Écrire La première exécution en 60 ans serait imminente

Le 24 juin, la Cour suprême des Maldives a confirmé la déclaration de culpabilité et la condamnation de Hussain Humaam Ahmed, 22 ans, pour le meurtre du député Afrasheem Ali en 2012, malgré de sérieux doutes concernant l’équité de son procès. Si elle venait à avoir lieu, cette exécution serait la première aux Maldives depuis plus 60 ans.

Hussain Humaam Ahmed (Humaam), 22 ans, a été condamné à mort en janvier 2014 pour le meurtre du député Afrasheem Ali, survenu en 2012. En septembre 2015, la Haute Cour a confirmé sa déclaration de culpabilité et sa condamnation à mort, et le 24 juin 2016, la Cour suprême des Maldives a fait de même. L’exécution d’Humaam pourrait survenir d’un moment à l’autre, car le gouvernement actuel du président Abdulla Yameen a promis de pendre les condamnés à mort dans les 30 jours suivant la confirmation de leur peine par la Cour suprême.

L’équité de la procédure contre Humaam a suscité de graves préoccupations, dont plusieurs ont été recensées dans un rapport exhaustif rendu public par l’organisation non gouvernementale Maldives Democracy Network. Afrasheem Ali a été retrouvé mort à son domicile dans la nuit du 1er octobre 2012. Quelques heures plus tard, Humaam a été arrêté et accusé d’avoir tué Afrasheem Ali avec un objet tranchant. Bien qu’Hunnam soit revenu durant son procès sur ses « aveux » qui, soutient-il, ont été faits alors qu’il se trouvait en détention provisoire après que les autorités ont menacé de s’en prendre à sa famille, le tribunal a utilisé lesdits « aveux » contre lui. Cela est contraire à l’article 14 (3) (g) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel les Maldives sont partie, et qui dispose que toute personne a le droit de ne pas être forcée de témoigner contre elle-même ou de s’avouer coupable, ainsi qu’à l’article 52 de la Constitution maldivienne, qui ne déclare recevables à titre de preuve que les déclarations faites devant le tribunal.

Humaam et sa famille affirment par ailleurs qu’il souffre d’une déficience mentale, et avaient requis un examen psychiatrique indépendant afin que sa santé mentale soit évaluée durant le procès. À la connaissance de sa famille et de l’équipe assurant sa défense, aucun examen de ce type n’a eu lieu, et aucun élément à ce sujet n’a été présenté devant le tribunal. Le droit international interdit de condamner à mort des personnes atteintes de déficiences mentales. Sa famille a par ailleurs indiqué que son handicap mental a eu un impact direct sur sa capacité à aider ses avocats, qui ont changé à plusieurs reprises durant le procès, et sur l’efficacité globale de sa défense.

Si Humaam est pendu, il s’agira de la première exécution aux Maldives depuis plus de 60 ans. Le gouvernement actuel a commencé à prendre des mesures pour le rétablissement des exécutions en 2014, quand il a introduit une nouvelle réglementation en vue d’adopter l’injection létale comme méthode d’exécution et de supprimer la possibilité pour le président d’accorder des grâces. La condamnation à mort prononcée contre Humaam illustre bien les problèmes qu’Amnesty International et d’autres organisations ont constatés quant au recours à la peine capitale aux Maldives. Selon les statistiques fournies par l’administration pénitentiaire des Maldives, 17 prisonniers se trouvent actuellement sous le coup d’une condamnation à mort dans le pays. Sur ceux-ci, au moins cinq ont été condamnés pour des actes commis alors qu’ils étaient âgés de moins de 18 ans. Le droit international coutumier et deux traités internationaux auxquels les Maldives sont partie interdisent l’application de la peine de mort aux mineurs délinquants.

Outre le cas de Humaam, la Cour suprême a récemment clos les audiences de deux autres affaires de meurtre et devrait rendre son jugement, ouvrant la porte à d’autres exécutions si les accusés sont déclarés coupables. Il est alarmant que le président Yameen ait affirmé que la reprise des exécutions est nécessaire afin de maintenir la sécurité et l’ordre public. Aucune étude scientifique n’a réussi à démontrer de manière convaincante que la peine de mort a un effet plus préventif que d’autres châtiments sur la criminalité. Une étude très complète réalisée par les Nations Unies sur la relation entre la peine de mort et les taux d’homicide (E/AC.57/1988/CRP.7) a conclu que « les recherches n’ont pas permis de prouver scientifiquement que les exécutions avaient un effet plus dissuasif que la réclusion à perpétuité. Il est peu probable que cette preuve puisse être obtenue un jour. Dans l’ensemble aucun élément ne vient accréditer la thèse de l’effet dissuasif. »
Amnesty International s’oppose en toutes circonstances et sans aucune exception à la peine de mort, quelles que soient la nature et les circonstances du crime commis, la culpabilité ou l’innocence ou toute autre situation du condamné, ou la méthode utilisée pour procéder à l’exécution. La peine capitale constitue le châtiment le plus cruel et le plus inhumain, et bafoue le droit à la vie.

La dernière exécution aux Maldives a eu lieu il y a plus de 60 ans. La reprise de la peine capitale aux Maldives serait une grave régression pour le bilan du pays en matière de droits humains. La plupart des pays du globe (103) ont désormais aboli ce châtiment pour tous les crimes, et 140 pays sont abolitionnistes en droit ou en pratique. Fidji et Nauru sont les derniers pays en date à avoir aboli ce châtiment dans la région Asie-Pacifique, en 2015 et 2016 respectivement. Le Parlement de la Mongolie a adopté un nouveau Code pénal abolissant la peine de mort pour tous les crimes et entrant en vigueur en septembre 2016.

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