Abbas Vahedian est condamné au total à 21 ans de prison, qui se décomposent en une peine de 11 années, prononcée par la 3e chambre du tribunal révolutionnaire de Meched en décembre 2021, et une peine de 10 années, prononcée par la 5e chambre du tribunal révolutionnaire de Meched en octobre 2021.
Dans ces deux affaires, il a été emmené, sans avertissement préalable et sans connaître la nature des accusations portées à son encontre, depuis son lieu de détention jusqu’au tribunal révolutionnaire de Meched, où les juges qu’il a décrits comme agressifs et partiaux lui ont dit qu’il devait répondre d’actes portant atteinte à la sécurité nationale et lui ont demandé s’il avait des éléments à présenter pour sa défense. Dans les deux cas, il a répondu qu’à la lumière de graves irrégularités, il ne reconnaissait pas la légitimité de ces audiences et a insisté pour que son avocat soit présent.
Dans les deux affaires, les juges présidant le tribunal ont mis fin aux audiences au bout de quelques minutes et refusé de fixer une nouvelle convocation. Sa peine de 10 ans de prison a été finalisée 20 jours après avoir été prononcée, après qu’il a refusé de faire appel. L’appel de sa condamnation à 11 ans de prison est en instance.
Sa peine de prison de 11 années se décompose ainsi : un an pour « diffusion de propagande contre le régime » et 10 ans pour « formation de mouvements dans le but de nuire à la sécurité nationale ». Les mouvements cités dans le jugement sont le Conseil de la convergence des mouvements iraniens, connu sous son acronyme persan Shahjaa, et Iran Think Room (Otagh-e Fekr-e Iran). Le mouvement Shahjaa prône, d’après son site Internet, la transition en Iran, par des moyens pacifiques, du régime de la République islamique, qu’il caractérise de « théocratie corrompue et oppressive », vers un système démocratique et laïc respectant le droit international relatif aux droits humains.
Abbas Vahedian note qu’il n’était pas membre fondateur de Shahjaa, mais a été son porte-parole depuis sa création le 8 avril 2021, jusqu’au 17 mai de la même année. Le mouvement Iran Think Room était un groupe informel de brainstorming, qui a dirigé plusieurs campagnes en ligne lancées au cours des mois précédant l’élection présidentielle de juin 2021, notamment Non à la République islamique et Campagne pour créer la honte. La peine distincte de prison de 10 ans est uniquement liée à la lettre ouverte qu’Abbas Vahedian et 13 cosignataires ont publiée le 12 juin 2019, demandant la démission du leader suprême iranien Ali Khamenei et un changement fondamental de la Constitution du pays. Cette activité pacifique est le fondement des multiples accusations fallacieuses qui lui ont valu sa condamnation, notamment « outrage au Guide suprême », « rassemblement et collusion en vue de commettre des infractions compromettant la sécurité nationale », « diffusion de propagande contre le régime » et « atteinte à l’opinion publique ».
Abbas Vahedian a été arrêté par plusieurs agents des services de renseignement dans un village proche de Rezvanshahr, dans la province de Gilan, dans le nord du pays, le 1er septembre 2021, à la suite de sa participation à un débat en ligne au cours duquel il a réitéré ses convictions politiques. Hormis deux brèves visites de sa famille en décembre 2021 et janvier 2022, en présence d’agents du renseignement, ses contacts avec sa famille se limitent à des appels téléphoniques hebdomadaires, généralement de quelques minutes et en présence d’un agent, ce qui l’empêche de pouvoir parler librement.
Au cours des dernières années, les autorités iraniennes ont soumis Abbas Vahedian à la détention arbitraire, à la disparition forcée, à la torture et aux mauvais traitements, en de multiples occasions, en raison de son militantisme politique pacifique. Il a été détenu de manière arbitraire entre le 18 août 2019 et le 19 juillet 2020 du fait de la lettre ouverte de juin 2019 mentionnée précédemment. Il a alors été interpellé avec violence : un agent l’a frappé au visage avec un objet tranchant, causant des blessures ouvertes au niveau de la bouche. Les autorités ont dissimulé le lieu où il se trouvait pendant deux mois à sa famille, soumettant par conséquent Abbas Vahedian à une disparition forcée.
Après son transfert à la prison de Vakilabad, à Meched, il a raconté à sa famille qu’il avait été maintenu à l’isolement dans un centre de détention informel, non identifié, du ministère du Renseignement à Meched. Dans la prison de Vakilabad, il a été détenu dans une aile générale, avec des prisonniers condamnés pour des crimes violents, et des détenus ont menacé à plusieurs reprises de le tuer ou de lui faire du mal. Selon ses déclarations, une fois, plusieurs détenus ont tenté de le poignarder au cou avec un couteau. Trois fois au moins, un prisonnier lui a sauté dessus pendant qu’il dormait, le blessant à la tête. Au cours du premier trimestre 2020, il a contracté une tuberculose pulmonaire en prison, sans doute contaminé par un compagnon de cellule : il a souffert d’une forte toux, de douleurs à la poitrine et de difficultés respiratoires pendant des semaines, et a perdu du poids.
Alors qu’il avait besoin de soins spécialisés non dispensés en prison, les autorités pénitentiaires et chargées des poursuites ont refusé de le transférer dans un centre médical à l’extérieur. Peu après, il a contracté le COVID-19, et n’a pas reçu de soins médicaux adaptés non plus. À la suite de nombreuses relances de sa famille, il a fini par être libéré sous caution le 19 juillet 2020. Il souffre depuis lors de complications pulmonaires chroniques qui, selon les médecins qu’il a consultés après sa libération, sont dues à l’absence de soins médicaux appropriés pour son infection pulmonaire lors de son incarcération.