Écrire Grâce refusée et date d’exécution fixée en Floride

Michael Lambrix n’a pas obtenu de grâce et son exécution est prévue pour le 11 février. Âgé de 23 ans lorsqu’il a été condamné à mort en Floride, en 1984, il a aujourd’hui près de 56 ans. Il continue d’affirmer qu’il a agi en état de légitime défense.

Clarence Moore et Aleisha Bryant ont été tués le 6 février 1983 et enterrés près de la caravane où Cary Michael Lambrix vivait avec Frances Smith. Celui-ci a été inculpé de meurtre. Son premier procès, qui s’est déroulé en 1983, a finalement été annulé car le jury n’avait pas pu parvenir à un verdict. Lors de son nouveau procès, en 1984, le jury l’a déclaré coupable de deux assassinats et a recommandé la peine de mort, par 10 voix à deux pour un meurtre et huit à quatre pour l’autre. Michael Lambrix se dit innocent de tout meurtre prémédité ; il affirme avoir agi en état de légitime défense lorsque Clarence Moore a attaqué mortellement Aleisha Bryant et s’en est pris à lui parce qu’il a tenté de s’interposer.

Le principal témoin à charge était Frances Smith, qui a déclaré que Michael Lambrix avait tué les victimes. Le juge n’a pas permis à la défense d’évoquer les précédentes déclarations incohérentes qu’elle avait faites à la police. Deborah Hanzel, qui vivait avec le cousin de Frances Smith à l’époque, a déclaré que Michael Lambrix lui avait indiqué avoir tué les victimes. Elle est revenue sur ce témoignage en 2003, en précisant : « [Michael Lambrix] ne m’a jamais dit à aucun moment ni laissé entendre d’une quelconque manière qu’il avait tué les victimes. » Elle a ajouté que Frances Smith lui avait confié qu’elle « ne savait pas vraiment ce qui s’était passé dehors mais que M. Lambrix lui avait dit que [Clarence Moore] était devenu fou et qu’il avait dû le frapper ». Deborah Hanzel a déclaré qu’elle avait menti car Frances Smith lui avait demandé de corroborer sa version et qu’elle avait accepté « en raison de la peur que Frances Smith et les autorités avaient fait naître en [elle] » à l’égard de Michael Lambrix. Elle a expliqué sa rétractation ainsi : « Je ne peux pas fuir la vérité. Je ne veux plus ressentir de culpabilité. »

Fin novembre 2015, l’avocat de Michael Lambrix a été informé, sans explication, que le recours grâce était rejeté. En décembre, il a appelé les autorités à surseoir à l’exécution, à mener une enquête exhaustive dans le cadre du recours, notamment à interroger Michael Lambrix, et à organiser une audition. On ignore pour le moment quel sera l’effet d’un arrêt rendu récemment par la Cour suprême fédérale sur la situation de Michael Lambrix.

Le pouvoir exécutif n’a plus gracié de condamné à mort en Floride depuis 1983. Pendant ce laps de temps, plus de 90 exécutions ont eu lieu dans cet État. Dans une évaluation du système d’application de la peine capitale en Floride publiée en 2006, l’Association des avocats américains (ABA) a conclu que le manque de transparence entourant la procédure de recours en grâce empêchait de déterminer quelle incidence les « considérations politiques inopportunes » avaient sur cette procédure.

En vertu de la Constitution de cet État, le gouverneur peut accorder un sursis de 60 jours au maximum mais ne peut commuer une peine capitale qu’avec l’approbation de deux membres du Comité des grâces du pouvoir exécutif. Ledit Comité est composé du gouverneur lui-même et de membres du cabinet. Ce dernier est constitué de trois élus, du procureur général (chargé de défendre la peine de mort devant les tribunaux), du commissaire à l’agriculture et à la protection des consommateurs et du directeur des finances publiques. Le gouverneur peut refuser la grâce à tout moment et pour n’importe quel motif, quel que soit l’avis du Comité. En effet, il a toute latitude en la matière. La Commission d’examen, constituée de trois commissaires nommés par le gouverneur et le cabinet, se charge des questions administratives et des enquêtes pour le compte du Comité. Elle peut mener des investigations approfondies et détaillées sur tous les éléments pertinents du point de vue du recours en grâce et remet son rapport final au Comité. Elle doit notamment s’entretenir avec le condamné et, si possible, avec sa famille, le ministère public, les avocats de la défense et le juge.

Dans la lettre qu’il a adressée à la Commission et au Comité, l’avocat de Michael Lambrix explique que son client n’a pas été véritablement interrogé dans le cadre du recours et que celui-ci n’a fait l’objet d’aucune véritable audition. Il appelle le gouverneur Scott à mettre de côté le mandat d’exécution qu’il a signé à l’encontre de Michael Lambrix afin que le processus de recours en grâce puisse suivre son cours.

Le 12 janvier 2016, dans l’affaire Hurst c. Floride, la Cour suprême fédérale a statué que les modalités relatives à la peine capitale en Floride étaient inconstitutionnelles car elles n’accordaient au jury qu’un rôle consultatif et laissaient la décision finale à la discrétion du juge. Selon elle, cela était incompatible avec l’arrêt qu’elle avait rendu en 2002 dans l’affaire Ring c. Arizona. Elle avait alors estimé que, aux termes de la Constitution des États-Unis, il incombait au jury, et non au juge, de tirer les conclusions justifiant une éventuelle condamnation à mort. On ignore combien de personnes se trouvant actuellement dans le couloir de la mort en Floride sont concernées par l’arrêt Hurst et comment les autorités exécutives et législatives réagiront.

Cet arrêt ne précise pas si la décision du jury doit être unanime en cas de condamnation à mort. Aux termes du droit de Floride, comme l’illustre l’affaire de Michael Lambrix, la recommandation du jury (à laquelle le juge est tenu d’accorder beaucoup de poids) n’est pas nécessairement unanime et une condamnation peut-être votée à sept voix contre cinq. Entre 2000 et 2012, seul un cinquième des peines de mort ont été prononcées à la suite d’une recommandation unanime. Environ un quart des prisonniers condamnés à mort depuis 2012 l’ont été à l’issue d’un vote unanime du jury.

Dans la plupart des États où la peine capitale est en vigueur, le jury doit être unanime ; le désaccord d’un seul juré entraîne automatiquement la condamnation à la réclusion à perpétuité. La question va désormais faire l’objet d’une procédure judiciaire en Floride, notamment dans l’affaire Hurst elle-même, que la Cour suprême a renvoyée devant les tribunaux de l’État afin qu’elle soit réexaminée à la lumière de l’arrêt Hurst. Timothy Hurst a été condamné à mort en 2012 par un juge qui a suivi la recommandation votée par le jury à sept voix contre cinq.

Depuis 1976, 1 423 exécutions ont eu lieu aux États-Unis, dont 92 en Floride. En outre, cet État est le seul à avoir ôté la vie à un condamné à mort depuis le début de l’année 2016. Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine de mort, en toutes circonstances.

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