Écrire Un jeune iranien risque d’être bientôt exécuté

Un Iranien de 19 ans, qui avait moins de 18 ans au moment des faits qui lui sont reprochés, doit être exécuté le 16 avril. Il a été placé en détention à l’isolement à la prison de Lakan, à Rasht, en prévision de l’exécution.

Alireza Pour Olfat a été condamné à mort en octobre 2013 après avoir été déclaré coupable d’avoir poignardé à mort un homme lors d’une rixe impliquant plusieurs personnes. Âgé de 16 ans au moment des faits, il en a aujourd’hui 19 et est détenu dans le quartier des condamnés à mort de la prison de Lakan, à Rasht (province du Gilan). En vue de son exécution le 16 avril, il a été placé à l’isolement le 8 avril.

Alireza Pour Olfat a été arrêté le 2 mai 2013. Le 19 octobre 2013, il a été condamné à mort en vertu de la qisas (réparation) par la 3e chambre du tribunal pénal de la province du Gilan. Amnesty International croit savoir que le tribunal n’a pas tenu compte de l’âge d’Alireza Pour Olfat quand il a examiné l’affaire et rendu son jugement, en dépit des nouvelles dispositions relatives à la condamnation de mineurs, ajoutées au Code pénal islamique de 2013 en vigueur depuis mai 2013. Celles-ci autorisent les tribunaux à remplacer la peine de mort par un autre châtiment s’ils estiment qu’un mineur délinquant n’avait pas conscience de la nature de son crime ou de ses conséquences, ou s’il existe des doutes quant à « son développement et sa maturité psychologiques » au moment des faits. Le 14 juin 2014, la 24e chambre de la Cour suprême a maintenu la sentence capitale prononcée à son encontre.

En avril 2015, la Cour suprême a rejeté la demande de nouveau procès (eadeh dadresi) déposée par Alireza Pour Olfat, déclarant que les documents présentés par l’avocat sur l’état mental de son client au moment des faits, dont un certificat établi par un neurologue, ne constituaient pas de nouveaux éléments de preuve. Une autre demande de nouveau procès, déposée en février 2016, a semble-t-il elle aussi été rejetée par la Cour suprême.

La procédure judiciaire ayant abouti à la condamnation d’Alireza Pour Olfat était inique. Le jeune homme aurait été victime d’actes de torture ou d’autres mauvais traitements alors qu’il se trouvait dans un centre de détention de la police (agahi). Il n’a pas été autorisé à voir sa famille, ni à consulter d’avocat pendant sa détention dans ce centre, alors qu’il y a été interrogé.

À la connaissance d’Amnesty International, aucune enquête n’a été menée sur les allégations de torture et d’autres mauvais traitements qu’Alireza Pour Olfat a formulées.

En tant qu’État partie à la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations unies, l’Iran a l’obligation légale de traiter comme un mineur toute personne âgée de moins de 18 ans. Il s’agit d’une notion différente de celle de l’âge minimum de responsabilité pénale, qui correspond à l’âge en dessous duquel les enfants sont présumés ne pas avoir la capacité d’enfreindre la loi. Celui-ci varie selon les pays mais, d’après le Comité des droits de l’enfant des Nations unies, il ne doit pas être inférieur à 12 ans. Les délinquants ayant plus que l’âge minimum de responsabilité pénale mais moins de 18 ans peuvent être considérés comme pénalement responsables et poursuivis, jugés et punis. Cependant, ils ne doivent jamais être condamnés à la peine capitale ni à la réclusion à perpétuité sans possibilité de libération.

En Iran, l’âge de la responsabilité pénale est fixé à neuf années lunaires pour les filles, contre 15 pour les garçons. Passé cet âge, un mineur déclaré coupable d’une infraction relevant des hodoud (crimes contre la volonté de Dieu, passibles de peines incompressibles imposées par la charia) ou du principe de qisas (réparation pour un acte criminel) est généralement condamné comme un adulte. Cependant, depuis l’adoption du nouveau Code pénal islamique en 2013, les juges ont la possibilité de ne pas condamner à mort un mineur délinquant s’ils estiment qu’il n’avait pas conscience de la nature de son crime ou de ses conséquences, ou s’il existe des doutes quant à « son développement et sa maturité psychologiques » au moment des faits.

Néanmoins, les critères d’évaluation de cet état mental sont peu clairs et arbitraires. Les juges doivent obtenir l’avis de l’Organisation iranienne de médecine légale, institution étatique, ou se reposer sur leur propre évaluation quand bien même ils ne disposeraient pas des connaissances ni de l’expertise nécessaires dans le domaine de la psychologie des mineurs. Amnesty International a recueilli des informations sur plusieurs affaires concernant des mineurs délinquants où les juges ont fait l’amalgame entre la responsabilité atténuée des mineurs due à leur manque de maturité et celle des personnes souffrant de handicap intellectuel ou de troubles mentaux, concluant alors que l’accusé ne souffrait pas de « folie » et qu’il était « en bonne santé mentale et émotionnelle », et que par conséquent, il méritait la mort.
En janvier dernier, le Comité des droits de l’enfant des Nations unies a examiné le bilan de l’Iran en termes d’application de la Convention relative aux droits de l’enfant. Dans ses observations finales, il s’est déclaré « extrêmement préoccupé » par le fait que la décision de ne pas condamner à mort un mineur délinquant soit laissée « à l’entière discrétion des juges, qui ont la possibilité, mais non l’obligation, de demander une expertise médico-légale, ainsi que par les nouvelles condamnations à mort prononcées à l’issue de tels procès ». Amnistie internationale a connaissance d’au moins huit autres mineurs délinquants – Himan Uraminejad, Salar Shadizadi, Hamid Ahmadi, Sajad Sanjari, Siavash Mahmoudi, Amir Amrollahi, Amanj Veisee et Fatemeh Salbehi – qui ont été rejugés, considérés comme présentant un niveau suffisant « de développement et de maturité psychologiques » au moment des faits et de nouveau condamnés à la peine capitale. Fatemeh Salbehi, âgée de 17 ans à l’époque de l’infraction, a été mise à mort en octobre 2015.

A la connaissance d’Amnesty International, outre Alireza Pour Olfat, au moins une autre personne mineure au moment des faits qui lui sont reprochés, Milad Azimi, a été condamnée à mort pour la première fois depuis l’adoption du Code pénal islamique de 2013. Entre 2005 et 2015, l’organisation a enregistré au moins 73 exécutions de mineurs délinquants en Iran. Selon les Nations unies, au moins 160 personnes qui étaient mineures au moment des faits qu’on leur reproche se trouvent actuellement dans le quartier des condamnés à mort.

Amnesty International a pu obtenir les noms de 49 d’entre elles, dont certaines ont été condamnées il y a plus de 10 ans. L’organisation demande aux autorités iraniennes de prendre des mesures législatives en vue d’abolir totalement le recours à la peine capitale pour les crimes commis par des mineurs, sans laisser aucun pouvoir d’appréciation aux tribunaux ni permettre aucune exception, conformément aux obligations de l’Iran aux termes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention relative aux droits de l’enfant. (voir Growing Up On Death Row : The death penalty and juvenile offenders in Iran – synthèse et conclusions disponibles en français à l’adresse https://www.amnesty.org/fr/documents/mde13/3112/2016/fr/)

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