Écrire Un militant encourt 14 ans de prison pour une interview accordée aux médias

Shahidul Alam, photographe et militant social au franc-parler, est inculpé au titre de l’article 57 de la Loi sur les technologies de l’information et de la communication, après qu’il a accordé une interview à Al Jazira sur la vague de manifestations étudiantes au Bangladesh. Détenu et inculpé uniquement pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression, Shahidul Alam doit être libéré immédiatement et sans condition.
Shahidul Alam, photographe et militant renommé, est inculpé d’avoir enfreint l’article 57(2) de la loi draconienne sur les technologies de l’information et de la communication de 2013. Le 6 août, le tribunal de première instance de Dacca a également autorisé la police à le placer en détention provisoire pendant sept jours. Les détentions provisoires aux mains de la police bangladaises sont connues pour inclure l’usage de la force illégale, des traitements cruels et inhumains et des morts en détention. Lorsqu’il a comparu au tribunal, Shahidul Alam était incapable de marcher, ce qui fait craindre qu’il n’ait subi des actes de torture et des mauvais traitements.

Shahidul Alam a été initialement arrêté le 5 août, peu après avoir été interviewé par la chaîne al Jazira en langue anglaise. En évoquant les manifestations étudiantes qui se déroulent au Bangladesh, qu’il avait photographiées et diffusées sur Facebook Live, il a critiqué la réaction brutale du gouvernement. Ce même jour, des hommes en civil, portant des casques et brandissant des machettes et des barres de fer, ont attaqué cinq photojournalistes et journalistes de médias locaux qui couvraient ces manifestaions majoritairement pacifiques.

L’article 57 de la Loi sur les technologies de l’information et de la communication prévoit une peine comprise entre sept et 14 ans de prison. En violation des normes internationales qui protègent le droit à la liberté d’expression, la loi est invoquée pour museler les dissidents. Amnesty International considère Shahidul Alam comme un prisonnier d’opinion, détenu uniquement pour avoir exercé de manière légitime son droit à la liberté d’expression, et réclame sa libération immédiate et sans condition.

Les accusations pesant sur Shahidul Alam s’inscrivent dans le contexte des manifestations d’étudiants, qui réclament des routes plus sûres, après que deux étudiants ont été tués et 13 autres blessés par un bus roulant à vive allure alors qu’ils attendaient à un arrêt. Les manifestations majoritairement pacifiques se sont heurtées à une force policière excessive – gaz lacrymogènes et balles en caoutchouc notamment. Plus de 200 étudiants ont été blessés.

Le 5 août 2018, Shahidul Alam a été embarqué par un groupe d’hommes en civil à son domicile dans le quartier de Dhanmondi, à Dacca, après 22 heures. Selon les gardiens chargés de la sécurité de l’immeuble et d’autres témoins, des hommes se présentant comme des officiers de la police judiciaire sont montés, l’ont fait descendre et l’ont poussé de force dans une voiture qui les attendait.
Ils ont recouvert de scotch une caméra de vidéosurveillance et sont repartis avec les images vidéo de leur entrée. Les gardiens ont été malmenés et enfermés. La compagne de Shahidul Alam, qui se trouvait dans un appartement voisin, a couru en bas lorsqu’elle l’a entendu crier alors qu’il était embarqué, mais la voiture qui l’a emmené et deux autres véhicules qui attendaient dehors sont partis à vive allure.
Les récents mouvements en faveur de la sécurité routière organisés par des lycéens et des étudiants pour la plupart mineurs bénéficient d’un accueil favorable et de la solidarité de la population du Bangladesh. Le mouvement initialement pacifique lancé par les étudiants a dégénéré lorsque des hommes en civil portant des casques et brandissant des machettes et des barres de fer ont commencé à attaquer les mineurs et les journalistes qui faisaient leur travail en couvrant les événements.
Shahidul Alam et des personnes qui ont relayé ces attaques sur Facebook et des plateformes de réseaux sociaux sont traqués par les forces de sécurité, avec l’aide de la Ligue étudiante du Bangladesh (BCL), la branche estudiantine de la Ligue Awami, le parti au pouvoir, et sont poursuivis au titre de la Loi sur les technologies de l’information et de la communication de 2013.
Le gouvernement du Bangladesh s’est non seulement montré incapable de protéger celles et ceux qui expriment un point de vue différent et d’amener les groupes d’autodéfense qui les menacent à rendre des comptes, mais il a aussi étouffé la liberté d’expression en usant de toute une série de tactiques répressives et de nouvelles lois.
La Loi sur les technologies de l’information et de la communication, qui prévoit une peine de sept ans d’emprisonnement au minimum, est perçue comme le principal instrument utilisé par les autorités pour étouffer les voix critiques dans le pays. Ses dispositions formulées en termes vagues permettent aux autorités d’engager des poursuites contre des personnes soupçonnées de « porter atteinte à l’image de l’État » ou de « heurter des croyances religieuses », ou encore « dans l’intérêt de la souveraineté, de l’intégrité ou de la sécurité du Bangladesh ».
Le gouvernement s’est servi de cette loi draconienne pour étouffer toute critique dans les médias en engageant des poursuites à l’encontre de journalistes qui ne faisaient que leur travail. En décembre 2016, Nazmul Huda, journaliste de télévision et de presse écrite, a été arrêté, puis sauvagement battu en détention avant d’être inculpé au titre de cette loi, parce qu’il avait couvert des manifestations organisées par des ouvriers de l’industrie textile, dans la banlieue de Dacca.

Nom : Shahidul Alam
Homme

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