répréhensible d’autres manifestants, ainsi que des éventuels dommages corporels ou matériels.

L’Indépendance du Togo est célébrée le 27 avril. Le pays a cessé d’être une colonie française en 1960.

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