En mars 2023, le Congrès national a adopté la Loi n° 27705 établissant un plan de paiement des dettes de la sécurité sociale (moratoires sur les retraites) sur deux années, comme politique publique visant à garantir l’accès aux pensions de retraite pour les personnes qui n’ont pas 30 années de cotisations. L’objectif était de réparer des situations d’inégalité face au travail informel dans un pays où plus de 47 % du marché du travail opère sans cotisations ni déclarations. Le moratoire, qui a expiré le 23 mars 2025, permettait à une personne n’ayant pas pu cotiser durant sa vie professionnelle d’avoir accès à une pension tout en payant pour couvrir la différence de cotisations.
Le gouvernement national a annoncé qu’il ne cherchera pas à repousser cette échéance, étant donné le plan d’ajustement budgétaire qui a particulièrement touché les retraites des personnes âgées.
Si le moratoire sur les cotisations de retraite n’est pas remplacé par un autre système, les personnes qui ne remplissent pas les conditions pour prendre leur retraite ne pourront prétendre qu’à la pension universelle pour les personnes âgées (PUAM), qui correspond à 80 % du minimum vieillesse. En février 2025, le montant de la PUAM a été fixé à environ 167 euros et la pension de retraite minimale à 209 euros, des montants bien inférieurs au revenu nécessaire, estimé à 256 euros, permettant d’échapper à la pauvreté, selon l’Institut national des statistiques et des recensements (INDEC). Les personnes qui perçoivent la pension de retraite minimale vivent bien en dessous du seuil de pauvreté. Si la période que couvre la loi n’est pas prolongée, la plupart des futurs retraités, hommes et femmes, recevront encore moins.
Cela aura un impact sur toutes les personnes qui n’ont pas suffisamment cotisé parce qu’elles ont travaillé dans le secteur informel et/ou ont une trajectoire personnelle particulière, mais elle touchera de manière disproportionnée les femmes, qui ont des taux d’informalité plus élevés que les hommes.
Par ailleurs, l’Argentine traverse une crise économique et sociale depuis plusieurs années. Le pays a emprunté au Fonds monétaire international (FMI), par le biais du prêt le plus élevé jamais consenti par l’institution financière internationale. Le FMI a inscrit entre autres conditions que l’Argentine parvienne à un « déficit zéro ». Depuis l’investiture du gouvernement en place, cet objectif s’est traduit par l’adoption de mesures fortes en matière d’ajustement budgétaire et d’austérité. Dans son dernier rapport sur le pays, le FMI notait le coût supplémentaire pour le produit intérieur brut (PIB) du moratoire sur les retraites, tout en appelant à protéger les plus vulnérables.
La baisse des retraites a été l’un des principaux moteurs de l’ajustement fiscal réalisé par le gouvernement actuel. Selon l’Institut argentin d’analyse fiscale (IARAF), la réduction totale des dépenses primaires de l’administration publique nationale au cours des deux premiers mois de 2024 (environ quatre milliards d’euros) s’explique à 43 % (1,7 milliard d’euros) par la réduction des dépenses de pensions et de retraites, qui était de 33 % par rapport aux deux premiers mois de 2023.
Tous les mercredis, les personnes âgées manifestent lors de la « Marche des retraités » ; certains rassemblements ont été réprimés, notamment ceux des quatre derniers mercredis. Amnesty International a réuni des informations sur des cas de personnes âgées qui ont été frappées et réprimées à coups de matraque et de gaz lacrymogènes par la police.
Vous trouverez des informations complémentaires (en espagnol uniquement) dans les publications du 6 mars et du 13 mars.