Écrire Un garçon de 14 ans torturé et contraint d’« avouer »

L’agence de sécurité nationale égyptienne a soumis Aser Mohamed, 14 ans, à une disparition forcée de 34 jours. Le garçon affirme qu’on l’a torturé et soumis à des mauvais traitements pour lui faire avouer des infractions qu’il n’a pas commises. Il risque de faire l’objet d’un procès inique fondé sur ses « aveux » obtenus sous la torture. S’il est déclaré coupable, il encourt une peine pouvant aller jusqu’à 15 ans d’emprisonnement.

Le 12 janvier, au petit matin, des membres de l’Agence de sécurité nationale ont arrêté Aser Mohamed lors d’une descente à son domicile familial, dans le quartier du 6 octobre, au Caire. Les agents, qui n’ont présenté ni mandat d’arrêt ni autorisation de perquisition, ont indiqué à la famille qu’ils avaient l’intention d’emmener Aser Mohamed pour l’interroger brièvement. Ils ont refusé de révéler l’endroit où ils l’emmenaient. Pendant les 34 jours qui ont suivi, les autorités ont nié détenir Aser Mohamed à chaque fois que sa famille et ses avocats ont tenté de se renseigner auprès de prisons, de postes de police et du bureau du procureur sur le lieu où il se trouvait. Le 15 février, Aser Mohamed a comparu devant le service du procureur général de la sûreté de l’État, au Nouveau Caire, et a été interrogé en l’absence de son avocat. Il n’a été autorisé à appeler sa famille et son avocat qu’après avoir été interrogé par le procureur.

Aser Mohamed fait l’objet de poursuites pour plusieurs accusations, notamment d’appartenance à la confrérie interdite des Frères musulmans et d’attentat contre un hôtel. Les charges retenues contre lui sont basées sur ses « aveux », qui lui ont, selon lui, été arrachés sous la torture par l’Agence de sécurité nationale au cours de ses 34 jours de détention illégale. Aser Mohamed a déclaré au procureur qu’il avait subi des actes de torture destinés à le contraindre à avouer ces infractions et qu’il a notamment reçu des décharges électriques et a été suspendu par les membres pendant de longues heures. Cependant, le procureur n’a pas ouvert d’enquête sur ces allégations de torture et de disparition forcée. Aser Mohamed affirme que le procureur a menacé de le renvoyer à l’Agence de sécurité nationale pour être à nouveau torturé s’il tentait de revenir sur ses déclarations.

Le procureur a ensuite ordonné le placement en détention provisoire d’Aser Mohamed, contrevenant ainsi aux lois égyptiennes qui interdisent la détention provisoire pour les mineurs de moins de 15 ans. Aser Mohamed a été renvoyé devant le tribunal en août. Le tribunal a tenu la première audience le 6 août et a ensuite repoussé l’audience suivante au 15 août, puis au 8 octobre. S’il est déclaré coupable, Aser Mohamed encourt une peine pouvant aller jusqu’à 15 ans d’emprisonnement. Il est actuellement détenu au poste de police de Talbeya, à Guizeh, dans des conditions inhumaines. Il partage une cellule de 4x6 mètres avec 12 détenus et n’est pas autorisé à en sortir. Sa famille n’a pas pu lui rendre visite depuis le 2 août.

Tôt le matin du 12 janvier 2016, des policiers armés et des agents de l’Agence de sécurité nationale en civil ont fait une descente au domicile familial d’Aser Mohamed et l’ont arrêté. Ils n’ont pas présenté de mandat d’arrêt ou d’autorisation de perquisition. Les agents ont refusé d’informer ses parents de l’endroit où ils l’emmenaient, mais ils leur ont dit qu’ils le ramèneraient environ deux heures plus tard, ce qu’ils n’ont pas fait. Pendant les 34 jours qui ont suivi, sa famille ne savait pas où il se trouvait et ne pouvait pas le contacter. Les proches d’Aser Mohamed ont tout mis en œuvre pour le retrouver. Ils l’ont cherché dans les postes de police de Bulaq al Dakrour, Omraneya, Talbeya, Haram et Guizeh, au Caire. Tous ont affirmé ne pas le détenir. Les proches d’Aser Mohamed ont également signalé sa disparition et envoyé des télégrammes au ministère public, au ministère de l’Intérieur et au procureur général. Ils n’ont reçu aucune information ni aucune réponse.

Ils n’ont pas eu de nouvelles de lui avant le 15 février, lorsqu’Aser Mohamed a pu leur téléphoner lors de son transfert au camp des forces centrales de sécurité de Guizeh, situé à 10,5 km au nord du Caire, sur l’autoroute reliant Le Caire et Alexandrie. Lors de son appel, Aser Mohamed a dit à sa famille qu’il avait déjà été déplacé et qu’il avait été interrogé par le procureur de la sûreté de l’État, ce qui représente une infraction au droit égyptien, puisqu’il aurait dû être déféré au parquet spécialisé dans les affaires impliquant des mineurs. Une fois que sa famille a su où il se trouvait, ses parents se sont rendus au camp des forces centrales de sécurité pour tenter de le voir et de vérifier s’il était en bonne santé. Mais les autorités du camp ne leur ont pas permis de le voir et ont déclaré qu’ils ne pourraient lui rendre visite que lorsqu’il aurait passé neuf jours dans le camp.

Lorsque les parents d’Aser Mohamed ont enfin pu le voir, celui-ci leur a dit que durant sa disparition forcée, il avait été détenu dans les bureaux de l’Agence de sécurité nationale, dans le quartier du 6 octobre (au Caire), avec des adultes. Aser Mohamed a dit à sa famille qu’il a été torturé au cours de ses trois premiers jours de détention et qu’il a reçu des décharges électriques à répétition sur le corps et a été suspendu par les membres pendant de longues heures dans des positions douloureuses. Il souffre en conséquence d’une luxation des épaules due à la suspension. L’Agence de sécurité nationale a refusé qu’il voie un médecin et il a seulement reçu des soins de la part d’un de ses compagnons de cellule, qui se trouvait être médecin. Il a ajouté que l’Agence de sécurité nationale l’a torturé pour le forcer à « avouer » avoir participé à un attentat le 7 janvier 2016 contre l’hôtel Three Pyramids à Guizeh, au Caire, et avoir poussé d’autres personnes à commettre des infractions.

L’Agence de sécurité nationale a envoyé Aser Mohamed devant le procureur le 15 janvier, en même temps qu’un rapport d’enquête officiel. Le rapport d’enquête affirmait qu’il n’avait été arrêté que plus tôt ce jour-là, c’est-à-dire le 15 février. Le rapport ne fait aucune référence aux 34 jours précédents qu’il a passés en détention au secret.

Le procureur a accusé Aser Mohamed d’appartenir à la confrérie interdite des Frères musulmans et d’avoir participé à l’attentat du 7 janvier contre un hôtel. Il affirme que lorsqu’il a nié ces accusations, le procureur lui a répondu : « Il semblerait que vous ayez envie de retourner aux décharges électriques », ce qui laisse entendre que le procureur savait que lors de sa détention aux mains de l’Agence de sécurité nationale, Aser Mohamed avait été soumis à des actes torture et avait notamment reçu des décharges électriques, dans le but de le faire « avouer ». Le procureur n’a pris aucune mesure pour enquêter sur les personnes responsables d’actes de torture et d’autres mauvais traitements et pour que ces personnes répondent de leurs actes.

Le procureur a officiellement inculpé Aser Mohamed et a autorisé la prolongation de sa détention pour une durée de 15 jours renouvelable. Le ministère public a déféré l’affaire d’Aser Mohamed à la Cour pénale du Caire (branche du terrorisme) en avril 2016. La prochaine audience aura lieu le 8 octobre.

Amnesty International a réuni des informations sur de nombreux cas dans lesquels l’Agence de sécurité nationale du ministère de l’Intérieur a eu recours à des disparitions forcées pour intimider l’opposition et empêcher la dissidence pacifique. Au moins trois ou quatre personnes disparaissent chaque jour dans le pays.

L’augmentation du nombre de disparitions forcées coïncide avec la prise de fonction du ministre de l’Intérieur, Magdy Abd el Ghaffar, qui a été membre du Service de renseignement de la sûreté de l’État pendant plusieurs années, la police secrète du régime de l’ancien président Hosni Moubarak responsable d’enlèvements, d’actes de torture et d’autres crimes de droit international et de graves violations des droits humains.

Pour plus d’informations, veuillez consulter le dernier rapport et le communiqué de presse d’Amnesty International sur l’Égypte dans lesquels le cas d’Aser Mohamed est évoqué. Le rapport intitulé « Égypte. Des centaines de personnes soumises à une disparition et à la torture dans le cadre d’une vague de répression », publié le 13 juillet, est disponible à l’adresse : https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2016/07/egypt-hundreds-disappeared-and-tortured-amid-wave-of-brutal-repression/.

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