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Monsieur Abdelsalam,
Je vous écris pour vous faire part de mon extrême inquiétude face aux récents éléments concernant le cas de Moujib al Mikhlafi, 49 ans, spécialiste de l’éducation et formateur aux droits de l’enfant, à la consolidation de la paix, au dialogue et à la communication non violente. Cet homme est détenu arbitrairement depuis le 10 octobre 2023, dans un centre de détention géré par les services de sécurité et de renseignement houthis, à Sanaa. Il est apparu dans une vidéo rendue publique le 1er septembre 2024, que les Houthis ont décrite comme des « aveux » filmés indiquant qu’il était membre d’un « réseau d’espionnage » ciblant le secteur de l’éducation au Yémen.
Dans cette vidéo, diffusée sur la chaîne de télévision Al Masirah, affiliée aux Houthis, et qu’Amnesty International a pu examiner, on pouvait voir quatre détenus, parmi lesquels Moujib al Mikhlafi, qui étaient tous présentés comme faisant partie d’un « réseau d’espionnage » visant à permettre et faciliter la destruction du secteur de l’éducation au Yémen par les États-Unis.
Cependant, à ce jour, Moujib al Mikhlafi n’a pas été déféré devant le parquet ni inculpé formellement, et il est toujours privé de son droit à un avocat. S’il était inculpé d’espionnage, il encourrait la peine de mort selon le droit pénal yéménite.
Les Houthis ont l’habitude de recourir à la torture pour extorquer des aveux, ce qui incite à craindre que ces détenus, et notamment Moujib al Mikhlafi, n’aient été contraints à faire les déclarations enregistrées dans les vidéos diffusées. La diffusion d’« aveux » forcés porte atteinte au droit des personnes détenues à la présomption d’innocence et à leur droit de ne pas témoigner contre soi-même.
Moujib al Mikhlafi a été arrêté par les forces houthies de sécurité et de renseignement le 10 octobre 2023, alors qu’il se rendait dans le gouvernorat d’Ibb, dans le sud du Yémen. Il devait intervenir dans des écoles locales pour former le personnel enseignant à l’éducation aux droits humains. D’après un membre de sa famille, les forces de sécurité et de renseignement ont effectué une descente à son domicile sans mandat le même jour et ont saisi deux téléphones portables, deux iPads et des documents en lien avec son travail. Ils ont refusé d’indiquer à ses proches le motif de leur intervention et le lieu de détention de Moujib al Mikhlafi.
À la suite de son arrestation, Moujib al Mikhlafi a été soumis à une disparition forcée pendant 21 jours, jusqu’à ce que les services de sécurité et de renseignement informent sa famille qu’il était détenu dans leur centre de détention à Sanaa, où il se trouve encore actuellement. Selon l’un de ses proches, il a ensuite été détenu au secret pendant deux semaines avant d’être autorisé à appeler sa famille, le 15 novembre 2023. Il a été maintenu à l’isolement de façon prolongée, pendant au moins trois mois, en violation de l’interdiction absolue de la torture et des autres traitements cruels, inhumains et dégradants.
Nous appelons les autorités houthies de facto à libérer Moujib al Mikhlafi sans délai. Dans l’attente de sa libération, les autorités doivent veiller à ce qu’il soit protégé contre la torture et toute autre forme de mauvais traitement, qu’il puisse consulter un·e avocat·e et contacter sa famille régulièrement, et qu’il bénéficie de soins médicaux adéquats.
Veuillez agréer, Monsieur Abdelsalam, l’expression de ma haute considération.
VOS APPELS : arabe et anglais. Vous pouvez également écrire dans votre propre langue.