Le Service de contrôle de l’immigration et des douanes (ICE) détient près de 90 familles dans trois établissements en Pennsylvanie et au Texas. Des cas de COVID-19 ont été confirmés en juin dans des centres de détention pour familles, y compris dans ceux où sont enfermées Ana, Victoria, Juana et Norma. Toutes les familles détenues sont gravement exposées au risque de contamination du fait de l’hygiène inadaptée et des soins médicaux insuffisants. L’ICE est habilité à libérer les familles ensemble et le faisait autrefois, mais choisit désormais de ne plus exercer cette autorité, si bien que des familles se retrouvent bloquées dans des centres de détention.
Ana* (22 ans) et sa fille Victoria* (4 ans) ont fui le Honduras après avoir reçu plusieurs menaces de mort et après que le conjoint d’Ana et père de Victoria a été tué en raison de ses convictions politiques. L’ICE a été informé à plusieurs reprises que Victoria est asthmatique et qu’elle est particulièrement fragile face au COVID-19, mais il refuse malgré tout de les libérer. Ana a des kystes ovariens qui provoquent des douleurs quotidiennes depuis des mois et ne bénéficie pas d’une prise en charge médicale adaptée. Victoria souffre maintenant de crises d’angoisse, fait des cauchemars et mouille son lit, alors que ce n’était pas le cas avant.
Juana* (45 ans) et Norma* (4 ans) ont fui le Honduras avec l’autre fille de Juana, Paula*, après que les membres d’un gang les ont menacées de viol et de meurtre. Elles ont été séparées à la frontière américaine. Paula a été envoyée au Mexique au titre de la politique illégale du plan « Rester au Mexique », tandis que Juana et Norma ont été placées en détention. L’incertitude quant au sort de Paula accable Juana. Elle souffre de douleurs articulaires, d’hypertension et d’obésité. Tout ce stress lui a fait perdre beaucoup de poids. Norma est abattue, déprimée, et demande constamment quand elles sortiront. Juana ne sait plus quoi lui répondre.
Ces mères ont récemment eu à fêter un anniversaire qu’aucun parent ne souhaiterait célébrer : un an de détention avec leur enfant.
En mai 2020, l’ICE a imposé à des parents avec des enfants ayant parfois à peine un an un « choix binaire » impossible : être séparés de leurs enfants, qui seraient libérés et confiés à des familles d’accueil pendant que les parents resteraient en détention illimitée et risqueraient d’être expulsés, ou bien rester en détention illimitée ensemble. Amnesty International États-Unis a publié une synthèse intitulée Family Separation 2.0 : “You aren’t going to separate me from my only child”, contenant des témoignages de parents.
Aux termes du droit international, les États-Unis sont tenus de veiller à ce que les droits humains des migrants et des demandeurs d’asile soient respectés, protégés et concrétisés. Les autorités américaines sont aussi tenues de veiller à ce que les mineurs ne soient détenus que dans des circonstances exceptionnelles, et ce pendant la durée la plus courte possible. Les normes internationales, y compris les instruments auxquels les États-Unis sont partie, sont fortement défavorables à la détention pour des motifs liés à l’immigration.
Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) proclame clairement le droit de ne pas être détenu arbitrairement. La détention des demandeurs d’asile ne doit être qu’une mesure prise en dernier recours, lorsque les autres solutions non privatives de liberté se sont révélées ou ont été jugées insuffisantes dans le cas de la personne en cause.
Les familles doivent toutes être libérées ensemble immédiatement. Des personnes sont prêtes à les accueillir. Il n’y a aucune raison de ne pas libérer les enfants avec leurs parents. La solution alternative, c’est-à-dire séparer les familles en ne libérant que les enfants, est inacceptable. La séparation de la famille résultant de ce « choix » forcé viole de nombreux droits humains, notamment le droit à l’unité familiale et le droit à la liberté, ainsi que l’obligation d’accorder la priorité à l’intérêt supérieur de l’enfant.