Écrire Des militants condamnés à quatre mois de prison avec sursis

Quatre militants tchadiens arrêtés et inculpés après avoir organisé des manifestations publiques pacifiques ont été condamnés à quatre mois d’emprisonnement avec sursis. La Haute Cour de justice, qui siège à N’Djamena, leur a par ailleurs interdit de prendre part à des activités « subversives ».

Mahamat Nour Ibedou et Younous Mahadjir, tous deux porte-parole de la plateforme Ça suffit, qui rassemble plusieurs organisations de la société civile, Nadjo Kaina Palmer, coordonnateur du mouvement de jeunes Iyina et Céline Narmadji, porte-parole du mouvement de la société civile Trop c’est trop ?!, ont été déclarés coupables d’« incitation à un rassemblement non armé » par la Haute Cour de justice le 14 avril à N’Djamena. Ils ont été condamnés à une peine de quatre mois d’emprisonnement avec sursis, assortie d’une interdiction de prendre part à des activités « subversives ». Leurs avocats ont interjeté appel.

Le procès des quatre militants, accusés d’« incitation à un rassemblement non armé », de « troubles à l’ordre public » et de « désobéissance à un ordre légitime », s’était ouvert le 7 avril. Ces personnes projetaient d’organiser des manifestations publiques pacifiques, qui devaient se dérouler les 22 et 29 mars, afin de protester contre le fait que le président Idriss Déby brigue un cinquième mandat.

Mahamat Nour Ibedou a été arrêté le 21 mars, Younous Mahadjir et Nadjo Kaina Palmer le 22 et Céline Narmadji le 23. Ces quatre militants s’étaient présentés au siège de la police judiciaire pour interrogatoire. Ils y ont été détenus jusqu’à leur transfert à la prison d’Amsinéné, à N’Djamena, le 24 avril.

Lorsqu’ils étaient détenus, Amnesty International les considérait comme des prisonniers d’opinion, arrêtés et condamnés seulement pour avoir exercé, pourtant pacifiquement, leur droit à la liberté d’expression.

Quatorze candidats sont en lice pour l’élection présidentielle au Tchad. La campagne électorale a débuté le 20 mars et le premier tour s’est déroulé le 10 avril.

Parmi les candidats figure le président Idriss Déby, qui a pris le pouvoir en 1990 après avoir renversé Hissène Habré, et qui est en exercice depuis 25 ans ; il brigue un cinquième mandat. En 2005, la Constitution tchadienne a été modifiée de manière à éliminer la limite fixée auparavant à deux mandats présidentiels.

Pour des raisons de sécurité, le ministre de la Sécurité publique et de l’Immigration, Ahmat Mahamat Bachir, a annoncé publiquement le 19 mars que toutes les manifestations publiques ne relevant pas de la campagne électorale seraient interdites.

Le 30 mars, le ministère de la Sécurité publique et de l’Immigration a refusé la demande de plusieurs groupes de la société civile, qui souhaitaient organiser une manifestation pacifique afin d’exhorter les autorités à libérer les quatre militants cités.

Le 4 avril, alors qu’une autre manifestation était prévue pour le lendemain, Albissaty Salhe Alazam, l’un des dirigeants de la plateforme Ça suffit, a été arrêté pour avoir appelé par écrit à participer à ce rassemblement organisé par des groupes de la société civile. Il a été détenu au siège de la police judiciaire jusqu’à son transfert à la prison d’Amsinéné, le 8 avril. Il est inculpé d’« incitation à un rassemblement non armé », « troubles à l’ordre public » et « désobéissance à un ordre légitime ». Son procès, initialement prévu pour le 11 avril, a été reporté au 18.

Le 5 avril, deux groupes de personnes ont décidé de manifester pacifiquement afin d’appeler les autorités à libérer les cinq militants. Les forces de sécurité ont investi le lieu de rassemblement du premier groupe et ont dispersé la foule au moyen de gaz lacrymogène. Le deuxième groupe, qui projetait de manifester pacifiquement devant l’ambassade des États-Unis, a été intercepté par la police. Il y aurait eu au moins deux interpellations et au moins un manifestant a été blessé.

Lors du procès de Mahamat Nour Ibedou, Younous Mahadjir, Nadjo Kaina Palmer et Céline Narmadji, qui s’est déroulé le 7 avril, les forces de sécurité étaient présentes en nombre à l’intérieur et aux abords du palais de justice. Des centaines de personnes se sont rendues sur place en signe de solidarité avec les prévenus. Faute d’espace, beaucoup ont dû rester à l’extérieur. Elles chantaient et criaient des slogans appelant les autorités à libérer Mahamat Nour Ibedou, Younous Mahadjir, Nadjo Kaina Palmer et Céline Narmadji.

Nombre d’entre elles portaient des t-shirts à l’effigie des quatre militants et/ou tenaient des pancartes arborant des slogans. Lorsque Mahamat Nour Ibedou, Younous Mahadjir, Nadjo Kaina Palmer et Céline Narmadji ont été reconduits en prison par des surveillants et des policiers à la fin du procès, leurs sympathisants ont tenté d’empêcher le véhicule de passer. Les forces de sécurité ont tiré plusieurs salves à balles réelles et ont pulvérisé du gaz lacrymogène pour les disperser, ce qui a déclenché un mouvement de panique ; au moins deux personnes ont été blessées.

Amnesty international a publié trois communiqués de presse appelant à libérer immédiatement les quatre militants concernés : https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2016/03/tchad-les-autorites-doivent-liberer-deux-activistes-arrets-pour-avoir-prepare-une-manifestation-pacifique/, https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2016/04/tchad-le-maintien-en-detention-de-quatre-activistes-est-une-injustice/ et https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2016/04/tchad-la-condamnation-de-quatre-activistes-est-une-violation-de-exercice-du-droit-la-libert-dexpression/.

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