Écrire Une militante de la société civile a été libérée d’un établissement psychiatrique

Ardak Achym, blogueuse et militante de la société civile de 52 ans originaire de Chymkent, dans le sud du Kazakhstan, a été libéré de l’établissement psychiatrique dans lequel elle se trouvait en détention depuis le 31 mars. L’enquête pénale ouverte contre cette femme en raison de ses publications sur les réseaux sociaux est toujours en cours.

Le 5 mai, la commission d’appel du tribunal régional du sud du Kazakhstan a annulé la décision du tribunal régional du 12 avril qui avait ordonné la mise en détention d’Ardak Ashym dans un établissement psychiatrique pendant un mois. Elle a ensuite été libérée le 5 mai.

La police a ouvert une enquête pénale contre Ardak Ashym après que quelqu’un eut signalé que ses publications sur les réseaux sociaux critiquaient la politique gouvernementale. Ardak Ashym a appris qu’elle faisait l’objet d’une enquête quand des policiers armés ont procédé à une perquisition de son domicile. Elle a ensuite été conduite au poste de police local où elle a été interrogée puis, d’après sa fille, à la morgue, où une commission l’a soumise à un examen psychiatrique. Elle a d’abord été inculpée d’« incitation à la discorde sociale, nationale, clanique, raciale ou religieuse », au titre de l’article 174 du Code pénal kazakh, puis les charges ont été requalifiées en « insulte à un représentant de l’État par le biais des médias de masse », au titre de l’article 378 du Code pénal.

Le 31 mars, Ardak Ashym a de nouveau été convoquée au poste de police, puis placée en détention dans un établissement psychiatrique. Ses proches ont été convoqués au bureau du conseil local, où on leur a dit qu’Ardak Ashym serait libérée s’ils reconnaissaient publiquement qu’elle souffrait d’une maladie mentale, ce qu’ils ont refusé. Le 5 mai, les charges ont de nouveau été requalifiées en « incitation à la discorde sociale, nationale, clanique, raciale ou religieuse ». L’audience pour ces accusations doit avoir lieu début juin, à Chymkent.

Amnesty International craint toujours qu’Ardak Ashym ait été accusée d’une infraction pénale pour avoir exprimé pacifiquement ses opinions. Si elle est déclarée coupable, cette militante risque deux à sept ans d’emprisonnement.

L’article 174 du Code pénal est de plus en plus utilisé pour réprimer le droit à la liberté d’expression au Kazakhstan. Deux autres militants de la société civile, Max Bokaïev et Talgat Aïan, ont été condamnés à cinq ans d’emprisonnement, notamment au titre de cet article. La condamnation de Talgat Aïan a été commuée le 12 avril 2018 en peine de prison avec sursis et il a été libéré le 29 avril. Max Bokaïev est toujours en prison en dépit du fait que son état de santé se détériore. Les trois journalistes sont des prisonniers d’opinion.

Amnesty International a déjà recueilli des informations sur les graves restrictions du droit à la liberté d’expression au Kazakhstan et les a publiées en 2017 dans un rapport intitulé Think before you post : Closing down social media space in Kazakhstan (voir https://www.amnesty.org/en/documents/eur57/5644/2017/en/).

Ce rapport démontre que, bien que l’article 174 semble être destiné à protéger les personnes des comportements ou propos discriminatoires, notamment de l’incitation à la haine, le terme « discorde » n’est pas défini de manière précise, et la loi est par conséquent formulée en termes vagues. Loin d’être utilisé pour protéger les groupes et personnes les plus vulnérables de la discrimination, l’article 174 est plutôt utilisé pour réduire au silence les voix dissidentes qui diffusent du matériel d’information ou encouragent des discussions critiques des autorités. L’article 174 doit être modifié de manière conséquente afin de veiller à ce que les dispositions destinées à lutter contre l’incitation à la haine et la discrimination soient rédigées avec précision et conformément à l’article 19(3) du PIDCP, en vue de faire en sorte qu’elles ne soient pas utilisées de manière illégale pour réprimer le droit à la liberté d’expression.

Depuis le 13 mars, date à laquelle le parti du Choix démocratique du Kazakhstan a été qualifié d’organisation extrémiste, des dizaines de personnes ont été convoquées pour être interrogées par la police, et certaines ont été placées en détention. Amnesty International a publié une action urgente sur le cas d’Akmaral Tobylova, qui a depuis été libérée pour raisons médicales mais reste sous le coup d’accusations de financement d’une organisation extrémiste, simplement pour avoir consulté le site Internet du parti du Choix démocratique du Kazakhstan (voir https://www.amnesty.org/fr/documents/eur57/8236/2018/fr/).

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