Écrire Neuf journalistes yémenites détenus arbitrairement

Neuf journalistes sont détenus arbitrairement par le groupe armé des Houthis, au Yémen, depuis juin 2015. Ils semblent être détenus uniquement en raison de leur travail journalistique.

Neuf journalistes yéménites travaillant pour divers organes de presse ont été emmenés de façon arbitraire alors qu’ils se trouvaient dans une chambre d’hôtel à Sanaa, la capitale, le 9 juin 2015. Ils sont actuellement incarcérés au centre de détention provisoire d’Al Thawra, à Sanaa.

Abdelkhaleq Amran, Hisham Tarmoom, Tawfiq al Mansouri, Hareth Humid, Hasan Annab, Akram al Walidi, Haytham al Shihab, Hisham al Yousefi et Essam Balgheeth travaillaient dans une chambre qu’ils avaient louée à l’hôtel Qasr al Ahlam, situé rue Al Sitteen, à Sanaa, quand plusieurs hommes armés ont fait irruption dans la pièce le 9 juin 2015 vers 4 heures du matin. Ces hommes étaient partiellement en uniforme et sur certaines de leurs armes étaient écrits des slogans associés au groupe armé des Houthis et à sa branche politique, Ansarullah. Les journalistes ont d’abord été séparés en deux groupes, qui ont été conduits dans deux postes de police de Sanaa – celui d’Al Ahmar et celui d’Al Hasaba –, où certains ont été autorisés à passer un bref coup de fil à leur famille. Deux jours plus tard, plusieurs d’entre eux ont été transférés à la brigade antiterroriste du Service des enquêtes criminelles, où ils sont restés en détention pendant un mois.

De mi-juillet à mi-septembre, les neuf journalistes ont été détenus au secret dans des lieux non révélés ; ce n’est que grâce aux témoignages d’anciens prisonniers du centre de détention provisoire d’Al Thawra que leurs familles ont appris qu’ils y avaient été transférés. Le centre de détention provisoire d’Al Thawra est placé sous l’autorité du ministère de l’Intérieur du gouvernement contrôlé par les Houthis. Jusque récemment, les détenus ne pouvaient recevoir des visites de leur famille que de façon très sporadique, mais ils ont maintenant droit à une courte visite tous les jeudis. Les familles d’au moins quatre d’entre eux ont indiqué qu’ils avaient subi des tortures ou d’autres mauvais traitement au Service des enquêtes criminelles ; ils auraient notamment été frappés et giflés pendant les interrogatoires. Les proches d’Akram al Walidi ont déclaré qu’il souffrait d’un problème au côlon pour lequel il n’a reçu aucun traitement médical. Depuis que sa famille est autorisée à lui rendre visite, elle peut lui apporter des médicaments.

Certains de ces journalistes travaillent pour des organes de presse qui sont opposés aux Houthis, et d’autres pour des sites d’actualités en ligne favorables au parti d’opposition Al Islah. Au moins trois d’entre eux ont déjà été détenus par les Houthis par le passé.

Les Houthis, principalement issus de la minorité chiite zaïdite installée dans le nord du pays, ont pris le contrôle de plusieurs postes de l’armée et des forces de sécurité à Sanaa en septembre 2014. À la fin de la troisième semaine de janvier 2015, ils avaient attaqué des positions militaires, la résidence présidentielle et des bâtiments gouvernementaux. Le président Abd Rabbu Mansour Hadi et son gouvernement ont alors présenté leur démission, laissant les Houthis prendre de fait le pouvoir dans la capitale et d’autres zones du Yémen.

Depuis, les Houthis renforcent leur contrôle sur Sanaa et le reste du pays. Le 6 février 2015, ils ont dissous le Parlement et publié une déclaration constitutionnelle prévoyant la création d’un conseil présidentiel de transition, destiné à faire office de gouvernement pendant une période transitoire de deux ans. Le 23 mars 2015, le conflit entre d’un côté les Houthis, soutenus par des unités militaires yéménites et une partie des forces de sécurité fidèles à l’ancien président Ali Abdallah Saleh, et de l’autre les unités militaires loyales au président Hadi, soutenues par plusieurs tribus et groupes armés, s’est intensifié dans le sud du pays, qui n’était pas contrôlé par les Houthis jusque-là.

Le 25 mars 2015, une coalition militaire de 10 pays menée par l’Arabie saoudite a lancé des attaques aériennes contre les Houthis, en soutien aux forces fidèles au président Hadi. Les premières frappes ont touché des cibles et des installations militaires sous contrôle houthi, principalement à Sanaa et Saada, dans le nord du pays, puis à Aden et ailleurs. Les deux camps ont commis des atteintes aux droits humains et des violations du droit international humanitaire, dont des crimes de guerre. Plus de 2 700 civils ont trouvé la mort depuis le début du conflit au Yémen, dont un certain nombre dans les attaques aveugles menées par la coalition. Le conflit a aggravé la situation humanitaire déjà catastrophique. Plus de 2,5 millions de personnes ont été déplacées et 82 % de la population yéménite a besoin d’une assistance humanitaire.

Depuis le début des frappes aériennes de la coalition, on a constaté une augmentation brutale du nombre d’arrestations arbitraires, de placements en détention et d’enlèvements par les Houthis et les forces alliées fidèles à l’ancien président Ali Abdullah Saleh. Des dizaines de militants et d’autres personnes se réclamant de divers courants politiques – considérés par les Houthis comme leurs opposants – ont été arbitrairement appréhendés, placés en détention et parfois soumis à des actes de torture et d’autres mauvais traitements. La majorité des personnes visées étaient des dirigeants, des membres ou des sympathisants du parti politique Al Islah, qui dénonce ouvertement les violences perpétrées par les Houthis depuis qu’ils ont pris le contrôle de Sanaa en septembre 2014, et qui est considéré comme favorable aux frappes aériennes de la coalition. La plupart de ces arrestations ont eu lieu dans les villes de Sanaa, Ibb et Hodeida. Muhammad Qahtan, personnalité de premier plan du parti Al Islah, est aux mains des Houthis depuis qu’il a été appréhendé à son domicile, à Sanaa, le 4 avril 2015. Sa famille a pu lui rendre visite le 7 avril, mais depuis la mi-avril il est détenu au secret. Muhammad Qahtan souffre de diabète de type 2 mais n’a pas pu emporter ses médicaments avec lui lors de son arrestation. La veille de celle-ci, le parti Al Islah avait rendue publique une déclaration de soutien à la coalition menée par l’Arabie saoudite et à la légitimité du président yéménite Abd Rabbu Mansour Hadi. Les Houthis ont également harcelé et arrêté des journalistes, des défenseurs des droits humains et les militants qui avaient critiqué leur prise de contrôle sur les institutions gouvernementales.

À Sanaa, Ibb et Hodeida, Amnesty International s’est entretenue avec des dizaines d’anciens détenus et de familles de détenus qui avaient été appréhendés arbitrairement et placés en détention au secret dans des lieux inconnus en 2015. Beaucoup avaient été arrêtés à leur domicile, sans mandat, par des Houthis et des agents fidèles à l’ancien président Saleh, qui avaient pénétré de force chez eux. La plupart avaient été enfermés à plusieurs endroits différents – y compris dans des lieux de détention non officiels, parfois au domicile de particuliers – sans avoir la possibilité de contester la légalité de leur détention ni être informés des raisons de leur détention.

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