Écrire 200 familles risquent d’être expulsées de force

Deux cents familles risquent d’être expulsées de force très prochainement dans la communauté paysanne guahory, dans le département de Caaguazú (est du Paraguay).

Le 13 juillet 2018, selon des informations disponibles publiquement, environ 400 policiers ont été déployés dans la communauté paysanne guahory, les juristes chargés du dossier ayant décidé d’appliquer le Plan d’action conjointe relatif aux faits de violation de propriété privée passibles de poursuites. Amnesty International a constaté que cette procédure conduisait à des expulsions forcées dissimulées, menées sans garanties suffisantes pour respecter et protéger le droit à un logement décent.

Les expulsions forcées pourraient débuter à tout moment, en violation des droits à une procédure régulière et à un logement décent de centaines de personnes, y compris de dizaines d’enfants qui vivent dans la communauté. Amnesty International craint également que ces expulsions forcées ne dégénèrent et ne mènent à des violences, comme cela a été le cas lors des précédentes opérations d’expulsion menées dans la communauté paysanne guahory en 2016 et 2017.

Les familles de la communauté paysanne guahory revendiquent leur droit à la nourriture et à un logement décent dans le contexte de l’accès à la terre et de la réforme agraire au Paraguay. La propriété des terres sur lesquelles elles vivent n’a été déterminée par aucune autorité judiciaire.

Le 15 septembre 2016, un procureur et environ 1 200 policiers utilisant des tracteurs ont expulsé par la force des membres de la communauté paysanne guahory. Selon les familles paysannes, leurs maisons et leurs récoltes ont été détruites. Il n’y a eu aucune discussion et aucun ordre d’expulsion n’a été présenté. Des représentants des autorités et de la communauté ont indiqué que des particuliers avaient pris part à cette opération.

Le 3 janvier 2017, des maisons et des cultures de la communauté paysanne guahory ont à nouveau été détruites lors d’une deuxième opération d’expulsion. Douze personnes ont été arrêtées, dont trois adolescents, et ont été libérées à minuit et accusées de violation de propriété privée. Des hommes, des femmes, des garçons et des filles ont indiqué que la police les avait battus et aspergés de gaz lacrymogènes. Des policiers leur ont dit que les paysans étaient « des moins que rien qui ne voulaient pas travailler », et qu’ils devaient « arrêter de traîner avec des paysans s’ils ne voulaient pas avoir d’ennuis ».

Selon la Coordination du Paraguay pour les droits humains (CODEHUPY) et des paysans guahory, d’autres expulsions ont eu lieu en février et octobre 2015 et en décembre 2016.

Le Plan d’action conjointe relatif aux faits de violation de propriété privée passibles de poursuites est un accord entre le bureau du procureur général, le ministère de l’Intérieur et la police nationale, conclu le 28 mars 2012 et mis à jour le 20 mars 2017, qui définit les actions que ces trois instances entendent mener pour mettre un terme aux violations de propriété privée. Le bureau du procureur général, l’organe chargé des enquêtes pénales, ne se prononce pas sur les questions de propriété ; cela relève de la compétence des autorités judiciaires, qui tranchent ces questions dans le cadre de procédures civiles et agraires. En conséquence, il est à craindre que des expulsions forcées ne soient menées en ce qui concerne les terres dont la propriété n’a pas encore été déterminée.

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