Au Myanmar, une jeune femme de 24 ans a été arrêtée en raison d’un commentaire sur Facebook qui tournait l’armée en dérision. Cette femme est une prisonnière d’opinion et doit être libérée immédiatement et sans condition.
Le 12 octobre, Chaw Sandi Tun, également appelée Chit Tha Mee, a été interpellée à Yangon, plus grande ville du pays, pour un message qu’elle a partagé sur Facebook. Ce message soulignait que la dirigeante de l’opposition Aung San Suu Kyi portait des vêtements d’une teinte similaire à ceux de l’armée, et en particulier à ceux du commandant en chef des armées, le général Min Aung Hlaing. Voici son commentaire : « Si vous l’aimez [Aung San Suu Kyi] tant, portez un morceau de son longyi [sarong] sur la tête ». Dans la société patriarcale et conservatrice traditionnelle birmane, l’idée d’un homme portant des vêtements de femmes sur la tête est considérée comme offensante.
On ignore au titre de quel texte de loi Chaw Sandi Tun est retenue. Selon des informations émanant d’ONG et des médias, elle fait l’objet d’une enquête au titre de la Section 34(d) de la Loi sur les transactions électroniques de 2004, modifiée en 2014, qui prévoit une amende comprise entre 5 et 10 millions de kyats (entre 3 000 et 6 800 euros), ou une peine maximale de trois ans de prison, si elle refuse de payer ou n’en a pas les moyens. Cependant, des sources proches de Chaw Sandi Tun, ainsi qu’un responsable du poste de police de l’agglomération de Maubin, ont déclaré à Amnesty International qu’elle était retenue au titre de l’article 66(d) de la Loi de 2013 sur les Télécommunications, qui prévoit une peine maximale de trois ans d’emprisonnement. Selon des sources crédibles, le 14 octobre, la police a commencé à enquêter sur elle pour diffamation, infraction passible de deux ans de prison au titre de l’article 500 du Code pénal du Myanmar.
À la suite de son arrestation, Chaw Sandi Tun a été transférée à la prison de Maubin, dans la région d’Ayeyarwady, où elle est actuellement détenue. Selon des sources crédibles, elle n’a pas encore pu consulter d’avocat. Elle doit comparaître devant un tribunal le 27 octobre.
Écrire Une femme arrêtée pour un post sur facebook
Si la pénétration d’Internet demeure très faible au Myanmar, Facebook est largement utilisé par ceux qui se servent d’Internet, notamment les défenseurs des droits humains, les représentants du gouvernement et les agences de presse. Le 14 octobre, Patrick Kum Jaa Lee, militant pour la paix, a été interpellé à Yangon pour un message sur Facebook qui tournait l’armée du Myanmar en dérision. Voir : https://www.amnesty.org/fr/documents/ASA16/2668/2015/fr/. Il est actuellement détenu au poste de police de la communauté urbaine de Hlaing, à Yangon. Amnesty International est vivement préoccupée par ces affaires, qui pourraient témoigner d’un élargissement de la répression à la liberté d’expression en ligne.
Les autorités du Myanmar continuent d’arrêter et d’emprisonner des militants et des défenseurs des droits humains exerçant simplement sans violence leur droit à la liberté d’expression, garantie par l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH). Amnesty International est préoccupée par diverses lois du Myanmar qui restreignent les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique.
Elle fait observer que le droit à la liberté d’expression englobe les idées de toutes sortes, notamment celles pouvant être perçues comme insultantes ou offensantes.
La semaine dernière, Amnesty International a publié un rapport qui dévoile que les autorités du Myanmar ont intensifié la répression depuis deux ans, notamment en restreignant la liberté d’expression à l’approche des élections générales prévues le 8 novembre. Voir : https://www.amnesty.org/fr/documents/asa16/2457/2015/fr/.
La Section 34 (d) de la Loi de 2004 sur les transactions électroniques énonce le crime consistant à « créer, modifier ou altérer des informations ou diffuser des informations créées, modifiées ou altérées par la technologie électronique dans le but de nuire à l’intérêt ou de porter atteinte à la dignité de toute personne ou toute organisation ». La Section 66(d) de la Loi sur les télécommunications de 2013 prévoit l’inculpation de quiconque est responsable d’avoir « extorqué, contraint, restreint à tort, diffamé, importuné, causé une influence injustifiée ou menacé toute personne en utilisant un réseau de télécommunications ».
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