Dès le 13 décembre, la Chambre des représentants et le Sénat des Philippines vont examiner une proposition de loi visant à rétablir la peine capitale et se prononcer sur ce texte. S’il est adopté, il permettrait l’imposition de ce châtiment pour toute une série d’infractions, à l’encontre des obligations juridiques internationales sur le sujet.
Le 7 décembre, la commission de la justice de la Chambre des représentants des Philippines a adopté un projet de loi relatif au rétablissement de la peine de mort, étape préalable à l’examen du texte par la Chambre des représentants et le Sénat. Le gouvernement s’est engagé à le faire voter par la Chambre des représentants avant la fin de l’année. S’il est adopté, il autoriserait le recours à la peine capitale pour plusieurs infractions, parmi lesquelles le meurtre, mais aussi des infractions à la législation relative aux stupéfiants et l’enlèvement aggravé.
Les Philippines, qui ont aboli complètement la peine de mort pour la deuxième fois en 2006, ont ratifié le Deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, traité international en vertu duquel les exécutions sont catégoriquement interdites et le pays est tenu d’abolir ce châtiment. L’adoption d’une loi réintroduisant ce châtiment dans le droit national serait contraire aux obligations du pays au regard de ce traité et remettrait également en question l’importance que les autorités philippines attachent à leurs engagements internationaux.
À une époque où un nombre croissant de pays abolissent ce châtiment, les Philippines, en rétablissant la peine de mort, s’inscriraient nettement contre la tendance mondiale vers son abolition. Cela remettrait également en cause les bons résultats que le pays a obtenus jusqu’ici lorsqu’il est intervenu pour obtenir la commutation de condamnations à mort prononcées contre des Philippins à l’étranger, des travailleurs expatriés, par exemple.
Écrire Il faut renoncer au projet de rétablissement de la peine de mort
La Chambre des représentants des Philippines pourrait entamer l’examen d’une proposition de loi visant à rétablir la peine de mort dans le pays dès le 13 décembre 2016. Aux termes de ce texte, le Code pénal serait modifié de sorte à prévoir l’application de la peine capitale dans certaines affaires de meurtre, de trahison, de corruption, de viol, d’enlèvement, de vol, d’incendie volontaire, de manipulation de preuves, de vol de véhicule, ainsi que pour certaines infractions à la législation relative aux stupéfiants. La proposition de loi rendrait également obligatoire l’imposition de ce châtiment pour certaines de ces infractions si elles sont commises dans des conditions précises. Enfin, elle prescrirait que les condamnés à mort soient exécutés par injection létale, pendus ou fusillés par un peloton d’exécution entre 12 et 18 mois après la confirmation de leur peine par la Cour suprême.
Amnesty International est opposée à la peine de mort en toutes circonstances, car il s’agit d’une violation du droit à la vie, qui est consacré par la Déclaration universelle des droits de l’homme, et du châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit. C’est une peine irréversible, prononcée et appliquée par des systèmes judiciaires qui ne sont pas à l’abri de la discrimination ni des erreurs. L’organisation déplore les propos tenus par les autorités philippines qui, pour justifier le rétablissement de la peine capitale, affirment que ce châtiment permet de lutter contre la criminalité et de rendre justice aux victimes. Or, il n’existe aucun élément convaincant prouvant que la peine de mort ait un effet dissuasif. Les statistiques de pays abolitionnistes montrent que les infractions qui étaient précédemment passibles de ce châtiment n’augmentent pas quand il n’est plus appliqué, tandis que des éléments révèlent que les approches punitives n’ont guère d’influence sur la consommation de stupéfiants.
Depuis qu’elles ont aboli la peine de mort en 2006, les Philippines ont joué un rôle essentiel dans la protection du droit à la vie à l’échelon international, notamment en faisant la promotion de cette mesure. Elles ont soutenu et coparrainé cinq résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies appelant à un moratoire sur le recours à la peine capitale depuis 2007. Ces résolutions demandent vivement aux États qui ont aboli la peine de mort de ne pas la réintroduire.
D’après les chiffres les plus récents rendus publics par le ministère des Affaires étrangères, au mois d’avril 2015, au moins 88 Philippins encouraient la peine de mort dans d’autres pays. Le ministère a porté assistance à ces prisonniers pour veiller à ce que leurs droits soient respectés. Dans le cadre de leurs efforts, les représentants des Philippines ont exercé des pressions politiques pour obtenir la commutation de condamnations à mort prononcées contre leurs ressortissants. Amnesty International craint que le rétablissement de la peine capitale ne diminue significativement la capacité des autorités philippines à protéger les droits de leurs citoyens, en particulier leur droit à un procès équitable, quand ceux-ci encourent ce châtiment dans d’autres pays.
À ce jour, 141 pays – plus des deux tiers des pays du monde – ont aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Le nombre de ceux qui procèdent à des exécutions diminue lui aussi ; d’après les informations dont on dispose sur les cinq dernières années, seuls 11 pays ont exécuté des prisonniers chaque année. Sur les 193 États membres des Nations unies, 169 (88 %) n’avaient procédé à aucune exécution en 2015. Dans la région Asie-Pacifique, 19 États ont aboli la peine capitale pour tous les crimes, les derniers en date étant Fidji en 2015 et Nauru en 2016, et huit autres sont abolitionnistes dans la pratique. En outre, la Mongolie a adopté un nouveau Code pénal, entrant en vigueur en 2017, qui abolit ce châtiment pour tous les crimes.
Nom : néant
Hommes et femmes
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