Écrire Des étudiants darfouriens portés disparus

Huit étudiants de l’université du Saint Coran, à Omdourman (Soudan), ont été arrêtés par le Service national de la sûreté et du renseignement le 14 novembre. On ignore toujours où ils se trouvent et on craint qu’ils ne subissent des actes de torture ou d’autres mauvais traitements.

Huit étudiants de l’université du Saint Coran, dont quatre membres du comité exécutif de l’Association des étudiants du Darfour, ont été arrêtés par le Service national de la sûreté et du renseignement le 14 novembre à Omdourman (Soudan). Les membres concernés sont les suivants : Naser Aldeen Mukhtar Mohamed Abdalla, étudiant de deuxième année, président ; Ahmed Abdel Lateef Al Syadi, étudiant de quatrième année, président adjoint ; Mosaab Osman Al Amodi, étudiant de deuxième année, membre, et Abdel Hakeem Abdalla Mahmoud Ishaq, étudiant de quatrième année, membre. Les quatre autres étudiants sont Mohamed Ali, Zyriab Mohamed, Al Tyeb Ibrahim et Nabeil Suliman.

Les huit jeunes gens cités ont participé, avec d’autres étudiants darfouriens, à un sit-in pacifique organisé à l’université du Saint Coran les 25 et 26 octobre afin de protester contre la décision de suspendre une mesure en vertu de laquelle les étudiants darfouriens étaient exemptés de frais de scolarité. Des policiers et des agents du Service national de la sûreté et du renseignement, accompagnés d’étudiants soutenant le Congrès national, parti actuellement au pouvoir, ont dispersé la foule. Ils ont utilisé du gaz lacrymogène et des matraques, blessant plusieurs manifestants.

Parmi les personnes rassemblées pour le sit-in, plusieurs ont déjà été interpellées. Ainsi, le 26 octobre, neuf étudiants ont été arrêtés par la police et inculpés de participation à une « émeute », de « trouble à l’ordre public » et de « nuisances publiques » en vertu des articles 68, 69 et 77 du Code pénal de 1991. Ils ont été libérés sous caution après trois jours de détention. Le procès des étudiants darfouriens s’est ouvert le 1er novembre devant le tribunal pénal d’Omdourman-Nord. S’ils sont déclarés coupables, ils encourent des peines d’emprisonnement et de flagellation.

On ignore où ils se trouvent depuis qu’ils ont été emmenés par des agents du Service national de la sûreté et du renseignement le 14 novembre. Ils risquent de subir des actes de torture ou d’autres mauvais traitements.

Amnesty International a recueilli de nombreuses informations indiquant que le Service national de la sûreté et du renseignement et la police avaient intensifié la répression des activités des étudiants darfouriens. Le Service national de la sûreté et du renseignement détient toujours des pouvoirs étendus en matière d’arrestation et de détention en vertu de la Loi de 2010 relative à la sécurité nationale, qui lui permet de maintenir des suspects en détention jusqu’à quatre mois et demi sans contrôle judiciaire. Ses agents usent de leur pouvoir pour arrêter et placer en détention des personnes de façon arbitraire, et pour leur faire subir des actes de torture et autres mauvais traitements. La même loi protège les agents du Service national de la sûreté et du renseignement de toute poursuite pour les actes commis dans l’exercice de leurs fonctions, d’où une culture généralisée de l’impunité. Les modifications de la Constitution adoptées par le Parlement le 5 janvier dernier aggravent davantage la situation car ils accordent encore plus de pouvoirs au Service national de la sûreté et du renseignement, qui peut désormais s’immiscer comme bon lui semble dans les affaires politiques, économiques et sociales.

Un décret présidentiel de 2006, qui se fonde sur l’Accord de paix sur le Darfour, insiste sur le fait que les nouveaux étudiants originaires du Darfour sont exemptés de frais de scolarité à tous les niveaux. De même, l’article 14 du Document de Doha pour la paix au Darfour (2011) dispose : « Tous les étudiants qui sont des descendants de personnes déplacées et de réfugiés des États du Darfour et ont été dûment admis dans les universités par les comités d’admission seront exemptés des frais de scolarité pendant cinq ans. »

Malgré ces dispositions, presque toutes les universités soudanaises sont, chaque année, le théâtre d’une crise concernant les étudiants darfouriens et le paiement de leurs frais de scolarité. Elles prononcent des exclusions contre des étudiants darfouriens, leur interdisent de passer les examens ou refusent de leur délivrer leurs diplômes s’ils n’ont pas réglé les frais de scolarité. L’Association des étudiants du Darfour proteste contre cet état de fait en organisant des sit-in pacifiques, des piquets de grève et des manifestations publiques. Ces actions pacifiques sont souvent réprimées brutalement par le Service national de la sûreté et du renseignement et la police, en étroite coordination avec les partisans du régime qui se trouvent au sein des universités. Le gouvernement se sert alors illégalement de ses sympathisants et des forces de sécurité pour contrôler les étudiants et s’en prendre à eux, ce qui constitue une violation manifeste des droits de ces derniers aux libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique. Depuis quelques années, les étudiants sont victimes d’arrestations arbitraires, de torture et de harcèlement.

Le 12 novembre, la direction de l’université du Saint Coran et le ministère de l’Intérieur ont émis des déclarations dans lesquelles ils accusaient des étudiants darfouriens d’avoir déclenché l’incendie qui avait détruit de nombreux bureaux dans les bâtiments administratifs le 11 novembre. L’Association des étudiants du Darfour a nié toute implication dans une déclaration datant du 15 novembre. Par ailleurs, elle accuse les pouvoirs publics de viser systématiquement des étudiants darfouriens afin de les empêcher d’exercer leur droit légitime à l’éducation.

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