Écrire Un homme capturé en Libye est détenu au secret

Un Libyen poursuivi aux États-Unis pour des faits passibles de la peine de mort a été capturé par les forces américaines en Libye le 29 octobre et emmené à bord d’un navire. Il est possible qu’il soit envoyé par avion aux États-Unis, mais dans une affaire connexe en 2014, le suspect a été détenu au secret pendant 13 jours avant d’être présenté à un tribunal.

Le 30 octobre, le président Donald Trump a déclaré : « hier, sur mon ordre, les forces américaines ont capturé Mustafa al Imam en Libye » et il « sera traduit en justice aux États-Unis ». Les forces américaines ont capturé ce ressortissant libyen dans la région de Misurata, une ville côtière du nord-ouest de la Libye. Selon les informations recueillies, elles l’ont transféré à bord d’un navire, mais on ne sait pas encore si, comme dans une affaire connexe en 2014, les autorités américaines vont l’y maintenir en détention pour lui faire traverser l’Atlantique ou si elles vont le transférer dans un avion en direction des États-Unis.

Le ministère américain de la Justice a publié une déclaration selon laquelle « Al Imam est en détention sous responsabilité américaine et, à son arrivée aux États-Unis, sera présenté à un juge fédéral à Washington », mais il n’a pas précisé quand cela se produirait. Mustafa al Imam a été inculpé à la suite d’une plainte au pénal, déposée auprès d’une cour fédérale de district à Washington le 19 mai 2015, qui a été rendue publique le 31 octobre 2017. Les charges sont liées aux attaques perpétrées les 11 et 12 septembre 2012 contre la Mission spéciale des États-Unis et son annexe à Benghazi, qui ont provoqué la mort de quatre ressortissants américains : l’ambassadeur J. Christopher Stevens, Sean Smith, Tyrone Woods et Glen Doherty. Le principal chef d’inculpation (homicide d’une personne au cours d’une attaque visant une installation fédérale) est passible de mort aux États-Unis. Toute demande de condamnation à mort lors d’un procès fédéral doit être autorisée par le ministre de la Justice.

En août 2017, le tribunal de district de Washington s’est prononcé sur le cas d’un autre ressortissant libyen, Ahmed Abu Khatallah, qui avait été capturé par les forces spéciales américaines près de Benghazi le 15 juin 2014, transféré sur un navire américain ancré au large des côtes libyennes, détenu au secret et interrogé au cours d’un voyage en mer de 13 jours jusqu’aux États-Unis. Le juge a rejeté une requête préliminaire visant à obtenir l’annulation de toute déclaration faite par Ahmed Abu Khatallah pendant cette période, introduite au motif qu’il y avait eu violation de son droit d’être déféré dans le plus court délai devant un juge, et que sa renonciation à son droit de garder le silence et d’être assisté par un avocat (exprimée auprès d’agents du FBI après plusieurs jours d’interrogatoires menés par des agents de renseignement) était sujette à caution, étant donné le traitement qui lui avait été réservé au préalable.

La détention au secret prolongée facilite la pratique de la torture et des autres mauvais traitements. Dans certaines circonstances, elle s’apparente en elle-même à une forme de torture ou de traitement cruel, inhumain et dégradant. En vertu du droit d’être déféré dans le plus court délai devant un juge après une arrestation, consacré par le droit international relatif aux droits humains, le délai en question ne doit pas dépasser quelques jours.

Comme dans des cas antérieurs de captures de suspects effectuées par les États-Unis, aucune procédure d’extradition n’a eu lieu. Mustafa al Imam est le troisième ressortissant libyen que les forces américaines ont capturé en Libye pour l’amener aux États-Unis depuis 2013.

Abdul Hamed al Ruqai, également connu sous le nom d’Abu Anas al Libi, a été capturé le 5 octobre 2013 à Tripoli par les forces américaines et interrogé à bord du navire USS San Antonio, avant d’être transféré aux États-Unis et inculpé pour son rôle présumé dans les attentats à l’explosif perpétrés en 1998 contre des ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie. Son avocat a fait valoir devant le tribunal en 2014 que les forces américaines avaient placé son client en détention au secret sur le navire et que le personnel de la CIA et d’autres personnes l’avaient interrogé quotidiennement au cours de la semaine qui avait suivi.

Abdul Hamed al Ruqai a indiqué qu’ils l’avaient de fait soumis à une privation de sommeil en lui faisant subir des interrogatoires prolongés à intervalles rapprochés. Les autorités américaines ont mis fin à sa détention au secret parce qu’il était atteint d’une maladie grave. Il est décédé aux États-Unis le 2 janvier 2015, avant l’ouverture de son procès. Les forces américaines ont capturé Abu Khatallah près de Benghazi le 15 juin 2014.

En 2017, les autorités américaines ont rejeté une requête de la défense visant à obtenir l’annulation de toute déclaration faite par Abu Khatallah lors des interrogatoires auxquels il a été soumis pendant ses 13 jours de détention au secret à bord de l’USS New York. La requête faisait valoir que les autorités avaient délibérément opté pour un voyage transatlantique en bateau – mode de transport lent – afin de disposer du plus de temps possible pour les interrogatoires.

Cependant, elles ont affirmé qu’elles ne pouvaient pas envoyer le détenu aux États-Unis par avion, parce que cela aurait supposé qu’il soit envoyé dans un pays de l’Union européenne et qu’il y transite, ce qu’aucun pays de l’UE n’aurait probablement accepté, la peine capitale risquant d’être appliquée dans cette affaire. Selon le gouvernement américain, les pays du Moyen-Orient ou de l’Afrique du Nord auraient également été « des candidats improbables, étant donné les réactions défavorables auxquels ils s’exposeraient au plan national en coopérant avec les États-Unis pour une opération antiterroriste ». Le juge a également accepté l’explication des autorités selon laquelle le voyage avait duré plus longtemps que prévu parce que le navire avait des problèmes de moteur.

En février 2016, le juge a rejeté une requête de la défense demandant, à titre de réparation pour le traitement infligé en détention, que l’inculpé soit renvoyé en Libye ou que la peine capitale ne soit pas requise. Cependant, en mai 2016, l’administration Obama a annoncé qu’elle ne requerrait pas la peine de mort. Le procès d’Abu Khatallah devant le tribunal de district de Washington a débuté en octobre 2017. Le 17 juin 2014, les autorités américaines ont informé le Conseil de sécurité de l’ONU que l’opération américaine visant à placer Abu Khatallah en détention avait été menée en vertu du « droit naturel de légitime défense » des États-Unis au motif que cet homme « continuait de planifier des attaques armées contre des ressortissants américains ». Auparavant, en mai 2014, le ministère de la Défense a cité le cas d’Abu Anas al Libi à titre d’exemple d’application par l’administration Obama de l’Autorisation de recours à la force armée (AUMF) de 2001, une résolution libellée en termes généraux et adoptée presque sans débats dans le sillage immédiat des attentats du 11 septembre 2001, et que les administrations successives ont utilisée pour justifier les détentions à Guantánamo et les « opérations de capture » ou « opérations meurtrières » menées ailleurs.

Pour plus d’informations sur Abu Khatallah : https://www.amnesty.org/fr/documents/amr51/050/2014/fr/
Pour plus d’informations sur Abu Anas al Libi : https://www.amnesty.org/fr/documents/amr51/071/2013/fr/

Les États-Unis capturent depuis longtemps des suspects à l’étranger pour les placer sous leur garde. Ainsi, à Karachi, en 1997, des agents du Bureau fédéral d’enquêtes (FBI) ont capturé Mir Aimal Kasi, un ressortissant pakistanais recherché pour le meurtre de deux employés de la CIA tués en 1993. Ils l’ont encagoulé, bâillonné et entravé, l’ont envoyé par avion en Virginie et l’ont remis aux autorités de cet État, qui l’ont jugé, condamné à mort et exécuté en 2002.

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