Écrire La peine de prison et l’amende d’un journaliste confirmées

La Cour suprême fédérale d’Abou Dhabi, aux Émirats arabes unis, a confirmé la déclaration de culpabilité et la condamnation de Tayseer Salman al Najjar le 19 juin. Le poète et journaliste jordanien avait été arrêté le 13 décembre 2015 et purge une peine de trois ans d’emprisonnement en raison d’un message publié sur Facebook et « portant atteinte [à] la réputation et au prestige de l’État émirien ». Cet homme est un prisonnier d’opinion.

Le 19 juin, la Cour suprême fédérale a confirmé la déclaration de culpabilité et la condamnation du poète et journaliste Tayseer Salman al Najjar. Il avait été condamné à trois ans d’emprisonnement et à une amende de 500 000 dirhams le 15 mars par la chambre pénale de la cour d’appel d’Abou Dhabi.

Tayseer Salman al Najjar a été condamné pour avoir « publié des informations dans le but de porter atteinte à la réputation et au prestige de l’État émirien », en raison d’un message qu’il avait publié sur son compte Facebook en 2014. Dans son message, il faisait l’éloge de la « résistance » palestinienne à Gaza et critiquait d’autres pays, notamment les Émirats arabes unis. Tayseer Salman al Najjar nie avoir « insulté » les Émirats arabes unis. Il est détenu à la prison d’al Wathba, à Abou Dhabi.

Tayseer al Najjar, 45 ans, avait été arrêté par les services de la Sûreté de l’État à Abou Dhabi le 13 décembre 2015, après avoir été convoqué plus tôt dans la journée. Le 3 décembre 2015, alors qu’il allait se rendre en Jordanie pour rendre visite à sa famille, Tayseer al Najjar avait été informé par les autorités à l’aéroport d’Abou Dhabi qu’il n’était pas autorisé à quitter les Émirats arabes unis. Le 18 février 2016, après 68 jours de détention au secret, il a appelé ses proches et leur a dit qu’il était détenu à l’isolement dans un centre de la Sûreté de l’État et qu’il subissait une « forte pression » destinée à le faire avouer. Amnesty International pense qu’il a été torturé.

Une dizaine de jours plus tard, il a de nouveau téléphoné à son épouse pour lui indiquer qu’il avait été transféré à la prison d’al Wathba. Tayseer al Najjar n’a pas pu s’entretenir avec un avocat avant l’ouverture de son procès le 18 janvier, lorsqu’il a comparu devant la Cour d’appel fédérale pour la première fois depuis son arrestation et a été officiellement inculpé. L’audience a été repoussée au 1er février afin qu’il puisse être représenté par un avocat. Le 15 février, une deuxième audience a eu lieu au cours de laquelle le tribunal a fixé la date du 15 mars pour rendre son jugement.

Tayseer Salman al Najjar est un Jordanien vivant aux Émirats arabes unis, marié et père de cinq jeunes enfants. Il a déménagé aux Émirats arabes unis en avril 2015 pour travailler chez Al Jewa, une grande maison d’édition, en amont du lancement en janvier 2016 d’un nouvel hebdomadaire, al Dar, pour lequel il devait écrire des articles dans les pages culturelles.

En juillet 2014, pendant le conflit à Gaza, Tayseer al Najjar a publié le message suivant sur sa page Facebook : « Message destiné aux journalistes et écrivains qui n’apprécient pas la résistance à Gaza [...] Dans une affaire, il y a toujours une partie qui a raison et l’autre qui a tort. Celle qui a raison est la résistance à Gaza, tous les autres sont mal intentionnés, par exemple Israël, les Émirats arabes unis, Al-Sissi [président de l’Égypte] et d’autres systèmes qui n’ont plus honte de se couvrir de honte. »

Le 3 décembre 2015, lorsque Tayseer al Najjar a appris à l’aéroport d’Abou Dhabi qu’il n’était pas autorisé à quitter les Émirats arabes unis, les autorités lui ont indiqué qu’il devait se présenter tous les jours aux services de sécurité. Le 13 décembre 2015 dans la matinée, il a été convoqué par téléphone aux services de la Sûreté de l’État. Il a été arrêté peu après avoir appelé son épouse à 19 heures, juste avant d’entrer dans les locaux. Les proches de Tayseer al Najjar ignoraient où il se trouvait et les motifs de son arrestation jusqu’au 18 février 2016, quand il a été autorisé à les appeler.

Depuis 2011, les autorités des Émirats arabes unis mènent une vaste répression contre la liberté d’expression et d’association dans le pays. L’espace accordé à l’expression des voix dissidentes a été fortement réduit et de nombreuses personnes – tant des citoyens émiriens que des ressortissants étrangers – qui critiquent le gouvernement, sa politique et la situation des droits humains aux Émirats arabes unis sont harcelées, arrêtées, torturées, jugées dans le cadre de procès iniques et emprisonnées.

Les autorités ont arrêté, détenu et poursuivi plus de 100 militants, défenseurs des droits humains et détracteurs du gouvernement, notamment des avocats, des juges et des universitaires de premier plan, sur la base d’accusations très larges et sans nuances liées à la sécurité nationale ou à la cybercriminalité, et ce, dans le cadre de procédures non conformes aux normes internationales en matière d’équité des procès. Certaines personnes précédemment victimes de disparitions forcées ont déclaré avoir été torturées ou maltraitées et contraintes de faire des « aveux » lors des interrogatoires, en l’absence d’un avocat. La Chambre de sûreté de l’État de la Cour suprême fédérale autorise souvent l’usage de ces « aveux », en violation du droit international relatif aux droits humains, et déclare les accusés coupables même lorsqu’ils reviennent sur ces « aveux ».

Le 29 novembre 2016, la Loi fédérale n° 11/2016 est entrée en vigueur. Cette loi concerne l’Autorité judiciaire fédérale, qui a mis en place une procédure d’appel pour les affaires liées à la sûreté de l’État. Les procès qui se déroulent devant la chambre de sûreté de l’État de la Cour suprême fédérale ne sont pas conformes aux normes internationales d’équité des procès. Comme dans ce cas, les accusés sont souvent détenus au secret pendant de longues périodes au cours desquelles ils sont victimes d’actes de torture et de mauvais traitements.

Le 20 décembre 2016, Amnesty International a adressé au ministre de la Justice des Émirats arabes unis un courrier dans lequel elle saluait l’adoption de la nouvelle loi mais lui faisait part de sa crainte que, si celle-ci ne s’accompagne pas de modifications du Code de procédure pénale permettant de mettre les procédures en matière d’arrestation, de détention et de procès en conformité avec les normes internationales, la mise en place de la procédure d’appel ne règlera pas le problème de l’iniquité des procès dans ce type d’affaires.

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