Écrire Inquiétudes grandissantes pour un avocat détenu

Hejaaz Hizbullah, un éminent avocat sri-lankais, a été arrêté le 14 avril 2020. Il est détenu sans inculpation et privé d’assistance juridique depuis lors.
Ses proches pensent qu’il a été pris pour cible en raison de son travail, notamment pour avoir défendu les minorités musulmanes dans le pays.

Le barreau du Sri Lanka estime que l’arrestation de Hejaaz Hizbullah est fondée sur un travail réalisé dans le cadre de sa profession d’avocat.

Selon certaines informations parues dans la presse, il pourrait être poursuivi en vertu de la Loi relative à la prévention du terrorisme (PTA).

Hejaaz Hizbullah a été arrêté le 14 avril 2020 au soir par des membres de la police judiciaire (CID). D’après les informations figurant dans la requête en habeas corpus introduite par ses proches, il a été victime d’une ruse lui faisant croire que des fonctionnaires du ministère de la Santé venaient lui rendre visite chez lui pour discuter de l’exposition potentielle de la famille au COVID-19 après un retrait d’argent qu’il avait effectué à un distributeur automatique le jour même. Des agents de la police judiciaire sont alors arrivés à son domicile et l’ont menotté. Ils ont recueilli sa déposition et saisi les dossiers des affaires sur lesquelles il travaillait. Ils l’ont ensuite conduit au siège de la police judiciaire, où il a de nouveau été interrogé. Il est en détention depuis lors. Il n’a jamais pu s’entretenir avec son avocat en privé et ne bénéficie d’aucune assistance juridique depuis le 16 avril. Les deux fois où il a pu voir son avocat, les 15 et 16 avril, l’entretien s’est déroulé en présence d’agents de la police judiciaire.

Amnesty International croit savoir que Hejaaz Hizbullah n’a pas été informé du motif de son arrestation ni des charges retenues contre lui, mais le porte-parole de la police, Jaliya Senaratne, a déclaré lors d’une conférence de presse que son arrestation était liée à une enquête sur les auteurs des attentats du dimanche de Pâques, le 21 avril 2019, qui ont coûté la vie à plus de 250 personnes. Certains médias indiquent qu’il pourrait être poursuivi au titre de la Loi relative à la prévention du terrorisme (PTA), texte draconien qui constitue l’un des principaux facteurs de violations des droits humains au Sri Lanka.

Hejaaz Hizbullah est un avocat chevronné auprès de la Cour suprême du Sri Lanka et a critiqué ouvertement le gouvernement sur des sujets ayant trait aux droits humains, notamment les droits des minorités dans le pays. Lui et sa famille pensent qu’il a été pris pour cible en raison de ses critiques à l’égard des autorités. Ses proches ont porté plainte auprès de la Commission des droits humains du Sri Lanka.

En 2017, le rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, Ben Emmerson, a déploré l’habitude des autorités sri-lankaises de poursuivre des membres de minorités pour terrorisme, en soulignant que la PTA avait été « utilisée pour commettre certaines des pires violations des droits humains, y compris le recours généralisé à la torture et à la détention arbitraire, dans les années qui ont précédé le conflit et pendant celui-ci, en particulier pour viser les minorités et réprimer l’opposition ». Son rapport mettait également en avant les persécutions infligées par les autorités en vertu de lois ayant trait au terrorisme à des personnes à qui il était reproché « divers liens réels ou supposés avec des groupes armés, en les détenant pendant plusieurs années sans inculpation ni procès, ni contrôle judiciaire de leur détention, et sans possibilité ou presque de libération ».

La Commission des droits humains du Sri Lanka, dans le rapport qu’elle a présenté au Comité des Nations unies contre la torture en 2016, a souligné : « La torture est régulièrement utilisée dans toutes les régions du pays, indépendamment de la nature de l’infraction présumée pour laquelle le suspect est arrêté. »

Les autorités sri-lankaises doivent enquêter et traduire en justice dans le cadre de procès équitables les personnes soupçonnées de responsabilité pénale dans des atteintes aux droits humains. Cependant, ces mesures doivent respecter les normes internationales d’équité des procès, notamment l’accès sans restriction à une assistance juridique et des procès devant des tribunaux indépendants. Ces droits sont garantis par le droit international relatif aux droits humains, que le Sri-Lanka est tenu de respecter, et la Constitution sri-lankaise.

L’article 14-3 du PIDCP dispose : « Toute personne accusée d’une infraction pénale a droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes : a) À être informée, dans le plus court délai, dans une langue qu’elle comprend et de façon détaillée, de la nature et des motifs de l’accusation portée contre elle ; b) À disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense et à communiquer avec le conseil de son choix ; c) À être jugée sans retard excessif », entre autres droits.

De même, l’article 13 de la Constitution du Sri Lanka dispose : « (1) Nul ne doit être arrêté hormis selon la procédure établie par la loi. Toute personne arrêtée doit être informée des motifs de son interpellation. (2) Toute personne placée en garde à vue, détenue ou privée sous une autre forme de sa liberté personnelle doit être présentée devant le juge du tribunal compétent le plus proche selon la procédure établie par la loi et ne doit pas être maintenue plus longtemps en détention, sauf sur ordre de ce juge et selon ses termes s’ils sont conformes à la procédure établie par la loi. (3)

Toute personne inculpée d’une infraction doit avoir le droit d’être entendue, en personne ou représentée par un avocat, dans le cadre d’un procès équitable devant un tribunal compétent.

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