Écrire Des militants risquent la prison pour avoir participé à un rassemblement pacifique

Trois militants encourent des peines d’emprisonnement pour avoir fait des discours critiquant l’armée et réclamant des réformes constitutionnelles lors d’un rassemblement pacifique en avril 2019. S’ils sont reconnus coupables, ils risquent jusqu’à deux ans de prison.

Deux d’entre eux sont en liberté sous caution, tandis que le troisième purge déjà une peine d’un an d’emprisonnement et est sous le coup d’autres chefs d’inculpation pour s’être exprimé lors d’autres rassemblements pacifiques.

Les autorités du Myanmar doivent libérer cet homme immédiatement et sans condition, annuler sa condamnation et abandonner toutes les charges retenues contre les trois militants.

Le 3 avril 2019, Kyee Myint, Saw Wai et Nay Myo Zin ont participé à un rassemblement dans la ville de Kawthaung (région de Tanintharyi), dans le sud du pays. Lors de ce rassemblement, qui a réuni environ 700 personnes, ils ont prononcé des discours dans lesquels ils ont critiqué l’armée du Myanmar et son rôle dans la politique du pays, et réclamé des réformes constitutionnelles. Kyee Myint a appelé à modifier la Constitution pour mieux protéger le peuple du Myanmar et empêcher un coup d’État militaire, tandis que Saw Wai – de son vrai nom Saw Win –, a récité un poème et demandé aux personnes présentes de scander « Non aux lois scélérates ! ».

Plus de six mois plus tard, le 17 octobre 2019, le lieutenant-colonel Zaw Zaw, membre de l’Unité côtière de l’armée du Myanmar, a porté plainte contre les trois hommes au titre de l’article 505(a) du Code pénal, qui sanctionne la diffusion de déclarations ou d’informations « visant à inciter ou susceptible d’inciter un agent, un soldat, un marin ou un aviateur, dans l’armée de terre, la marine ou l’armée de l’air, à se rebeller ou à se soustraire ou faillir à son devoir en quelque autre façon ». Cette disposition, qui prévoit une peine maximale de deux ans d’emprisonnement, a été de plus en plus utilisée par l’armée contre des personnes qui la critiquaient au cours de l’année écoulée.

Le procès des trois hommes s’est ouvert le 20 janvier 2020. Lors d’une audience qui s’est tenue le 3 février, le juge du tribunal de la municipalité de Kawthaung a libéré sous caution Kyee Myint et Saw Wai pour raisons médicales – Kyee Myint souffre de diabète, d’hypertension et de problèmes rénaux, tandis que Saw Wai présente des troubles cardiaques graves. En revanche, Nay Myo Zin, qui purge actuellement un an de prison pour avoir réclamé des réformes constitutionnelles lors d’un rassemblement pacifique à Yangon (Rangoon) le 1er avril 2019, restera en détention pendant toute la durée du procès. Arrêté le 19 avril 2019 et incarcéré à la prison d’Insein, à Yangon, il a été condamné à un an d’emprisonnement le 20 septembre pour violation de l’article 505(a) du Code pénal. Il est aussi sous le coup de deux autres chefs d’inculpation aux termes de ce même article pour des discours similaires prononcés lors de rassemblements dans les régions d’Ayeyarwaddy et de Sagaing. Il a été transféré à la prison de Kawthaung le 13 janvier 2020.

Ces trois hommes ont déjà été emprisonnés par le passé en raison de leurs activités militantes pacifiques. Kyee Myint l’a ainsi été à cinq reprises, dont une après son arrestation lors du soulèvement étudiant de 1988. Saw Wai a été arrêté en janvier 2008, puis condamné à deux ans de prison pour avoir écrit un poème viral – déguisé sous la forme d’un poème d’amour – dans lequel il décrivait le major général Than Shwe, alors chef du gouvernement militaire, comme obnubilé par le pouvoir. Nay Myo Zin a été emprisonné à maintes reprises pour son action militante pacifique. En août 2011, il a écopé de 10 ans de prison pour avoir écrit des articles critiquant l’armée ; il a été libéré en janvier 2012 à la faveur d’une grâce présidentielle. En mai 2015, il a été condamné à plus de quatre ans d’emprisonnement après avoir participé à une manifestation pacifique réclamant une enquête sur la mort d’un fermier, tué lors de la violente répression par la police d’une manifestation contre la mine de cuivre controversée de Letpadaung, dans le centre du pays, en mars 2015.

L’armée du Myanmar continue d’exercer un pouvoir économique et politique important dans le pays. Elle fonctionne en dehors de tout contrôle civil, ce qui soustrait de fait ses membres à l’obligation de rendre des comptes. En vertu de la Constitution du Myanmar de 2008, l’armée dispose en outre de 25 % des sièges au Parlement, ce qui lui confère de facto un pouvoir de veto sur les modifications constitutionnelles importantes. Elle contrôle également les trois ministères clés de la Défense, des Affaires frontalières et de l’Intérieur. Le 6 février 2019, le Parlement et la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), parti majoritaire, ont mis en place une Commission conjointe de modification de la Constitution. Comptant des représentants de l’armée parmi ses membres, celle-ci est chargée de rédiger un projet de réforme constitutionnelle.

Amnesty International est préoccupée par les arrestations et incarcérations à répétition dont font l’objet les militant·e·s et les défenseur·e·s des droits humains au Myanmar pour le seul exercice pacifique de leur droit à la liberté d’expression – un droit garanti par l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme. Les autorités du Myanmar doivent garantir le respect et la protection du droit à la liberté d’expression, en particulier à l’heure où le pays se prépare à se rendre aux urnes pour les élections prévues en novembre 2020.

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