Des agents du ministère du Renseignement ont soumis Ali Younesi et Amirhossein Moradi à des actes de torture et d’autres mauvais traitements, leur infligeant de graves souffrances et douleurs dans le but de leur extorquer des « aveux ». Ils ont été détenus dans des pièces séparées de la section 209 de la prison d’Evin pendant 808 jours après leur arrestation le 10 avril 2020. Ils ont passé les 60 premiers jours de leur détention à l’isolement, dans de petites pièces sans fenêtre éclairées de lumières vives 24 heures sur 24, ce qui leur a fait perdre toute notion du jour et de la nuit et les a plongés dans la détresse et la douleur. Ali Younesi a déclaré qu’il n’a pu dormir qu’en se couvrant les yeux avec son t-shirt. Pendant leur détention dans la section 209, des agents ont drastiquement limité leur accès à l’air libre et à la lumière du jour, ne leur autorisant que deux sorties en plein air de 20 minutes par semaine, et les ont privés de la visite de leurs proches.
Ali Younesi a déclaré à sa famille qu’il n’avait pas reçu les soins médicaux appropriés pour les graves blessures qui lui avaient été infligées à l’œil gauche lorsqu’il avait été frappé lors de son arrestation par des agents du ministère du Renseignement. Il n’a pas été examiné par un ophtalmologue pendant sa détention. Amirhossein Moradi a également dit avoir été roué de coups lors de son arrestation. Le 26 juin 2022, ils ont été transférés dans le quartier ordinaire de la prison d’Evin.
Le 15 juillet 2022, le Haut conseil des droits humains d’Iran, qui relève du pouvoir judiciaire, a répondu à une communication d’un groupe de procédures spéciales des Nations unies datée du 3 mai 2022 et faisant part de leurs inquiétudes quant au traitement réservé à Ali Younesi et Amirhossein Moradi en détention et à la violation de leurs droits en matière d’équité des procès, et a rejeté ces préoccupations et affirmé à tort que « les accusés ont été détenus dans la chambre d’isolement (et non pas une cellule d’isolement) de la section 209 de la prison d’Evin pour une durée limitée avant que la décision soit rendue. Après cela, ils ont été transférés dans le quartier ordinaire 209 » (Voir ici pour plus d’informations).
Les autorités ont violé leur droit à la présomption d’innocence en les accusant publiquement d’avoir des liens avec des groupes « contre-révolutionnaires », en raison, semble-t-il, des liens réels ou supposés de leurs familles avec l’Organisation des moudjahidin du peuple d’Iran, un groupe d’opposition basé à l’extérieur de l’Iran. Le 6 mai 2020, Gholamhossein Esmaili, alors porte-parole du pouvoir judiciaire, a affirmé lors de sa conférence de presse hebdomadaire que deux étudiants – allusion manifeste à Ali Younesi et à Amirhossein Moradi – avaient été appréhendés pour avoir été en contact avec des groupes « contre-révolutionnaires ». Il a employé un terme péjoratif pour faire référence à l’Organisation des moudjahidin du peuple d’Iran et n’a fourni aucune preuve de ces accusations. Les autorités ont également affirmé à tort avoir trouvé des « engins explosifs » en leur possession.
Les deux étudiants ont démenti ces accusations. Les agents qui ont conduit les interrogatoires les ont également accusés d’avoir retiré des affiches représentant des responsables iraniens et d’avoir participé à des manifestations pacifiques en janvier 2020. En réponse aux allégations du porte-parole selon lesquelles des « engins explosifs » avaient été retrouvés chez les étudiants, Aida Younesi, la sœur d’Ali Younesi, a déclaré que les agents des forces de sécurité leur avaient dit qu’ils n’avaient rien trouvé de suspect après la perquisition du domicile d’Ali Younesi.
Le 3 juillet 2021, lors d’une audience devant la 29e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran, Ali Younesi et Amirhossein Moradi ont été inculpés de « corruption sur terre » (efsad-e fel-arz), infraction passible de la peine de mort, de « rassemblement et collusion en vue de commettre des infractions compromettant la sécurité nationale » et de « diffusion de propagande contre le régime ». D’après des entretiens que leurs avocats ont accordés à des médias, le juge a rejeté la charge de « corruption sur terre » et l’a remplacée par « destruction de biens publics », qui est le motif justifiant 10 des années d’emprisonnement de leur condamnation.
Les autorités iraniennes prennent régulièrement pour cible des membres de la famille de personnes ayant des liens réels ou présumés avec l’Organisation des moudjahidin du peuple d’Iran. Après les émeutes qui ont éclaté au lendemain des élections de juin 2009 en Iran, les autorités ont notamment arrêté des personnes dont des proches entretenaient ou avaient entretenu des liens avec des groupes d’opposition, dont cette organisation. Pour obtenir plus d’informations, veuillez consulter le document intitulé From Protest to Prison.
Parmi les personnes arrêtées en 2009 figure la prisonnière d’opinion Maryam Akbari Monfared, qui purge une peine de 15 ans de prison à la suite d’une ingérence arbitraire dans sa vie privée, au sein de sa famille et dans sa correspondance, motivée par le fait qu’elle avait appelé à plusieurs reprises des proches qui étaient membres de l’Organisation des moudjahidin du peuple d’Iran et leur avait rendu visite une fois (cliquez ici pour obtenir plus d’informations).
À partir du 11 janvier 2020, des manifestations ont eu lieu un peu partout en Iran, après que les autorités eurent admis que les pasdaran (Gardiens de la révolution) avaient tiré des missiles sur un avion de ligne ukrainien dans l’espace aérien iranien, tuant les 176 personnes qui se trouvaient à bord. Les actions de protestation ont rapidement pris de l’ampleur, des manifestants scandant des slogans hostiles au régime et appelant à une réforme du système politique du pays.
Amnesty International a rassemblé des informations montrant que les forces de sécurité, en réponse à ces manifestations, avaient tiré des plombs pointus au moyen d’armes à air comprimé, d’ordinaire utilisées pour la chasse, sur des manifestants et manifestantes pacifiques, causant des saignements et des blessures douloureuses. Elles ont aussi eu recours à des balles en caoutchouc, du gaz lacrymogène et du gaz poivre pour disperser les protestataires, leur ont donné des coups de pied, de poing et de matraque et ont procédé à des arrestations arbitraires. Pour en savoir plus, voir https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2020/01/iran-scores-injured-as-security-forces-use-unlawful-force-to-crush-protests/