Lance Shockley a été accusé d’avoir tué en 2005 un policier qui enquêtait sur un accident mortel de la circulation lié à l’alcool, en 2004, dans lequel le fiancé de la belle-sœur de Lance Shockley avait péri. La thèse de l’accusation était que Lance Shockley avait tué ce fonctionnaire pour empêcher qu’il enquête sur son rôle dans l’accident. La défense a souligné, entre autres, que la police avait centré son attention sur Lance Shockley sans étudier d’autres pistes.
Lors de la sélection du jury pour le procès qui a eu lieu en 2009, un membre potentiel a déclaré qu’il avait récemment publié un livre. Ni l’avocat de la défense, ni le ministère public ne l’ont interrogé sur ce livre et son contenu. Cet homme, dont le fils était policier, a été sélectionné pour participer au jury, qu’il a présidé. Il s’est révélé que son livre était une « autobiographie romancée » et comportait une description longuement détaillée du meurtre par représailles d’un homme ayant tué l’épouse du protagoniste dans un accident lié à l’alcool mais qui n’avait été condamné qu’à une peine avec sursis.
La délibération du jury sur la culpabilité ou l’innocence de l’accusé a duré cinq jours. Bien que le juge ait donné pour consigne à ses membres d’« éviter les films et les livres traitant de procès [...], les séries policières et tout ce qui est dans cette thématique » pendant la phase de délibération, le président du jury a donné des exemplaires de son livre à plusieurs jurés.
Le jury a prononcé un verdict de culpabilité, et les détails et l’utilisation du livre ont alors été révélés. L’avocat de la défense a déposé une requête en nullité, en indiquant qu’il reconnaîtrait son inefficacité du fait qu’il n’avait pas interrogé le juré en question au sujet de son livre lors de la sélection des membres. Le juge lui a proposé d’appeler le président du jury et d’autres jurés à témoigner, mais l’avocat a décliné cette offre et refusé d’appeler la moindre personne à la barre.
La requête en nullité a été rejetée. Le juge a exclu le président du jury pour la phase de détermination de la peine, mais à l’issue de celle-ci, les jurés n’ont pas pu rendre de décision unanime sur ce point. Dans ces circonstances, la législation du Missouri autorise le juge à réexaminer le dossier et à décider de la peine prononcée. Le juge a finalement condamné Lance Shockley à la peine de mort.
Le droit international dispose que toute personne passible de la peine de mort doit bénéficier d’une « assistance judiciaire appropriée à tous les stades de la procédure ». En appel, la cour suprême du Missouri a estimé que l’avocat de la défense n’avait pas été inefficace du point de vue de la Constitution sur la question du livre diffusé par le président du jury. Elle a déclaré que « même si le procès [n’avait] pas été parfait » étant donné que le président du jury avait « apporté son livre au jury isolé » pour la délibération, le juge ne s’était pas trompé en concluant que Lance Shockley « n’avait pas subi de préjudice ».
L’un des juges de cette juridiction a émis une opinion dissidente, en soulignant que ne pas interroger ce juré sur son roman « provocant » et « d’une grande virulence contre l’accusé » et ne pas appeler d’autres jurés à soutenir la requête en nullité signifiait que le verdict et la condamnation à mort devaient être mis de côté. En 2023, la cour fédérale de district a rejeté l’appel de Lance Shockley, en vertu de la déférence avec laquelle les juridictions fédérales doivent traiter les décisions des tribunaux d’État aux termes de la législation américaine.
Le juge de cette cour a également refusé de délivrer un certificat de recevabilité de l’appel à Lance Shockley. Une demande de certificat de recevabilité a été déposée auprès de la Cour fédérale d’appel du huitième circuit, mais elle a été rejetée par deux voix à une ; la juge minoritaire était favorable à un appel pour inefficacité de la défense. Dans au moins quatre autres cours de circuit, sa voix aurait suffi pour que Lance Shockley obtienne le certificat. Ses avocats ont saisi la Cour suprême pour qu’elle statue sur les différences de traitement entre les différentes cours de circuit quant aux demandes de certificat de recevabilité de l’appel.
La Cour suprême a refusé d’examiner cette question ; deux de ses juges minoritaires ont écrit qu’il était « difficile de voir comment la décision d’un avocat de ne pas appeler des personnes à témoigner en faveur d’une requête crédible en nullité, alors qu’il y avait été invité par le juge présidant le tribunal dans un procès où l’accusé encourait la peine capitale, pourrait ne pas constituer une assistance juridique inefficace » et que la Cour fédérale d’appel du huitième circuit avait manifestement eu tort de considérer le rejet de l’appel par la cour fédérale de district comme une décision non discutable, étant donné les « multiples désaccords » entre les nombreux juges qui n’avaient pas la même opinion.
Lance Shockley a toujours clamé son innocence. Il n’existe aucune preuve directe de son implication dans le crime : ni sang, ni empreintes digitales, ni ADN, ni arme du crime, ni témoin. La cour suprême du Missouri a qualifié les éléments retenus contre Lance Shockley de « dossier solide ». Ses avocats décrivent le dossier comme faible. Ils tentent d’obtenir des analyses ADN pratiquées avec les moyens d’aujourd’hui sur des pièces à conviction. Cette demande a été refusée en première instance, mais ils ont fait appel de cette décision.
Lance Shockley est considéré comme une force positive en prison, il apporte son soutien à d’autres hommes traversant une crise et il s’est formé à la désescalade en situation de conflit. Au titre du droit international, le « but essentiel » d’un système pénitentiaire devrait être « l’amendement et le reclassement social » des détenus.
Depuis que la Cour suprême fédérale a approuvé les nouvelles lois relatives à la peine capitale en 1976, 1 637 personnes ont été exécutées dans le pays, dont 101 dans le Missouri. Trente exécutions ont eu lieu aux États-Unis jusqu’à présent en 2025. L’exécution de Lance Shockley, si elle avait lieu, serait la première de l’année dans le Missouri.
Amnesty International s’oppose catégoriquement à la peine de mort, en toutes circonstances.