Hadi Rostami, Mehdi Sharfian et Mehdi Shahivand ont été condamnés le 19 novembre 2019 à une peine d’amputation des doigts, après que le premier tribunal pénal de la province de l’Azerbaïdjan occidental les a reconnus coupables d’être entrés par effraction aux domiciles de quatre personnes et d’avoir volé l’or et le liquide enfermés dans des coffres. Leur procès a été manifestement inique et s’est fondé sur des « aveux » qui, selon ces hommes, ont été obtenus sous la torture alors qu’ils étaient détenus et soumis à interrogatoire, sans bénéficier des services d’un avocat, dans un centre de détention géré par le Service des enquêtes de la police iranienne (agahi).
Selon des sources bien informées, les hommes ont été torturés : ils ont été roués de coups, notamment de pied et de câble, et suspendus par les poignets et les pieds pendant les interrogatoires. D’après ces mêmes sources, Hadi Rostami a eu la main cassée, et les agents chargés de l’interrogatoire ont ôté le pantalon de Mehdi Shahivand et menacé de le violer au moyen d’un morceau de bois s’il refusait de faire des « aveux » l’incriminant ainsi que ses coaccusés. Selon des sources bien renseignées, les agents ont forcé Mehdi Sharfian et Mehdi Shahivand à « avouer » des cambriolages dont ils n’étaient pas les auteurs et à impliquer Hadi Rostami dans ces mêmes cambriolages.
Dans une lettre adressée au responsable du pouvoir judiciaire le 20 septembre 2020, qu’Amnesty International a pu examiner, Hadi Rostami a indiqué que, pendant la phase d’instruction de leur dossier, les agents chargés de l’interroger lui avaient asséné des coups de poing et de pied, et des coups à l’aide de divers instruments. Il a ajouté que l’un des agents avait exigé qu’il signe une feuille de papier blanche et qu’il avait fini par obtempérer, à bout de forces sur le plan physique et mental. Les autorités de poursuite ont ensuite détaillé sur cette feuille blanche, sans qu’il en ait connaissance et qu’il y ait consenti, la nature des faits qui lui était reprochés, pour faire croire qu’il les avait reconnus.
Les trois hommes se sont rétractés devant le tribunal et ont informé les juges que leurs « aveux » leur avaient été extorqués sous la torture. Toutefois, le tribunal pénal comme la Cour suprême ont manqué à leur obligation de ne pas retenir ces « aveux » à titre de preuves et d’ordonner des investigations sur leurs allégations de torture. La décision rendue par la Cour suprême, qu’Amnesty International a examinée, évoquait brièvement et en termes vagues le fait que Hadi Rostami s’était plaint de torture, mais elle ne développait pas le sujet.
Hadi Rostami a déposé de nombreuses plaintes officielles auprès d’organes judiciaires, mais elles sont restées lettre morte. En mars 2021, alors qu’il était incarcéré dans la prison d’Orumiyeh, il s’est plaint auprès d’un fonctionnaire en visite qui représentait Ebrahim Raisi, alors responsable du pouvoir judiciaire en Iran ; ce représentant l’a assuré qu’il serait remédié à sa situation. Hadi Rostami a également évoqué son cas directement auprès de l’actuel responsable du pouvoir judiciaire, Gholamhossein Mohseni Ejei, quand celui-ci s’est rendu à la prison d’Ilam (province d’Ilam), où Hadi Rostami était alors détenu, mais cette démarche est elle aussi restée sans suite.
Les autorités iraniennes avaient déjà envisagé précédemment d’appliquer la peine d’amputation de Hadi Rostami, Mehdi Sharfian et Mehdi Shahivand, mais elles y avaient renoncé en septembre 2020, à la suite de pressions internationales.L’Iran est légalement tenu d’interdire et de sanctionner la torture en toutes circonstances et sans exception. Cependant, le Code pénal islamique iranien prévoit toujours l’imposition à titre de sanction pénale de châtiments corporels constituant des actes de torture, notamment l’amputation, la flagellation, l’aveuglement, le crucifiement et la lapidation. Selon le Centre Abdorrahman Boroumand pour les droits humains en Iran, les tribunaux iraniens ont prononcé au moins 356 peines d’amputation depuis 1979. L’organisation a également recensé l’application de 192 peines d’amputation depuis 1979, mais le Centre Abdorrahman Boroumand estime que ce chiffre est très en deçà de la réalité.
En vertu du droit international, le terme « torture » désigne tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment de la punir d’un acte qu’elle a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou d’intimider une tierce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit. L’Assemblée générale des Nations unies a toujours condamné la torture et les autres mauvais traitements, appelant les États à enquêter sur ces actes et à poursuivre leurs auteurs présumés.
En 1975, elle a adopté la Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, énonçant l’obligation incombant à tous les États d’enquêter sur les allégations de torture, de poursuivre les auteurs présumés de tels agissements et d’accorder réparation aux victimes. De plus, en vertu de l’article 10 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), toute personne privée de sa liberté doit être traitée « avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine ».