Écrire Un militant iranien âgé et malade interdit de voyager

Un défenseur des droits humains âgé, Mohammad Maleki, 84 ans, est empêché de quitter l’Iran pour rendre visite à ses enfants aux Pays-Bas et au Canada. Les autorités le maintiennent sous le coup d’une interdiction de voyager depuis 2011, en représailles de son militantisme pacifique en faveur des droits humains. Il a de graves problèmes de santé et souhaite rejoindre les siens.

Mohammad Maleki, un éminent défenseur des droits humains âgé de 84 ans, est soumis à une interdiction de voyager par les autorités iraniennes depuis le 10 septembre 2011. Il a des antécédents de troubles cardiaques, de diabète et de cancer de la prostate. Il a tenté à maintes reprises d’obtenir la levée de son interdiction de voyager afin de pouvoir rendre visite une dernière fois à ses enfants, établis aux Pays-Bas et au Canada, car il craint d’être bientôt trop malade pour faire le voyage. Son fils, qui vit aux Pays-Bas, ne peut se rendre en Iran, car il courrait un risque élevé d’y être arbitrairement arrêté et placé en détention, en raison de ses opinions dissidentes.

Mohammad Maleki a été interdit de voyager en représailles des activités qu’il mène dans le domaine des droits humains, notamment d’une lettre qu’il a adressée en septembre 2011 au Rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en Iran, dans laquelle il détaillait les actes de torture auxquels il a été soumis pendant les différents séjours qu’il a faits en prison entre 1981 et 2009. À la suite de demandes déposées auprès du Bureau du procureur de la prison d’Evin, il a été informé par une note manuscrite en date du 24 décembre 2013 que son interdiction de voyager avait été levée. Il a alors fait une demande de renouvellement de passeport pour pouvoir rendre visite à son fils aux Pays-Bas, mais le Bureau des passeports de Téhéran a refusé de lui délivrer ce document. Après avoir été renvoyé de bureau et bureau pendant des mois, Mohammad Maleki a été informé par le Bureau du Procureur, en mars 2015, que l’ordre de lui refuser le passeport était venu « d’en haut », c’est-à-dire, comme il l’a appris plus tard, des pasdaran (gardiens de la révolution).

Dans une autre lettre ouverte adressée au Rapporteur spécial des Nations unies sur l’Iran, en avril 2015, Mohammad Maleki a écrit : « Je n’ai commis aucun vol, aucune fraude, aucune autre infraction pénale. J’ai été privé de mes droits civils uniquement en raison de mes convictions [politiques] [...] et de mes activités en faveur des droits humains [...] Je souhaite rendre visite à mon fils au bout de sept ans [...] C’est le désir évident et profond de tout père. » En juillet 2015, il a commencé à faire un sit-in chaque semaine devant un bâtiment public. Il a continué à protester de cette façon jusqu’en novembre 2015, sa santé déclinante l’obligeant ensuite à s’arrêter.

Mohammad Maleki est l’un des fondateurs de la Campagne pour l’abolition étape par étape de la peine de mort, connue sous le sigle persan Legam. Il participe régulièrement à des rassemblements organisés en solidarité avec des victimes de violations des droits humains, et entretient des contacts avec d’autres défenseurs des droits humains et des familles de prisonniers politiques.

Ancien doyen de l’Université de Téhéran, Mohammad Maleki a été arrêté une première fois en juillet 1981, à l’époque où les autorités lançaient la « révolution culturelle » pour « islamiser » les universités et les placer sous un contrôle renforcé de l’État. Dans un premier temps, il a été condamné à mort, mais ce châtiment a ensuite été commué en une peine de 10 ans d’emprisonnement. En août 1986, au bout de cinq ans de prison, il a finalement été relâché. Dans sa lettre de 2011 au Rapporteur spécial des Nations unies sur l’Iran, il décrit les différentes formes de torture – notamment les passages à tabac, la flagellation sur la plante des pieds, la suspension au plafond et les coups de pied dans la tête – qu’il a subies pendant cette période.

Arrêté de nouveau en mars 2001, il a été détenu à l’isolement pendant environ six mois dans la prison d’Eshrat Abad, à Téhéran, qui est gérée par les pasdaran et qu’il a qualifiée d’« épouvantable ». Il a par la suite été condamné à une peine de prison de sept ans avec sursis, après avoir été déclaré coupable de charges – dénuées de tout fondement – liées à la sécurité nationale en raison de ses activités politiques pacifiques au sein de l’Alliance religieuse nationale (Melli Mahzabi), un groupe politique interdit. Mohammad Maleki a été arrêté à nouveau en août 2009 dans le contexte de la répression qui a suivi les manifestations liées à l’élection présidentielle de 2009. Cette fois-ci, il a été détenu à l’isolement dans la prison d’Evin pendant trois mois. En mars 2010, il a été libéré pour raisons de santé, moyennant une forte caution. En octobre 2011, il a été condamné à 12 mois d’emprisonnement. Mohammad Maleki a été convoqué à deux reprises à la prison d’Evin, en janvier et décembre 2012, pour commencer à purger sa peine. À chaque fois, il s’est présenté à la prison mais les autorités ne l’ont pas incarcéré et lui ont permis de rester en liberté sous caution.

L’interdiction de voyager imposée à Mohammad Maleki depuis 2011 est contraire tant au droit international qu’au droit iranien. En vertu de l’article 247 du Code iranien de procédure pénale de 2015, les enquêteurs qui collaborent avec le ministère public peuvent recourir à diverses mesures, y compris aux interdictions de voyager, pour empêcher les auteurs présumés d’infractions de s’enfuir ou de se cacher. L’article 248 du Code dispose qu’une interdiction de voyager expire automatiquement au bout de six mois, sauf si elle est reconduite. L’article 250 du Code prévoit que les mesures adoptées pour faire face au risque de fuite doivent être « motivées » et « proportionnées à la nature et à la gravité de l’infraction, à la gravité de la peine, [au poids de] la preuve [contre l’accusé], au risque de fuite et de perte des traces de l’infraction, au casier judiciaire de l’accusé, à son état psychologique et physique, ainsi qu’à son âge, son sexe, sa personnalité et sa réputation ». Il y a eu violation de ces dispositions légales dans le cas de Mohammad Maleki. En effet, l’interdiction de voyager à son encontre est appliquée depuis plus de cinq ans sans aucune justification et sans qu’il fasse l’objet d’une enquête pénale.

En septembre 2016, Mohammad Maleki a déposé une plainte auprès du juge présidant la 28e chambre du tribunal révolutionnaire, lui demandant soit d’annuler l’interdiction de voyager qui lui était illégalement appliquée, soit d’ordonner qu’il soit convoqué en prison s’il faisait l’objet d’une procédure pénale. Le juge a rejeté sa requête sans fournir de justification.

En vertu de l’article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel l’Iran est partie, « [t]oute personne est libre de quitter n’importe quel pays, y compris le sien. » L’article 12 dispose également que ces droits « ne peuvent être l’objet de restrictions que si celles-ci sont prévues par la loi, nécessaires pour protéger la sécurité nationale, l’ordre public, la santé ou la moralité publiques, ou les droits et libertés d’autrui, et compatibles avec les autres droits reconnus par le présent Pacte ».

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