Après son arrestation le 23 juin 2020, Sanaa Seif a été conduite dans les locaux du service du procureur général de la sûreté de l’État (SSSP), antenne spéciale du parquet en charge des enquêtes sur les menaces à la sécurité nationale, où elle a été interrogée au sujet des accusations de « diffusion de fausses nouvelles », « incitation à des infractions terroristes » et « utilisation abusive des réseaux sociaux ». Le 9 août 2020, elle a de nouveau comparu devant le siège du service du procureur général de la sûreté de l’État au Caire, sans que ses avocats n’en soient informés. Ce service a ouvert une enquête sur deux chefs d’inculpation supplémentaires, à savoir « outrage verbal à un policier dans l’exercice de ses fonctions » et « diffamation d’un policier ».
Au titre du droit international relatif aux droits humains, l’« outrage » n’est pas une infraction reconnue et ne justifie pas une restriction de la liberté d’expression. En outre, le Comité des droits de l’homme de l’ONU a énoncé que « le simple fait que des formes d’expression soient considérées comme insultantes pour une personnalité publique n’est pas suffisant pour justifier une condamnation pénale ».
Les visites dans les prisons, suspendues pendant cinq mois à la suite de l’épidémie de COVID-19, ont repris en août 2020, avec certaines restrictions mises en place. La mère de Sanaa Seif lui a rendu visite pour la dernière fois le 19 juin 2021 et a indiqué qu’elle était en bonne santé. Sanaa Seif et sa famille subissent depuis des années des actes de harcèlement et d’intimidation en raison de leur militantisme en faveur des droits humains. Le 18 mars 2020, Laila Soueif, Mona Seif, Ahdaf Soueif (la tante de Sanaa) et la professeure d’université Rabab el Mahdi ont été arrêtées par les services de sécurité devant le siège du gouvernement au Caire, où elles manifestaient pacifiquement sur le trottoir pour réclamer la libération des détenus, compte tenu de leur crainte d’une épidémie de COVID-19 dans les prisons surpeuplées du pays.
Le procureur les a accusées d’« incitation à manifester », de « diffusion de fausses informations » et de « possession de documents diffusant de fausses informations ». Il a ensuite ordonné leur remise en liberté dans l’attente des conclusions de l’enquête contre une caution de 5 000 livres égyptiennes (environ 320 dollars américains). Bien qu’elles aient versé la caution le jour même, elles ont été retenues jusqu’au lendemain sans aucun fondement juridique. Le 19 mars 2020, Laila Soueif a été transférée dans les locaux du service du procureur général de la sûreté de l’État, où un procureur a ordonné sa libération contre une caution de 3 000 livres égyptiennes (environ 190 dollars américains). Les quatre femmes ont ensuite été libérées dans la soirée.
Le frère de Sanaa Seif, le militant Alaa Abdel Fattah, se trouve également en détention arbitraire dans l’attente d’un procès depuis septembre 2019, et ce uniquement en raison de son militantisme pacifique. Le 23 novembre 2020, il a été inscrit sur la « liste des terroristes » pour cinq ans, en dehors de toute procédure régulière, dans le cadre de l’affaire n° 1781/2019, instruite par le service du procureur général de la sûreté de l’État (SSSP). Cette décision lui interdit également de voyager à l’étranger et de participer à la vie politique ou publique pour une durée de cinq ans.
Sanaa Seif est une militante en faveur des droits humains et une monteuse de film, qui a déjà été emprisonnée injustement par le passé en lien avec deux affaires séparées. Cette militante des droits humains, la défenseure des droits Yara Sallam et 20 autres personnes ont été arrêtées le 21 juin 2014 à Heliopolis, une banlieue du Caire, après que les forces de sécurité ont dispersé une manifestation dans le secteur. Le 26 octobre 2014, un tribunal correctionnel du Caire a déclaré coupable Sanaa Seif de plusieurs chefs d’accusation liés à la manifestation au titre de la Loi réglementant le droit aux rassemblements publics, processions et manifestations pacifiques (Loi 107 de 2013) et l’a condamnée à trois ans d’emprisonnement, assortis de trois ans de mise à l’épreuve, à une amende de 10 000 livres égyptiennes (environ 630 dollars américains à l’époque), et au versement d’indemnités pour les dégâts causés.
Cette sentence a par la suite été réduite en appel le 28 décembre 2014 à deux ans de prison assortis de deux ans de mise à l’épreuve. Le 23 septembre 2015, Sanaa Seif a été libérée à la faveur d’une grâce présidentielle. Dans le cadre d’une autre affaire, le tribunal correctionnel du Caire l’a condamnée à six mois de prison pour offense au pouvoir judiciaire, le 4 mai 2016. Le 15 novembre 2016, elle a été libérée de prison après avoir purgé sa peine de six mois.
Le 12 juin 2021, l’avocat de Sanaa Seif a soumis une requête pour sa libération conditionnelle auprès du ministre adjoint de l’Intérieur pour le secteur pénitentiaire, et du directeur du haut comité pour les libérations conditionnelles. Au moment où nous rédigions ces lignes, aucune réponse ne leur était parvenue.