Mahal Baloch, Baloutche de 28 ans, élève seule ses deux filles, âgées de cinq et huit ans, depuis le décès de son mari en 2016. Bibi Gul, la belle-sœur de Mahal, est la fondatrice et présidente de l’Organisation baloutche des droits humains, qui recense les atteintes à ces droits dans la province du Baloutchistan. Sa famille comptant plusieurs militant·e·s, Mahal a participé à un certain nombre de manifestations, en particulier contre les disparitions forcées, véritable fléau au Baloutchistan. Amnesty International a précédemment constaté que les disparitions forcées d’étudiant·e·s, de militant·e·s, de journalistes et de défenseur·e·s des droits humains se poursuivent sans relâche dans cette province.
Le 17 février à 23 heures, 12 membres des forces de sécurité ont effectué une descente au domicile de Mahal Baloch. Ces agents n’ont pas présenté de mandat ni aucun autre document judiciaire ni avant ni pendant le raid. Après cette descente illégale, Mahal Baloch, sa mère, sa belle-sœur, sa nièce (âgée de 12 ans), et ses deux filles (de huit et cinq ans) ont été forcées à monter à bord de deux voitures, et emmenées au bureau du service de lutte contre le terrorisme (CTD) de la police, sur Spinney Road à Quetta. Mahal a été séparée du reste de la famille dans les véhicules et au siège du CTD. La nièce de la jeune femme a déclaré au Conseil des droits humains du Baloutchistan que pendant leur détention, elles pouvaient entendre Mahal hurler durant son interrogatoire.
Selon le Conseil des droits humains du Baloutchistan, le 18 février, ses parentes ont été libérées et déposées dans une zone isolée où elles ont dû marcher entre 30 et 45 minutes avant de trouver des moyens de transport leur permettant de rentrer chez elles. Ce jour-là, Mahal a comparu devant le tribunal antiterroriste sans que sa famille n’en soit informée. Le tribunal antiterroriste a autorisé le maintien de Mahal Baloch en détention provisoire pendant sept jours. Le tribunal a ensuite prolongé sa détention le 24 février et le 4 mars. Le 14 mars, Mahal a été conduite devant le tribunal de grande instance, qui a prolongé sa détention de 10 jours supplémentaires. Bien qu’elle ait comparu quatre fois, le CTD n’a toujours pas inculpé Mahal Baloch.
La crise des droits humains au Balouchistan se poursuit, et selon certaines informations, les forces de sécurité soumettent à des disparitions forcées et à des exécutions extrajudiciaires des militant·e·s baloutches présumés et des militant·e·s de l’opposition accusés d’activités terroristes par les autorités. Amnesty International ne prend pas position sur la culpabilité ou l’innocence des personnes soupçonnées d’avoir pris part à des attaques qualifiées d’actes de terrorisme par les gouvernements. Cependant, toute personne doit pouvoir exercer l’ensemble des droits humains garantis par le droit national et international.
Amnesty International dénonce les attaques menées sans discrimination et les attaques visant des personnes civiles qui sont perpétrées par des groupes armés, et reconnaît pleinement que les autorités pakistanaises ont pour devoir de prévenir et de réprimer les infractions, y compris les crimes violents tels que les actes de terrorisme, et de traduire en justice les auteurs présumés de tels crimes. Toutefois, en soumettant à des disparitions forcées des personnes soupçonnées d’activités terroristes ou de liens avec des groupes terroristes, le Pakistan a non seulement gravement bafoué leurs droits humains, mais également manqué à son devoir d’inculper et de juger ces personnes dans le cadre d’un procès équitable.